Vu la procédure suivante :
La société FMT a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos de 2006 à 2012 et des montants de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittés au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2012. Par un jugement n° 1801853 du 2 décembre 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 21NT00213 du 7 octobre 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par la société FMT contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 7 décembre 2022, 7 mars 2023 et 18 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société FMT demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bastien Lignereux, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Hannotin avocats, avocat de la société FMT ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société FMT a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a notifié des rectifications qui ont conduit à la mise en recouvrement, par avis du 15 septembre 2016, de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2013 et 2014 et de rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. Par une réclamation du 13 juin 2017, la société FMT a demandé, en conséquence de ces rectifications, la réduction des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos de 2006 à 2012 et des montants de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittés au titre de la période du
1er janvier 2006 au 31 décembre 2012. Cette réclamation ayant été rejetée par l'administration fiscale, la société FMT a saisi du litige le tribunal administratif de Rennes, qui a rejeté sa demande par un jugement du 2 décembre 2020. La société FMT se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 octobre 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
2. Aux termes de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation (...) ". Seuls doivent être regardés comme constituant le point de départ du délai prévu au c de la première partie de cet article les événements qui ont une incidence directe sur le principe même de l'imposition, son régime ou son mode de calcul.
3. En premier lieu, en jugeant que la société FMT avait eu prise sur la transaction conclue avec l'administration fiscale le 22 août 2016, en l'acceptant et en la signant, et que, par suite, cette transaction ne pouvait être regardée comme un événement de nature à rouvrir le délai de réclamation, au sens des dispositions citées au point 2, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.
4. En second lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société FMT, qui exerce l'activité de lotisseur, a acquis, durant la période vérifiée et antérieurement à celle-ci, des terrains dans le cadre de cessions prévoyant en contrepartie le versement d'un prix complété par une obligation de faire consistant pour la société à réaliser des travaux de viabilisation sur des parcelles demeurant la propriété des vendeurs. Le vérificateur a constaté, d'une part, que les opérations relatives à ces obligations de faire avaient été comptabilisées exclusivement dans des comptes de tiers, sans influer sur la détermination du résultat imposable, alors qu'elles auraient dû être retranscrites dans les comptes de produits et de charges d'exploitation, et, d'autre part, que les travaux de viabilisation correspondant à ces obligations, qui n'avaient fait l'objet d'aucune facturation aux propriétaires, n'avaient pas été soumis à la taxe sur la valeur ajoutée. Le vérificateur a rectifié le chiffre d'affaires et le résultat des exercices clos au cours de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 en conséquence de la correction de ces erreurs de comptabilisation.
5. La cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant, implicitement mais nécessairement, que l'avis de mise en recouvrement du 15 septembre 2016, fondé sur les rectifications décrites au point précédent, qui ne se limitaient pas à remettre en cause l'exercice de rattachement de charges mais invalidaient l'ensemble de la méthode de comptabilisation de certaines des opérations réalisées par la société, n'était pas de nature à avoir une incidence directe sur le principe même des impositions faisant l'objet de la réclamation, leur régime ou leur mode de calcul, et en en déduisant que cet avis n'avait pas constitué un événement de nature à rouvrir le délai de réclamation, au sens des dispositions citées au point 2.
6. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société FMT doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société FMT est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société FMT et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 20 juin 2024 où siégeaient :
Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Vincent Daumas, conseiller d'Etat et M. Bastien Lignereux, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 16 juillet 2024.
La présidente :
Signé : Mme Anne Egerszegi
Le rapporteur :
Signé : M. Bastien Lignereux
Le secrétaire :
Signé : M. Brian Bouquet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :