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12/07/2023 | FRANCE | N°463709

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 12 juillet 2023, 463709


Vu la procédure suivante :

La société New Asia a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 11 octobre 2008 au 31 décembre 2010 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n°s 1721068, 1827563 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Par un arrêt

n° 20LY00040 du 3 mars 2022, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'app...

Vu la procédure suivante :

La société New Asia a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 11 octobre 2008 au 31 décembre 2010 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n°s 1721068, 1827563 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20LY00040 du 3 mars 2022, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la société New Asia contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et nouveaux mémoires en réplique, enregistrés les 3 mai et 28 juin 2022 et les 5 mai et 27 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société New Asia demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Mazauric, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la société New Asia ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société New Asia qui exerce une activité de restauration, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité au titre de la période du 7 mai 2008 au 31 décembre 2010. Elle demande l'annulation de l'arrêt du 3 mars 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel contre le jugement du 19 novembre 2019 du tribunal administratif de Lyon rejetant sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2009 et 2010, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 11 octobre 2008 au 31 décembre 2010 ainsi que des pénalités correspondantes, à la suite de cette vérification.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. La conclusion d'une transaction avec l'administration fiscale par laquelle le contribuable donne son accord aux rehaussements de base notifiés met fin à la procédure contradictoire sans que celle-ci puisse être rouverte par le défaut d'exécution de la transaction par le fait du contribuable.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société New Asia, a conclu avec l'administration fiscale un contrat de transaction, approuvé le 3 janvier 2014 par cette administration, prévoyant une réduction des pénalités mises à la charge de la société moyennant, d'une part, le règlement par celle-ci de sa dette fiscale restante selon des modalités fixées en accord avec le comptable public, d'autre part, le nantissement de son fonds de commerce et enfin le renoncement à engager toute action contentieuse concernant l'imposition en litige. Il ressort également des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société, après novembre 2014, a notamment cessé d'effectuer les règlements de sa dette fiscale puis a présenté une réclamation contentieuse et n'a qu'ultérieurement communiqué à l'administration fiscale la preuve de l'inscription du nantissement au registre du greffe du tribunal de commerce. Dès lors, la cour administrative d'appel de Lyon a pu, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation et sans commettre d'erreur de droit, juger que le défaut d'exécution de la transaction était le seul fait de la société New Asia, tenant à l'introduction de sa réclamation contentieuse, et que l'administration fiscale, qui avait constaté pour ce motif la caducité de la transaction le 16 juillet 2015, n'était pas tenue de rouvrir la procédure contradictoire ni de faire droit à la demande d'entretien avec l'interlocuteur départemental adressée le 16 août 2013, antérieurement à la conclusion de la transaction.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) ". Il résulte de ces dispositions, conformément à leur finalité, que l'administration fiscale doit être regardée comme ayant établi l'imposition conformément à l'avis exprès de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lorsqu'elle ne s'écarte, le cas échéant, de cet avis, que dans une mesure favorable au contribuable. Il en résulte également, lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités, que la charge de la preuve incombe au contribuable dès lors que l'administration doit ainsi être regardée comme ayant établi l'imposition conformément à l'avis exprès de la commission départementale des impôts.

5. En premier lieu, il ressort des motifs de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que, contrairement à ce qui a été dit au point 4, la charge de la preuve incombait, dans une telle circonstance, à l'administration. Toutefois, dès lors qu'en définitive, en contradiction avec la règle qu'elle a ainsi énoncée à tort, la cour a fait peser sur la société New Asia la charge d'établir l'exagération des impositions en litige, le moyen d'erreur de droit doit être écarté.

6. En second lieu, la cour n'a ni dénaturé les pièces du dossier ni inexactement qualifié les faits en jugeant qu'en se bornant à faire valoir, pour contester la mise en œuvre par l'administration fiscale de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires dites " des liquides ", approuvée par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, que la part des boissons dans le prix du buffet libre qu'elle pratiquait n'était pas constante au cours de la semaine, sans établir que les ratios appliqués, qui étaient ceux qu'avait déterminés la commission départementale, n'étaient pas représentatifs de la réalité de son activité, la société requérante n'établissait pas que la méthode de reconstitution utilisée aurait été substantiellement viciée dans son principe ou excessivement sommaire.

7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la société New Asia doivent être rejetées, y compris celles qui tendent à l'application des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : le pourvoi de la société New Asia est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société New Asia et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 28 juin 2023 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,

Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Vincent Daumas, M. Nicolas Polge,

Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Vincent Mazauric, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 12 juillet 2023.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Vincent Mazauric

La secrétaire :

Signé : Mme Fehmida Ghulam

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 463709
Date de la décision : 12/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - RECTIFICATION (OU REDRESSEMENT) - GÉNÉRALITÉS - CONCLUSION D’UNE TRANSACTION AVEC L’ADMINISTRATION FISCALE – EFFET – FIN DE LA PROCÉDURE CONTRADICTOIRE – RÉOUVERTURE À RAISON D’UN DÉFAUT D’EXÉCUTION PAR LE CONTRIBUABLE – ABSENCE [RJ1].

19-01-03-02-01 La conclusion d’une transaction avec l’administration fiscale par laquelle le contribuable donne son accord aux rehaussements de base notifiés met fin à la procédure contradictoire sans que celle-ci puisse être rouverte par le défaut d’exécution de la transaction par le fait du contribuable.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - RECTIFICATION (OU REDRESSEMENT) - COMMISSION DÉPARTEMENTALE - ADMINISTRATION S’ÉCARTANT DE L’AVIS DE LA CDI DANS UNE MESURE FAVORABLE AU CONTRIBUABLE – 1) ETABLISSEMENT DE L’IMPÔT CONFORMÉMENT À CET AVIS – EXISTENCE – 2) CONSÉQUENCE – COMPTABILITÉ COMPORTANT DE GRAVES IRRÉGULARITÉS – CHARGE DE LA PREUVE INCOMBANT AU CONTRIBUABLE.

19-01-03-02-03 1) Il résulte des dispositions de l’article L. 192 du livre des procédures fiscales (LPF), conformément à leur finalité, que l’administration fiscale doit être regardée comme ayant établi l’imposition conformément à l’avis exprès de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (CDI) lorsqu’elle ne s’écarte, le cas échéant, de cet avis, que dans une mesure favorable au contribuable. ...2) Il en résulte également, lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités, que la charge de la preuve incombe au contribuable dès lors que l’administration doit ainsi être regardée comme ayant établi l’imposition conformément à l’avis exprès de la CDI.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - QUESTIONS COMMUNES - DIVERS - ADMINISTRATION S’ÉCARTANT DE L’AVIS DE LA CDI DANS UNE MESURE FAVORABLE AU CONTRIBUABLE – 1) ETABLISSEMENT DE L’IMPÔT CONFORMÉMENT À CET AVIS – EXISTENCE – 2) CONSÉQUENCE – COMPTABILITÉ COMPORTANT DE GRAVES IRRÉGULARITÉS – CHARGE DE LA PREUVE INCOMBANT AU CONTRIBUABLE.

19-02-01-04-01 1) Il résulte des dispositions de l’article L. 192 du livre des procédures fiscales (LPF), conformément à leur finalité, que l’administration fiscale doit être regardée comme ayant établi l’imposition conformément à l’avis exprès de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (CDI) lorsqu’elle ne s’écarte, le cas échéant, de cet avis, que dans une mesure favorable au contribuable. ...2) Il en résulte également, lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités, que la charge de la preuve incombe au contribuable dès lors que l’administration doit ainsi être regardée comme ayant établi l’imposition conformément à l’avis exprès de la CDI.


Références :

[RJ1]

Cf., en l’étendant au-delà d’une transaction portant sur les sanctions, CE, 10 août 2005, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie c/ Mme Chatelus, n° 269885, T. pp. 827-829-831.


Publications
Proposition de citation : CE, 12 jui. 2023, n° 463709
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Mazauric
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:463709.20230712
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