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11/10/2024 | FRANCE | N°462632

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 11 octobre 2024, 462632


Vu la procédure suivante :



La société Purfer a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2017 par lequel le maire de Mougins a limité la circulation de ses véhicules sur le chemin de Font de Currault et le chemin des Argelas à quatre passages par jour, pour un poids total autorisé en charge de 32 tonnes maximum, pour la période du 2 janvier au 30 juin 2018. Par un jugement n° 1800615 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.



La société Purfer a demandé au tribu

nal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du s...

Vu la procédure suivante :

La société Purfer a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2017 par lequel le maire de Mougins a limité la circulation de ses véhicules sur le chemin de Font de Currault et le chemin des Argelas à quatre passages par jour, pour un poids total autorisé en charge de 32 tonnes maximum, pour la période du 2 janvier au 30 juin 2018. Par un jugement n° 1800615 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

La société Purfer a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Mougins sur sa demande du 9 février 2018 tendant à ce qu'il l'autorise, pendant une durée d'un an, à faire circuler sur le chemin de Font de Currault et le chemin des Argelas des véhicules d'un poids total autorisé en charge de 44 tonnes et, d'autre part, d'enjoindre au maire de Mougins, sous astreinte de 1000 euros par jour, de lui délivrer une autorisation aux mêmes fins et pour la même durée. Par un jugement n° 1802536 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif a annulé cette décision et rejeté le surplus des conclusions.

Par un arrêt n° 20MA03517 du 24 janvier 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la commune de Mougins, annulé le jugement n° 1802536 du 17 juillet 2020 du tribunal administratif de Nice, puis, statuant par la voie de l'évocation, annulé l'arrêté du 11 décembre 2017 par lequel le maire de Mougins a limité la circulation de ses véhicules sur le chemin de Font de Currault et le chemin des Argelas à quatre passages par jour, pour un poids total autorisé en charge de 32 tonnes maximum, pour la période du 2 janvier au 30 juin 2018, en tant que cet arrêté ne faisait pas entièrement droit à la demande d'autorisation que la société lui avait adressé le 5 décembre 2017, annulé la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 9 février 2018, et enjoint au maire de Mougins de délivrer la dérogation demandée à la société Purfer dans un délai de deux mois.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 24 mars et 22 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Mougins demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la société Purfer la somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Zribi et Texier, avocat de la commune De Mougins.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 22 mai 2017 pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales relatif à la police de la circulation, le maire de Mougins a notamment interdit les chemins des Argelas et du Font de Currault à la circulation des véhicules d'un poids autorisé total en charge de plus de 19 tonnes. La société Purfer a demandé à la commune de l'autoriser à titre dérogatoire, pour l'année 2018, à faire circuler sur ces axes des véhicules d'un poids total autorisé en charge de 44 tonnes. Par un arrêté du 11 décembre 2017, le maire de Mougins a partiellement fait droit à sa demande de dérogation en limitant son autorisation à quatre aller-retours journaliers pour des véhicules d'un poids total autorisé en charge de 32 tonnes jusqu'à fin du mois de juin 2018. Le 9 février 2018, la société Purfer a adressé au maire de Mougins une nouvelle demande d'autorisation, identique à la précédente, qui a fait l'objet d'un rejet tacite. Par un premier jugement n° 1800615 du 17 juillet 2020, devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande d'annulation pour excès de pouvoir formée par la société Purfer contre l'arrêté du 11 décembre 2017. Par un second jugement n° 1802536 du même jour, il a en revanche annulé pour excès de pouvoir la décision de rejet née du silence gardé par le maire de Mougins sur la demande du 9 février 2018. La commune de Mougins demande l'annulation de l'arrêt du 24 janvier 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur son appel, annulé le jugement n° 1802536 du 17 juillet 2020 du tribunal administratif de Nice, puis, statuant par la voie de l'évocation, annulé l'arrêté du 11 décembre 2017 en tant que cet arrêté ne faisait pas entièrement droit à la demande d'autorisation de la société Purfer, annulé la décision implicite de rejet de la demande du 9 février 2018 et enjoint à son maire de délivrer la dérogation demandée à la société Purfer dans un délai de deux mois.

2. Il ressort des écritures produites devant elle que la cour administrative d'appel de Marseille n'était saisie par les parties, à l'appui de leurs conclusions relatives aux décisions individuelles prises par le maire de Mougins sur les demandes de la société Purfer, par la voie de l'exception, d'aucune contestation tirée, de la légalité de l'arrêté du 22 mai 2017. En soulevant d'office, pour annuler les décisions en litige, le moyen, qui n'était au surplus pas d'ordre public, tiré de l'illégalité de l'article 8 de cet arrêté, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, elle a méconnu les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.

3. Il y a lieu, par suite, d'annuler son arrêt, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 812-2 du code de justice administrative.

5. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté du 22 mai 2017 du maire de Mougins portant réglementation de la circulation et interdisant notamment les chemins des Argelas et du Font de Currault à la circulation des véhicules d'un poids autorisé total en charge de plus de 19 tonnes, dont le requérant n'avait demandé ni la modification ni l'abrogation, ne prévoyait pas d'autres possibilités de dérogation que celles ouvertes par son article 11 pour les véhicules publics, les véhicules de secours, les véhicules de nettoiement, les bus et les véhicules des entreprises remplissant une mission de service public sur les axes routiers concernés. Par suite, le maire de Mougins a légalement rejeté la demande de dérogation individuelle présentée par la société Purfer, dont les véhicules n'entraient dans aucune de ces exceptions. Il en résulte que le moyen tiré par elle de l'erreur manifeste d'appréciation commise par la commune dans l'appréciation du risque de mouvement de terrain sur certains axes routiers ne pouvait qu'être écarté. En se fondant néanmoins sur ce moyen pour annuler le rejet de la demande de dérogation individuelle présentée par la société Purfer, le tribunal administratif de Nice a commis une erreur de droit qui justifie l'annulation de son jugement, les autres moyens de la requête ne pouvant qu'être écarté pour le même motif.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Purfer la somme de 5 000 euros à verser à la commune de Mougins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative pour l'ensemble de la procédure. Les dispositions de ce même article font obstacle à ce que la somme demandée par la société Purfer soit mise à la charge de la commune de Mougins, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt n° 20MA03517 du 24 janvier 2022 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : Le jugement n° 1802536 du 17 juillet 2020 du tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 3 : La demande présentée par la société Purfer devant le tribunal administratif de Nice et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La société Purfer versera la somme de 5 000 euros à la commune de Mougins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Mougins et à la société Purfer.

Délibéré à l'issue de la séance du 23 septembre 2024 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, M. Alain Seban, Mme Laurence Helmlinger, conseillers d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 11 octobre 2024.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Dominique Langlais

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 462632
Date de la décision : 11/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 oct. 2024, n° 462632
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP ZRIBI, TEXIER

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:462632.20241011
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