Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 6 février 2018 par laquelle le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux jours. Par un jugement n° 1800937 du 14 décembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 19LY00559 du 1er avril 2021, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé ce jugement ainsi que la décision du 6 février 2018.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juin et 1er septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. B... ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
- le statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Patrick Pailloux, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Thomas Pez-Lavergne, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté et à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. A... B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... a été recruté comme moniteur de gestion par la chambre de métiers et de l'artisanat de Saône-et-Loire en 1992 et a ensuite été nommé sur un poste de cadre en tant que chargé du développement économique au sein de cette même structure, devenue " chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté " depuis 2019. Par une décision du 6 février 2018, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonction de deux jours à raison de manquements au devoir d'obéissance hiérarchique, de difficultés relationnelles et de comportements inappropriés envers la hiérarchie et des collègues. M. B... a alors demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler cette décision. Par un jugement du 14 décembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. La chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1er avril 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé ce jugement ainsi que la décision du 6 février 2018.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) infligent une sanction ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. En estimant que la décision de sanction attaquée se bornait à énumérer des griefs en termes généraux et n'était par suite pas suffisamment motivée, alors qu'il ressort des termes mêmes de cette décision qu'elle indique de manière suffisamment précise les circonstances de droit ainsi que les faits reprochés à M. B... par l'autorité disciplinaire, en précisant les personnes concernées, et sans que la circonstance qu'elle ne mentionne pas la date précise des faits ayant justifié la sanction permette de considérer que l'intéressé n'était pas, à la lecture des motifs, informé de ces faits, la cour administrative d'appel a dénaturé les pièces du dossier.
4. En second lieu, aux termes de l'article 15 du chapitre III du statut du personnel des chambres de commerce et d'artisanat, relatif à la notation et à l'avancement : " Dès l'entrée en fonction de chaque agent, il est constitué un dossier à son nom, à l'initiative du secrétaire général ou du directeur général en ce qui concerne l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat. (...) Le dossier comprend, en outre, une copie des décisions portant nomination, titularisation, avancement, promotion, sanctions et changements affectant la situation administrative de l'agent ainsi que les fiches descriptives de poste et les comptes rendus d'évaluation et d'une façon générale tout document requis pour l'exercice des fonctions. (...) Aucune mention discriminatoire, note, marque ou remarque faisant état des opinions politiques, religieuses, philosophiques ou syndicales de l'agent, ne peut figurer au dossier ".
5. Pour juger que la décision de sanction avait été prise en méconnaissance de ces dispositions, la cour s'est fondée sur la seule circonstance que le rapport de saisine du conseil de discipline figurant au dossier mentionnait l'exercice par M. B... de fonctions de délégué syndical central d'une organisation syndicale et que la décision attaquée avait été prise au vu de ce rapport, figurant au dossier de l'intéressé. En statuant ainsi, sans rechercher si une telle mention, qui se bornait à faire une référence objective aux activités syndicales de M. B..., avait eu une influence sur l'avis émis par le conseil de discipline ou sur la décision prise par le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.
6. Il résulte tout de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens, que la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce fondement par M. B..., qui est la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros à verser à la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté, au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 1er avril 2021 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : M. B... versera la somme de 3 000 euros à la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la chambre de métiers et de l'artisanat de région Bourgogne-Franche-Comté et à M. A... B....
Délibéré à l'issue de la séance du 13 janvier 2023 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Christian Fournier, M. Hervé Cassagnabère, M. Jonathan Bosredon et Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat ; M. Patrick Pailloux, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 7 février 2023.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
Le rapporteur :
Signé : M. Patrick Pailloux
La secrétaire :
Signé : Mme Elisabeth Ravanne