Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner le département du Val-de-Marne à lui verser la somme de 105 000 euros au titre du paiement d'heures supplémentaires qu'il estime avoir effectuées du 27 octobre 2004 au 21 juin 2009 ainsi que la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice financier et moral. Par un jugement n° 1410722 du 16 mai 2017, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 17PA02379 du 10 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. A... contre ce jugement.
Par une décision n° 424039 du 5 novembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, a, sur le pourvoi de M. A..., annulé cet arrêt en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A... tendant au paiement de sommes dues au titre du forfait prévu à la première phrase du III de l'article 18 du décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002.
Par un arrêt n° 20PA03309 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. A... contre le jugement du 16 mai 2017 du tribunal administratif de Melun.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 août et 30 novembre 2022 et le 3 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions de première instance et d'appel ;
3°) de mettre à la charge du département du Val-de-Marne la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le décret n° 88-1084 du 30 novembre 1988 ;
- le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ségolène Cavaliere, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de M. A... et à la SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat du département du Val-de-Marne ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 novembre 2024, présentée par M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., assistant socio-éducatif titulaire de la fonction publique hospitalière, a présenté au tribunal administratif de Melun des conclusions tendant à la condamnation du département du Val-de-Marne à lui verser la somme de 105 000 euros au titre du paiement d'heures supplémentaires qu'il estime avoir effectuées du 27 octobre 2004 au 21 juin 2009 alors qu'il était affecté auprès du relais social d'urgence du département, ainsi que la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice financier et moral. Par un jugement du 16 mai 2017, le tribunal administratif a rejeté l'ensemble de ses conclusions et, par un arrêt du 10 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. A... contre ce jugement. Cet arrêt ayant été annulé par une décision du 5 novembre 2020 du Conseil d'Etat en tant qu'il avait rejeté les conclusions de M. A... tendant au paiement de sommes dues au titre du forfait prévu à la première phrase du III de l'article 18 du décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002, la cour administrative d'appel de Paris, ressaisie de cette fraction du litige, doit être regardée, par son arrêt du 30 juin 2022 contre lequel M. A... se pourvoit de nouveau en cassation, comme ayant rejeté les conclusions de l'intéressé afférentes à cette demande.
2. Il ressort des termes de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Paris s'est bornée, pour rejeter ces conclusions, à reprendre les termes de son arrêt du 10 juillet 2018 par lequel elle n'avait statué que sur les conclusions de M. A... tendant au paiement d'heures supplémentaires. Par suite, le requérant est fondé à soutenir, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, qu'elle a ainsi insuffisamment motivé sa décision et à demander l'annulation de cet arrêt.
3. Aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ". Le Conseil d'Etat étant saisi, en l'espèce, d'un second pourvoi en cassation, il lui incombe de régler l'affaire au fond.
4. En premier lieu, aux termes de l'article 18 du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " I. - Les agents mentionnés aux articles 2, premier alinéa, 9 et 37 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée occupant des emplois correspondant à ceux relevant (...) des corps socio-éducatifs de la fonction publique hospitalière, exerçant à temps plein sur des emplois à temps complet et assurant en chambre de veille au sein d'un des établissements mentionnés aux 4° à 6° de l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 la responsabilité d'une période de surveillance nocturne sont soumis à une durée équivalente à la durée légale du travail. / II. - La période de présence en chambre de veille s'étend de l'heure du coucher à l'heure du lever des personnes accueillies, telles qu'elles sont fixées par le tableau de service, sans pouvoir excéder douze heures. / III. - Pour le calcul de la durée légale du travail, chacune des périodes mentionnées au II est décomptée comme trois heures de travail effectif pour les neuf premières heures et comme une demi-heure pour chacune des heures au-delà de neuf heures (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... a été employé, du 27 octobre 2004 au 21 juin 2009, par le relais social d'urgence du département du Val-de-Marne selon un service horaire incluant une activité de jour et de nuit, de 17h à 11h le lendemain, les jours de semaine, et de 10h à 11h lendemain, le week-end, pour une durée mensuelle de travail, en principe, de 151,67 heures. Si le requérant fait valoir que ses bulletins de salaire ne témoignent pas, durant cette période, du versement d'une indemnité ou d'un " forfait nuit ", il ressort également des pièces du dossier que sa durée mensuelle de travail a été calculée, s'agissant des heures effectuées entre 21h et 6h, selon les modalités prévues par le III de l'article 18 du décret du 4 janvier 2002 selon lesquelles les neuf premières heures de nuit sont décomptées comme trois heures de travail effectif.
6. En second lieu, le requérant ne peut utilement soutenir, pour contester le seul point qui reste en litige, soit l'effectivité de la rémunération de ses heures de nuit selon les modalités prévues par le III de l'article 18 du décret du 4 janvier 2002, le jugement du tribunal administratif de Melun du 16 mai 2017 étant devenu définitif sur le rejet de ses conclusions tendant au paiement d'heures supplémentaires, ni de la circonstance qu'il pouvait prétendre, au titre de son service entre 21h et 6h, au versement d'indemnités horaires, en application du décret du 30 novembre 1988 relatif à l'indemnité horaire pour travail normal de nuit et à la majoration pour travail intensif, ni de la circonstance que le service qui était alors le sien méconnaissait les règles applicables à la durée quotidienne du travail issues des dispositions de l'article 7 du décret précité du 4 janvier 2002, dans sa rédaction alors en vigueur.
7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir et l'exception de prescription quadriennale soulevées par le département du Val-de-Marne, que les conclusions de M. A... tendant au paiement de sommes dues au titre du forfait prévu à la première phrase du III de l'article 18 du décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 doivent être rejetées.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. A... soit mise à la charge du département du Val-de-Marne, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par le département du Val-de-Marne au titre de ces dispositions.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 30 juin 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées devant le tribunal administratif de Melun par M. A... tendant au paiement de sommes dues au titre du forfait mentionné au III de l'article 18 du décret du 4 janvier 2002 pour la période d'octobre 2004 à juin 2009 sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au département du Val-de-Marne.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 novembre 2024 où siégeaient : Mme Laurence Helmlinger, assesseure, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Ségolène Cavaliere, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 26 novembre 2024.
La présidente :
Signé : Mme Laurence Helmlinger
La rapporteure :
Signé : Mme Ségolène Cavaliere
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Pilet