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22/12/2023 | FRANCE | N°470988

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 22 décembre 2023, 470988


Vu la procédure suivante :



Mme C... B..., épouse A..., et la société SMJ, agissant en qualité de mandataire liquidateur de Mme A..., ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de l'obligation de payer les sommes résultant de, respectivement, neuf et trois saisies administratives à tiers détenteur, émises les 13 mars et 15 novembre 2019 par le comptable chargé du pôle de recouvrement spécialisé de l'Eure. Par un jugement

nos 1902836, 2001236 du 29 décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a partiellement d

échargé Mme A... et la société SMJ de l'obligation de payer ces sommes et rejeté ...

Vu la procédure suivante :

Mme C... B..., épouse A..., et la société SMJ, agissant en qualité de mandataire liquidateur de Mme A..., ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de l'obligation de payer les sommes résultant de, respectivement, neuf et trois saisies administratives à tiers détenteur, émises les 13 mars et 15 novembre 2019 par le comptable chargé du pôle de recouvrement spécialisé de l'Eure. Par un jugement

nos 1902836, 2001236 du 29 décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a partiellement déchargé Mme A... et la société SMJ de l'obligation de payer ces sommes et rejeté le surplus des conclusions de leurs demandes.

Par un arrêt n° 21DA00483 du 1er décembre 2022, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par Mme A... et la société JSA, mandataire liquidateur nommé en remplacement de la société SMJ, contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les

1er février et 2 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... et

la société JSA demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

- la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la

SCP Buk Lament - Robillot, avocat de Mme A... et de la société JSA ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 30 novembre 2023, présentée par

Mme A... et la société JSA ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le comptable chargé du pôle de recouvrement spécialisé de l'Eure a notifié à Mme A... et à la société SMJ, son premier mandataire liquidateur, douze saisies administratives à tiers détenteur, en vue du recouvrement de différentes créances fiscales relatives aux années 2002 à 2008 pour un montant total de 793 462,08 euros. Par un jugement du 29 décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a déchargé Mme A... et la société SMJ de l'obligation de payer à concurrence de la somme de 170 725 euros. Mme A... et la société JSA, mandataire liquidateur nommé le 7 septembre 2020 en remplacement de la société SMJ, se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 1er décembre 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel qu'elles ont formé contre ce jugement en tant qu'il leur était défavorable.

2. En premier lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour écarter le moyen tiré de ce que le tribunal administratif de Rouen aurait omis de répondre au moyen tiré de ce qu'il ne pouvait prononcer que la décharge totale de l'obligation de payer faute de pouvoir se substituer à l'administration pour définir le montant des sommes restant dues, la cour a relevé que ce montant résultait des écritures de l'administration fiscale. En jugeant ainsi, la cour n'a pas insuffisamment motivé son arrêt.

3. En deuxième lieu, en jugeant, d'une part, que la circonstance que les créances fiscales en cause n'auraient pas été déclarées dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte par le jugement du tribunal de commerce de Versailles du

7 décembre 1999 était sans incidence sur le recouvrement des créances fiscales en litige, et en écartant, d'autre part, le moyen tiré de la méconnaissance du délai de prescription prévu à l'article L. 274 du livre des procédures fiscales faute de notification d'actes de poursuite au liquidateur, la cour a suffisamment répondu au moyen tiré de ce que les actes de recouvrement et de poursuite auraient dû être notifiés au liquidateur de Mme A....

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises, repris à l'article L. 621-32 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises : " I. - Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture sont payées à leur échéance lorsque l'activité est poursuivie. (...) / II. - En cas de liquidation judiciaire, elles sont payées par priorité à toutes les autres créances, à l'exception de celles qui sont garanties par le privilège établi aux articles L. 143-10, L. 143-11, L. 742-6 et L. 751-15 du code du travail, des frais de justice, de celles qui sont garanties par des sûretés immobilières ou mobilières spéciales assorties d'un droit de rétention ou constituées en application du chapitre V du titre II du livre 5. / (...) ". Aux termes de l'article 50 de la loi du 25 janvier 1985, repris à l'article

L. 621-43 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 : " A partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au représentant des créanciers. (...). " Aux termes de l'article 53 de la loi du

25 janvier 1985, repris à l'article L. 621-46 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 : " A défaut de déclaration dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion (...)// Les créances qui n'ont pas été déclarées et n'ont pas donné lieu à relevé de forclusion sont éteintes./(...). " Ces dispositions sont applicables aux procédures collectives en cours au 1er janvier 2006, compte tenu des dispositions de l'article 191 de la loi du 26 janvier 2005.

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les créances en litige, relatives aux années d'imposition 2002 à 2008, sont nées après le jugement d'ouverture de la procédure de redressement dont Mme A... a fait l'objet, prononcé le 9 novembre 1999. Elles n'étaient dès lors pas soumises à l'obligation de déclaration prévue par l'article 50 de la loi du 25 janvier 1985 repris à l'article L. 621-43 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005, cité au point 4 ci-dessus et applicable à la procédure ouverte à l'encontre de la requérante. Par suite, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'absence de déclaration des créances fiscales au liquidateur de Mme A... était sans incidence sur leur exigibilité et leur recouvrement.

6. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en jugeant que la circonstance que le comptable public aurait adressé au liquidateur la liste des créances non acquittées nées postérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire était de nature à rendre exigibles les créances fiscales en litige est dirigé contre un motif surabondant de l'arrêt attaqué et ne peut par suite qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... et la société JSA ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent. Leur pourvoi doit par suite être rejeté, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme A... et de la société JSA est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B..., épouse A..., à la société JSA, agissant en qualité de mandataire liquidateur de Mme A..., et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 30 novembre 2023 où siégeaient :

Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 22 décembre 2023.

La présidente :

Signé : Mme Anne Egerszegi

Le rapporteur :

Signé : M. Cyril Martin de Lagarde

Le secrétaire :

Signé : M. Brian Bouquet

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 470988
Date de la décision : 22/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 déc. 2023, n° 470988
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyril Martin de Lagarde
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP BUK LAMENT - ROBILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:470988.20231222
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