Vu les procédures suivantes :
Sous le n° 19NT01714, l'association " Sans offshore à l'horizon ", l'association " Sauvegarde des côtes d'opale picarde et d'albâtre ", la coopérative des artisans pêcheurs associés, le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins des Hauts-de-France, les communes d'Ault, de Cayeux-sur-Mer, de Criel-sur-Mer, du Crotoy, de Mers-les-Bains, M. A... B..., M. D... F..., M. C... H..., M. G... E..., le cabinet de Simencourt et la SARL Cotteau ont demandé à la cour administrative d'appel de Nantes d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2018, publié au Journal officiel du 6 novembre suivant, par lequel le ministre de la transition écologique et solidaire a, sur le fondement des articles L. 311-1 et suivants du code de l'énergie, délivré à la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport (EMDT) une autorisation d'exploiter un parc éolien au large des communes de Dieppe et du Tréport et la décision du 4 mars 2019 par laquelle le même ministre a rejeté leur recours gracieux contre l'arrêté précité.
Sous le n° 19NT02501, l'association " Sans offshore à l'horizon ", l'association " Sauvegarde des côtes d'Opale picarde et d'Albâtre ", la société pour la protection des paysages et de l'esthétique et de la France, la coopérative des artisans pêcheurs associés, le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins des Hauts-de-France, le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Normandie, les communes d'Ault, de Cayeux-sur-Mer, de Criel-sur-Mer, du Crotoy, de Mersles-Bains, M. A... B..., M. D... F..., M. C... H..., M. G... E..., la SARL Héraclès, la SARL Les comptoirs de l'océan, le cabinet de Simencourt et la SARL Cotteau ont demandé à la cour administrative d'appel de Nantes d'annuler l'arrêté des 21 et 26 février 2019 par lequel les préfets de la Somme et de la Seine-Maritime ont, sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, autorisé la société Eoliennes en mer Dieppe-Le Tréport (EMDT) à exploiter son projet de parc éolien en mer au large des communes de Dieppe et du Tréport.
Sous le n° 19NT02520, l'association " Sans offshore à l'horizon ", l'association " Sauvegarde des côtes d'opale picarde et d'albâtre ", la société pour la protection des paysages et de l'esthétique et de la France, la coopérative des artisans pêcheurs associés, le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins des Hauts-de-France, le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Normandie, les communes d'Ault, de Cayeux-sur-Mer, de Criel-sur-Mer, du Crotoy, de Mers-les-Bains, M. A... B..., M. D... F..., M. C... H..., M. G... E..., la SARL Héraclès, la SARL Les comptoirs de l'océan, le cabinet de Simencourt et la SARL Cotteau ont demandé à la cour administrative d'appel de Nantes, d'une part, d'annuler l'arrêté des 21 et 26 février 2019 par lequel les préfets de la Somme et de la Seine-Maritime ont autorisé la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport (EMDT), sur le fondement du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement dans le cadre de la construction, de l'exploitation et du démantèlement d'un parc éolien en mer au large des communes de Dieppe et du Tréport, à déroger aux interdictions de destructions des spécimens de Pipistrelle de Nathusius, de Fou de Bassan, de Plongeon catmarin, de Plongeon arctique, de Fulmar boréal, de Guillemot de Troïl, de Pingouin torda, de Goéland argenté, de Goéland marin, de Goéland brun, de Mouette tridactyle et de grand Labbe, d'altération des habitats de la Pipistrelle de Nathusius, du Phoque veau-marin, du Phoque gris, du Marsouin commun, du Grand dauphin, du Fou de Bassan, du Plongeon catmarin, du Plongeon arctique, du Fulmar Boréal, du Guillemot de Troïl et du Pingouin Torda, ainsi que de perturbation intentionnelle des spécimens de l'intégralité de ces espèces et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 27 février 2019 par lequel le ministre de la transition écologique et solidaire a autorisé la société EMDT, sur le fondement du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, dans le cadre de la construction, de l'exploitation et du démantèlement d'un parc éolien en mer au large des communes de Dieppe et du Tréport, à déroger à l'interdiction d'altération des habitats du Phoque veau-marin, du Phoque gris, du Marsouin commun, du Grand Dauphin, du Guillemot de Troïl et du Pingouin Torda.
1° Par un arrêt nos 19NT01714, 19NT02501, 19NT02520 du 6 octobre 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a, d'une part, annulé l'arrêté des préfets de la Somme et de la Seine-Maritime des 21 et 26 février 2019 en tant qu'il porte dérogation aux interdictions de destruction de spécimens et d'altération des habitats de certaines espèces, sursis à statuer sur le surplus des conclusions de la requête n° 19NT02520 présentée par l'association " Sans offshore à l'horizon " et autres jusqu'à ce que le ministre de la transition écologique et solidaire ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation de l'arrêté du 27 février 2019, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt et, d'autre part, suspendu l'exécution de l'arrêté du ministre de la transition écologique et solidaire du 12 octobre 2018, pris au titre du code de l'énergie, de l'arrêté des préfets de la Somme et de la Seine-Maritime des 21 et 26 février 2019, pris au titre de la police de l'eau, et de l'arrêté des préfets de la Somme et de la Seine-Maritime des 21 et 26 février 2019, pris au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, dans sa partie non annulée, jusqu'à la délivrance, par le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre chargé des pêches maritimes, de la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement s'agissant des interdictions d'altération des habitats du Phoque veau-marin, du Phoque gris, du Marsouin commun, du Grand Dauphin, du Guillemot de Troïl et du Pingouin Torda et, enfin, rejeté les requêtes n°s 19NT01714 et 19NT02501 de l'association "Sans offshore à l'horizon" et autres et la requête n° 19NT02520, en tant qu'elle émane de la coopérative des artisans pêcheurs associés, des communes d'Ault, de Cayeux-sur-Mer, de Criel-sur-Mer, du Crotoy, de Mers-les-Bains, de la SARL Comptoirs de l'Océan et du cabinet de Simencourt.
Sous le n° 447229, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 4 décembre 2020, le 1er mars 2021 et les 27 juin et 5 décembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Sans offshore à l'horizon " et autres demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Par un arrêt n° 19NT02520 du 27 avril 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 février 2019 par lequel le ministre de la transition écologique et solidaire a autorisé la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport (EMDT) à déroger à l'interdiction d'altération des habitats du phoque veau-martin, du phoque gris, du marsouin commun, du grand dauphin, du guillemot de troïl et du pingouin torda.
Sous le n° 453855, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, et un mémoire en réplique enregistrés les 22 juin et 17 septembre 2021 et 27 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Sans offshore à l'horizon " et autres demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de l'association " Sans offshore à l'horizon " et autres et à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 12 octobre 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire a autorisé la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport (EMDT) à exploiter un parc éolien d'une capacité de production de 496 MW, localisé sur le domaine public maritime au large des communes de Dieppe et du Tréport au titre du code de l'énergie. Par un arrêté inter-préfectoral des 21 et 26 février 2019, les préfets de la Somme et de la Seine-Maritime ont, sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, autorisé la société Eoliennes en mer Dieppe-Le Tréport (EMDT) à exploiter son projet de parc éolien en mer au large des communes de Dieppe et du Tréport. Enfin, par un arrêté des 21 et 26 février 2019, les préfets de la Somme et de la Seine-Maritime ont autorisé la société EMDT, sur le fondement du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, dans le cadre de la construction, de l'exploitation et du démantèlement d'un parc éolien en mer au large des communes de Dieppe et du Tréport, à déroger aux interdictions de destruction des spécimens de Pipistrelle de Nathusius, de Fou de Bassan, de Plongeon catmarin, de Plongeon arctique, de Fulmar boréal, de Guillemot de Troïl, de Pingouin torda, de Goéland argenté, de Goéland marin, de Goéland brun, de Mouette tridactyle et de grand Labbe, d'altération des habitats de la Pipistrelle de Nathusius, du Phoque veau-marin, du Phoque gris, du Marsouin commun, du Grand dauphin, du Fou de Bassan, du Plongeon catmarin, du Plongeon arctique, du Fulmar Boréal, du Guillemot de Troïl et du Pingouin Torda, ainsi que de perturbation intentionnelle des spécimens de l'intégralité de ces espèces. Par un arrêté du 27 février 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire a autorisé la société EMDT, sur le fondement du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, dans le cadre de la construction, de l'exploitation et du démantèlement d'un parc éolien en mer au large des communes de Dieppe et du Tréport, à déroger à l'interdiction d'altération des habitats du Phoque veau-marin, du Phoque gris, du Marsouin commun, du Grand Dauphin, du Guillemot de Troïl et du Pingouin Torda. L'association " Sans offshore à l'horizon " et autres se pourvoient en cassation contre les deux arrêts du 6 octobre 2020 et du 27 avril 2021 par lesquels la cour administrative d'appel de Nantes a dans un premier temps, par son arrêt du 6 octobre 2020, annulé l'arrêté des 21 et 26 février 2019 des préfets de la Somme et de la Seine-Maritime en tant qu'il porte dérogation aux interdictions de destruction des spécimens de Guillemot de Troïl, de Pingouin Torda et d'altération des habitats du Phoque veau-marin, du Phoque gris, du Marsouin commun, du Grand dauphin, du Guillemot de Troïl et du Pingouin Torda et sursis à statuer pour permettre la régularisation de l'arrêté du 27 février 2019 du ministre de la transition écologique et solidaire sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, en suspendant l'exécution des autres décisions attaquées, avant de rejeter ensuite, par son arrêt du 27 avril 2021, leurs conclusions aux fins d'annulation de cet arrêté.
2. Les pourvois de l'association " Sans offshore à l'horizon " et autres présentent à juger des mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur l'arrêt avant-dire droit n° 19NT01714, 19NT02501, 19NT02520 du 6 octobre 2020 :
Sur la régularité de l'arrêt :
3. En vertu de l'article L. 5 du code de justice administrative, l'instruction des affaires est contradictoire. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les deux mémoires du 5 et 7 mai 2020 de la société pétitionnaire et de la ministre de la transition écologique ne contenaient aucun moyen ou conclusion nouveaux. Par suite le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel aurait entaché d'irrégularité la procédure et méconnu son caractère contradictoire en ne les communiquant pas aux requérants ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé de l'arrêt :
Sur l'autorisation délivrée par les préfets de la Somme et de la Seine-Maritime au titre de la police de l'eau, sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement :
5. D'une part, aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : (...) / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres :a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; b) De l'utilisation des ressources naturelles, en particulier (...) l'eau et la biodiversité (...) ; c)(...) du bruit, de la vibration, (...) de la création de nuisances (...) ; d) Des risques (...) pour l'environnement ; e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées. (...). ". Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
6. D'autre part, aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 334-5 du code de l'environnement : " Lorsqu'une activité est susceptible d'altérer de façon notable le milieu marin d'un parc naturel marin, l'autorisation à laquelle elle est soumise ne peut être délivrée que sur avis conforme de l'Agence française pour la biodiversité (...) ".
7. En premier lieu, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel a jugé qu'il n'était pas établi devant elle que le dossier d'étude d'impact était entaché d'insuffisances tenant aux modalités de représentation des aérogénérateurs, au choix du lieu et des moments des prises de vue des photographies versées au dossier, aux modalités d'évaluation des impacts du projet sur les activités de pêche professionnelle, et à l'appréciation de l'impact de la déstabilisation des falaises côtières. En répondant ainsi, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, aux différents arguments qui avaient été soulevés devant elle et qui visaient à établir l'insuffisance de l'étude d'impact, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit au regard des exigences de l'article R. 122-5 du code de l'environnement.
8. En deuxième lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a relevé que la seule circonstance que les réserves émises par l'Agence française pour la biodiversité (AFB), dans son avis favorable, n'avaient pas été levées et que ses prescriptions n'avaient pas toutes été suivies, alors que la société pétitionnaire avait actualisé son dossier, ne suffisait pas à établir que l'étude d'impact aurait été insuffisante, ni qu'une telle insuffisance aurait eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou aurait été de nature à exercer une influence sur la décision du préfet. En statuant ainsi pour écarter le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact produite par la société pétitionnaire, la cour administrative d'appel de Nantes, qui s'est livrée à une appréciation souveraine exempte de dénaturation, n'a pas commis d'erreur de droit.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 214-17 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " Le préfet saisit le préfet de région en application du 4° de l'article 8 du décret n° 2004-490 du 3 juin 2004 relatif aux procédures administratives et financières en matière d'archéologie préventive, lorsque la demande d'autorisation se rapporte à des ouvrages, travaux ou activités qui sont subordonnés à une étude d'impact en application des dispositions réglementaires du chapitre II du titre II du livre Ier ".
10. La cour, qui était saisie d'un moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du préfet de région en matière d'archéologie préventive, faute d'une nouvelle saisine du département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (DRASSM) en raison des modifications apportées au projet entre mai et septembre 2018, a relevé, pour écarter le moyen, qu'il n'était pas établi que ces modifications étaient telles qu'un nouvel avis du préfet de région en matière d'archéologie préventive, qui aurait été rendu après une nouvelle consultation du DRASSM, était nécessaire. En estimant que la consultation était régulière et ne méconnaissait pas l'article R. 214-17 du code de l'environnement, la cour a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine dénuée de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit.
11. En quatrième lieu, l'article R. 214-10 du code de l'environnement, applicable à la demande d'autorisation, prévoit que : " le dossier est également communiqué pour avis : 1° A la commission locale de l'eau, si l'opération pour laquelle l'autorisation est sollicitée est située dans le périmètre d'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux approuvé ou a des effets dans un tel périmètre ; 2° A la personne publique gestionnaire du domaine public s'il y a lieu ; 3° Au préfet coordonnateur de bassin lorsque les caractéristiques ou l'importance des effets prévisibles du projet rendent nécessaires une coordination et une planification de la ressource en eau ou de la prévention des inondations au niveau interrégional ; 4° Au préfet maritime si la demande d'autorisation porte sur une opération de dragage donnant lieu à immersion ; 5° Au directeur de l'établissement public du parc national si l'opération pour laquelle l'autorisation est sollicitée est située dans le périmètre d'un parc national ; 6° Au directeur général de chacune des agences régionales de santé concernées. L'avis est réputé favorable s'il n'intervient pas dans un délai de quarante-cinq jours à compter de la transmission du dossier ".
12. En estimant, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que les modifications apportées au projet litigieux ne nécessitaient pas de nouvelle consultation de la commission locale de l'eau du schéma d'aménagement et de gestion de l'eau " Somme aval et cours côtiers ", du préfet coordonnateur du bassin Seine-Normandie, de la commission locale de l'eau du schéma d'aménagement et de gestion de l'eau de la Bresle et du directeur de l'Agence régionale de santé Hauts-de-France, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit. Par ailleurs, pour écarter le moyen tiré de la nécessité d'un nouvel avis de l'Agence française pour la biodiversité suite aux modifications apportées au projet par la société pétitionnaire pour lever les réserves émises dans son avis favorable du 20 février 2018, la cour a relevé que la seule circonstance que le projet ait été modifié, en l'absence de précisions apportées par les requérants sur la teneur exacte des modifications susceptibles de justifier une nouvelle saisine, ne suffisait pas à établir qu'un nouvel avis de l'Agence française de la biodiversité aurait été nécessaire. Si les requérants soutiennent que le raisonnement de la cour est entaché d'erreur de droit sur ce point, ils n'assortissent pas leur moyen de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé.
13. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 214-8 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " L'opération pour laquelle l'autorisation est sollicitée est soumise à enquête publique dès que le dossier est complet et régulier. (...) Le conseil municipal de chaque commune où a été déposé un dossier d'enquête est appelé à donner son avis sur la demande d'autorisation dès l'ouverture de l'enquête. Ne peuvent être pris en considération que les avis exprimés, au plus tard, dans les quinze jours suivant la clôture du registre d'enquête. (...) ".
14. La cour a relevé que le dossier d'enquête publique, accompagné de l'arrêté préfectoral portant ouverture de l'enquête publique qui précisait, à son article 8, que " les conseils municipaux des communes concernées sont appelés à donner leur avis sur la demande d'autorisation requise au titre des dispositions de la loi sur l'eau " avait été communiqué aux communes concernées, et a estimé que cet envoi permettait de considérer que les communes concernées avaient été appelées à donner leur avis, alors même que seules cinq communes sur les vingt-six concernées auraient délibéré sur le projet de parc éolien en mer dans le cadre de l'enquête publique. Si les requérants soutiennent, d'une part, que la communication du dossier d'enquête publique aux communes concernées ne saurait satisfaire à l'obligation de saisine de ces communes pour avis, au titre de l'article R. 214-8 du code de l'environnement, il ne résulte ni des dispositions de cet article, ni d'aucune autre disposition, qu'une saisine des communes concernées, qui se distinguerait de la communication du dossier d'enquête publique, serait nécessaire. La cour n'a donc pas entaché son arrêt d'erreur de droit sur ce point. D'autre part, en estimant que la faible proportion de communes ayant délibéré n'entachait pas la régularité de l'enquête publique, la cour n'a pas non plus entaché son arrêt d'erreur de droit ni entaché son appréciation souveraine sur la régularité de la procédure de dénaturation.
15. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 214-11 du code de l'environnement alors en vigueur : " Au vu du dossier de l'enquête et des avis émis, le préfet fait établir un rapport sur la demande d'autorisation et sur les résultats de l'enquête. Ce rapport est présenté au conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques avec les propositions concernant soit le refus de la demande, soit les prescriptions envisagées. / Le pétitionnaire a la faculté de se faire entendre par ce conseil ou de désigner à cet effet un mandataire. Il est informé, par le préfet, au moins huit jours à l'avance, de la date et du lieu de la réunion du conseil et reçoit simultanément un exemplaire des propositions mentionnées à l'alinéa précédent. ".
16. La cour a relevé que le conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) avait émis un avis favorable au projet de parc éolien à l'issue de sa séance du 14 février 2019. C'est sans erreur de droit que la cour a jugé qu'était sans incidence sur la régularité de la procédure suivie l'absence de mention, dans le procès-verbal de la séance, de la sortie, avant le vote, des représentants de la société.
17. En septième lieu, aux termes de l'article R. 334-33 du code de l'environnement : " Le conseil de gestion du parc naturel marin exerce notamment les attributions suivantes : (...) 6° Il se prononce sur les demandes d'autorisations d'activités mentionnées au quatrième alinéa de l'article L. 334-5, dans les conditions fixées par cet alinéa, à l'exclusion de celles concernant des projets relevant du I de l'article L. 121-8 ou de l'article L. 121-8-1 ". Aux termes de l'article L. 121-8-1 du même code : " Lorsque le ministre chargé de l'énergie souhaite lancer une procédure de mise en concurrence en application de l'article L. 311-10 du code de l'énergie pour la construction et l'exploitation d'installations de production d'énergie renouvelable en mer et de leurs ouvrages de raccordement aux réseaux publics d'électricité, il saisit, préalablement au lancement de cette procédure, la Commission nationale du débat public, qui détermine, dans les conditions prévues à la présente section, les modalités de participation du public au processus de décision du lancement de la procédure de mise en concurrence. Le public est notamment consulté sur le choix de la localisation de la ou des zones potentielles d'implantation des installations envisagées (...) ".
18. Dès lors que le projet relevait du champ d'application de l'article L. 121-8-1 du code de l'environnement, le conseil de gestion du parc naturel marin ne pouvait, aux termes de l'article R. 334-33 du code de l'environnement cité au point précédent, se prononcer sur les demandes d'autorisations. Dès lors, c'est sans erreur de droit que la cour a écarté le moyen tiré de ce que l'avis conforme favorable émis par le conseil d'administration de l'AFB aurait été pris par une autorité incompétente dans la mesure où l'AFB avait délégué, par délibération du 21 février 2017, sa compétence au conseil de gestion du parc naturel marin des estuaires picards et de la mer d'Opale.
19. Enfin, en huitième lieu, aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. (...) ". Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement : " I.- Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer :1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ; 2° La protection des eaux et la lutte contre toute pollution par déversements, écoulements, rejets, dépôts directs ou indirects de matières de toute nature et plus généralement par tout fait susceptible de provoquer ou d'accroître la dégradation des eaux en modifiant leurs caractéristiques physiques, chimiques, biologiques ou bactériologiques, qu'il s'agisse des eaux superficielles, souterraines ou des eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales ; (...) ". Aux termes de l'article L. 214-3 du même code : " I.- Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles. (...) ".
20. D'une part, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, en se fondant notamment, pour écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant l'autorisation délivrée par les préfets de la Somme et de la Seine-Maritime au titre de la police de l'eau, sur des éléments produits par la société pétitionnaire, la cour n'a pas commis d'erreur de droit. D'autre part, la cour a relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, qu'un certain nombre d'éléments, dont les mesures de réduction et de suivi telles que la réduction du bruit du battage des pieux dans la colonne d'eau et dans la colonne d'air et les suivis acoustiques des niveaux de bruits sous-marins avant et pendant la construction, pendant l'exploitation et durant le démantèlement et les engagements pris par la société pétitionnaire dans l'étude d'impact du projet, tenant notamment à ce que ni les opérations de construction du parc, ni la présence du parc éolien n'auront d'effets s'agissant des sédiments sur la baie de Somme, permettent de démontrer le respect des conditions d'une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau définies par l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Par suite la cour a pu, sans entacher son arrêt d'erreur de droit, écarter le moyen tiré de la méconnaissance de cet article.
Sur l'autorisation délivrée par le ministre de la transition écologique et solidaire au titre de l'article L. 311-5 du code de l'énergie :
21. En premier lieu, aux termes de l'article L. 311-5 du code de l'énergie : " L'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité est délivrée par l'autorité administrative en tenant compte des critères suivants : 1° L'impact de l'installation sur l'équilibre entre l'offre et la demande et sur la sécurité d'approvisionnement, évalués au regard de l'objectif fixé à l'article L. 100-1 ; 2° La nature et l'origine des sources d'énergie primaire au regard des objectifs mentionnés aux articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 ; 3° L'efficacité énergétique de l'installation, comparée aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable; 4° Les capacités techniques, économiques et financières du candidat ou du demandeur ; 5° L'impact de l'installation sur les objectifs de lutte contre l'aggravation de l'effet de serre. L'autorisation d'exploiter doit être compatible avec la programmation pluriannuelle de l'énergie. ". Aux termes de l'article L. 100-1 du code de l'énergie : " La politique énergétique :(...) 3° Maintient un prix de l'énergie compétitif et attractif au plan international et permet de maîtriser les dépenses en énergie des consommateurs ; 4° Préserve la santé humaine et l'environnement, en particulier en luttant contre l'aggravation de l'effet de serre et contre les risques industriels majeurs, en réduisant l'exposition des citoyens à la pollution de l'air et en garantissant la sûreté nucléaire ". Aux termes de l'article L. 100-2 du code de l'énergie : " Pour atteindre les objectifs définis à l'article L. 100-1, l'Etat, en cohérence avec les collectivités territoriales et leurs groupements et en mobilisant les entreprises, les associations et les citoyens, veille, en particulier, à : (...) 3° Diversifier les sources d'approvisionnement énergétique, réduire le recours aux énergies fossiles, diversifier de manière équilibrée les sources de production d'énergie et augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale ; (...) 5° Participer à la structuration des filières industrielles de la croissance verte ; 6° Assurer l'information de tous et la transparence, notamment sur les coûts et les prix des énergies ainsi que sur l'ensemble de leurs impacts sanitaires, sociaux et environnementaux ; (...) 9° Assurer des moyens de transport et de stockage de l'énergie adaptés aux besoins. ". L'article L. 100-4 du code de l'énergie fixe notamment des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de réduction de la consommation énergétique finale et primaire des énergies fossiles et d'augmentation de la part des énergies renouvelables.
22. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 311-5 du code de l'énergie, la cour a relevé que les conclusions du rapport du 19 avril 2017 de l'Académie des sciences citées par les requérants, si elles font état de l'intermittence de l'énergie éolienne, y compris en mer, ne démontraient pas, contrairement à ce qu'ils soutiennent, que le développement de l'énergie éolienne en mer entraînerait pour cette raison l'augmentation de la demande d'énergie fossile. En statuant ainsi, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.
23. Par ailleurs, pour écarter le moyen tiré de l'absence de prise en compte du deuxième critère fixé par l'article L. 311-5 du code de l'énergie, et notamment de la méconnaissance du 3° de l'article L. 100-1 du même code en ce que le prix moyen d'achat de l'électricité fixé pour les parcs éoliens en mer français ne serait pas suffisamment compétitif, la cour a relevé que l'offre déposée par la société EMDT dans le cadre de l'appel d'offres du 16 mars 2013 a fait l'objet d'une renégociation entraînant une réduction de 40 % de la subvention publique et une baisse du prix d'achat de 30 %, permettant ainsi une correction des prix élevés constatés résultant des spécificités du site. Elle a aussi relevé que la seule circonstance que le prix d'achat de l'électricité était nettement inférieur pour le projet de parc éolien situé au large de Dunkerque, ne démontrait pas que l'objectif fixé au 3° de l'article L. 100-1, qui doit être concilié avec les autres objectifs prévus au même article, aurait été méconnu en l'espèce. En statuant ainsi, la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit.
24. La cour, en jugeant que, contrairement à ce qui était soutenu par les requérants, les dispositions du 5° de l'article L. 100-2 du code de l'énergie n'imposaient pas que le projet contribue à la constitution d'une filière industrielle " française " pour ce type d'énergie, n'a pas commis d'erreur de droit.
25. Enfin, il résulte des dispositions du 3° de l'article L. 311- 5 du code de l'environnement que l'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité prend notamment en compte le critère de l'efficacité énergétique de l'installation, comparée aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. En relevant que ces dispositions n'imposaient pas au ministre de la transition écologique et solidaire d'envisager des solutions alternatives à l'éolien en mer, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.
26. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 219-1 du code de l'environnement : " La stratégie nationale pour la mer et le littoral est définie dans un document qui constitue le cadre de référence pour la protection du milieu, pour la réalisation ou le maintien du bon état écologique, mentionné au I de l'article L. 219-9, pour l'utilisation durable des ressources marines et pour la gestion intégrée et concertée des activités liées à la mer et au littoral, à l'exception de celles qui ont pour unique objet la défense ou la sécurité nationale. Ce document en fixe les principes et les orientations générales qui concernent, tant en métropole qu'outre-mer, les espaces maritimes sous souveraineté ou sous juridiction nationale, les fonds marins et le sous-sol de la mer. Il fixe également les principes et les orientations générales concernant les activités situées sur le territoire des régions administratives côtières ou sur celui des collectivités d'outre-mer et ayant un impact sur ces espaces. Ce document est mis en œuvre dans les façades maritimes métropolitaines et dans les bassins maritimes ultramarins (...) ". L'article L. 219-4 du même code indique, à cet égard, les éléments devant nécessairement être compatibles avec cette stratégie : " I.- Doivent être compatibles, ou rendus compatibles avec les objectifs et dispositions du document stratégique de façade ou de bassin maritime : 1° Les plans, les programmes et les schémas relatifs aux activités exclusivement localisées dans les espaces mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 219-1 ; 2° Dans ces mêmes espaces, les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements, publics et privés, soumis à l'étude d'impact mentionnée à l'article L. 122-1 du présent code et les décisions mentionnées aux articles L. 122 1 et L. 132-2 du code minier lorsqu'elles concernent des substances minérales autres que celles énumérées à l'article L. 111-1 du même code (...) ". Aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement : " I.- Pour l'application de la présente section, on entend par : 1° Projet : la réalisation de travaux de construction, d'installations ou d'ouvrages, ou d'autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, y compris celles destinées à l'exploitation des ressources du sol ; 2° Maître d'ouvrage : l'auteur d'une demande d'autorisation concernant un projet privé ou l'autorité publique qui prend l'initiative d'un projet ; 3° Autorisation : la décision de l'autorité ou des autorités compétentes qui ouvre le droit au maître d'ouvrage de réaliser le projet ; 4°L'autorité compétente : la ou les autorités compétentes pour délivrer l'autorisation du projet. II. - Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas. (...) ". Aux termes de l'article L. 219-7 du code de l'environnement : " Le milieu marin fait partie du patrimoine commun de la Nation. Sa protection, la conservation de sa biodiversité et son utilisation durable par les activités maritimes et littorales dans le respect des habitats et des écosystèmes marins sont d'intérêt général. (...) ". Aux termes de l'article L. 219-9 de ce code : " I- L'autorité administrative prend toutes les mesures nécessaires pour réaliser ou maintenir un bon état écologique du milieu marin au plus tard en 2020. Pour chaque région marine ou sous-région marine délimitée en application du II du présent article, l'autorité administrative élabore et met en œuvre, après mise à disposition du public, un plan d'action pour le milieu marin (...) ". Aux termes de l'article L. 219-12 du même code : " L'autorité administrative peut identifier les cas dans lesquels elle ne peut atteindre, au moyen des mesures qu'elle a prises, les objectifs environnementaux ou le bon état écologique des eaux marines sous tous les aspects (...) / L'autorité administrative indique ces cas dans le programme de mesures et les justifie ". Enfin, aux termes de l'article 46 du règlement n° 850/98 du Conseil du 30 mars 1998 visant à la conservation des ressources de pêche par le biais de mesures techniques de protection des juvéniles d'organismes marins : " 1. Les États membres sont habilités à prendre des mesures pour la conservation et la gestion des stocks en ce qui concerne: a) des stocks strictement locaux ne présentant un intérêt que pour l'État membre concerné ou b) des conditions ou des modalités visant à limiter les prises par des mesures techniques: i) complétant celles qui sont définies dans la réglementation communautaire concernant la pêche ou ii) allant au-delà des exigences minimales définies dans ladite réglementation, à condition que ces mesures soient applicables uniquement aux bateaux de pêche battant pavillon de l'État membre concerné et immatriculés dans la Communauté ou, en cas d'activités de pêche qui ne sont pas effectuées par un bateau de pêche, à des personnes établies dans l'État membre concerné. La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, de tout projet portant sur l'introduction ou la modification de mesures techniques nationales. (...) ".
27. Dès lors que l'arrêté du ministre de la transition écologique et solidaire du 12 octobre 2018, délivré sur le fondement de l'article R. 311-10 du code de l'énergie, n'autorise pas, par lui-même, la réalisation des ouvrages destinés à la production d'énergie éolienne et ne dispense pas le projet d'obtenir les autres autorisations indispensables à la réalisation des travaux et à la mise en service de l'installation, notamment celles requises par le code de l'environnement, la cour administrative d'appel de Nantes a pu à bon droit écarter les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 219-7 et suivants du code de l'environnement, transposant la directive du 23 juillet 2014, de l'article 46 du règlement n° 850/98 et de l'article L. 219-1 du code de l'environnement.
Sur l'autorisation délivrée par le ministre de la transition écologique et solidaire et par les préfets de la Somme et de la Seine-Maritime au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement :
28. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 19 février 2007 fixant les conditions de demande et d'instruction des dérogations définies au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement portant sur des espèces de faune et de flore sauvages protégées, dans sa rédaction applicable à la date des arrêtés attaqués : " I. - La décision est prise après avis du conseil national de la protection de la nature dans les cas suivants : 1° Demandes de dérogation constituées en vue de la réalisation de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements soumis, en application des articles R. 122-2 et R. 122-3 du code l'environnement, à étude d'impact ou, en application des articles L. 181-1 et L. 181-2 du même code, à autorisation environnementale ; (...) ".
29. L'organisme dont une disposition législative ou réglementaire prévoit la consultation avant l'intervention d'un texte doit être mis à même d'exprimer son avis sur l'ensemble des questions soulevées par ce texte. Par suite, dans le cas où, après avoir recueilli son avis, l'autorité compétente pour prendre le texte envisage d'apporter à son projet des modifications, elle ne doit procéder à une nouvelle consultation de cet organisme que si ces modifications posent des questions nouvelles.
30. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour écarter le moyen tiré de ce que le Conseil national de protection de la nature aurait dû à nouveau être consulté, la cour administrative d'appel de Nantes a retenu, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que les ajouts au dossier de demande de dérogation de trois tableaux relatifs aux effets induits pour les mammifères marins par les travaux de battages des pieux et d'une étude de faisabilité ne pouvaient être regardés comme des modifications posant des questions nouvelles. En statuant ainsi, elle n'a pas commis d'erreur de droit.
31. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 123-19-2 du code de l'environnement : " I. - Sous réserve des dispositions de l'article L. 123-19-6, le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement est applicable aux décisions individuelles des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement qui n'appartiennent pas à une catégorie de décisions pour lesquelles des dispositions législatives particulières ont prévu les cas et conditions dans lesquels elles doivent, le cas échéant en fonction de seuils et critères, être soumises à participation du public. (...) II. - Le projet d'une décision mentionnée au I ou, lorsque la décision est prise sur demande, le dossier de demande est mis à disposition du public par voie électronique. Lorsque le volume ou les caractéristiques du projet de décision ou du dossier de demande ne permettent pas sa mise à disposition par voie électronique, le public est informé, par voie électronique, de l'objet de la procédure de participation et des lieux et horaires où l'intégralité du projet ou du dossier de demande peut être consultée. / Au plus tard à la date de la mise à disposition ou de l'information prévue à l'alinéa précédent, le public est informé, par voie électronique, des modalités de la procédure de participation retenues. / Les observations et propositions du public, déposées par voie électronique, doivent parvenir à l'autorité publique concernée dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours à compter de la mise à disposition. / Le projet de décision ne peut être définitivement adopté avant l'expiration d'un délai permettant la prise en considération des observations et propositions déposées par le public. Sauf en cas d'absence d'observations et propositions, ce délai ne peut être inférieur à trois jours à compter de la date de clôture de la consultation. (...) ".
32. Pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, la cour administrative d'appel de Nantes a relevé, sans dénaturer les faits et les pièces du dossier, qu'une consultation publique a eu lieu du 21 janvier au 4 février 2019, soit pendant un délai conforme au délai minimum fixé par ces dernières, et que l'ensemble des éléments du projet était consultable sur un site internet, et en version papier à la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) à Rouen. C'est sans erreur de droit ni dénaturation que la cour administrative d'appel de Nantes a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 123-19-2 du code de l'environnement.
33. En troisième lieu, l'article L. 411-1 du code de l'environnement prévoit, lorsque les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation d'espèces animales non domestiques, l'interdiction de " 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat / 2° La destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette ou l'enlèvement de végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou de toute autre forme prise par ces espèces au cours de leur cycle biologique, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat, la détention de spécimens prélevés dans le milieu naturel ; / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Le I de l'article L. 411-2 du même code renvoie à un décret en Conseil d'Etat la détermination des conditions dans lesquelles sont fixées, notamment : " 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; (...) ".
34. Il résulte de ces dispositions que la destruction ou la perturbation des espèces animales concernées, ainsi que la destruction ou la dégradation de leurs habitats, sont interdites. Toutefois, l'autorité administrative peut déroger à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant d'une part, à l'absence de solution alternative satisfaisante, d'autre part, à la condition de ne pas nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des cinq motifs limitativement énumérés et parmi lesquels figure le fait que le projet réponde, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur.
35. Pour apprécier si le projet litigieux répond à une raison impérative d'intérêt public majeur au sens des dispositions précédemment citées du code de l'environnement, la cour administrative d'appel a rappelé que le paquet " énergie-climat " adopté par l'Union européenne en décembre 2008 s'est traduit pour la France par l'adoption de l'objectif, fixé par la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement puis par l'article L. 100-4 du code de l'énergie, visant à porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation finale brute d'énergie en 2020, et a rappelé les engagements nationaux, européens et internationaux résultant du Grenelle de l'environnement de 2007, de la COP21 ainsi que l'accord de Paris du 12 décembre 2015. Elle a ensuite relevé que le projet litigieux permettra de couvrir environ 8 % de la consommation électrique de la région Normandie et 4 % de la région Hauts-de-France, contribuant ainsi de manière déterminante à l'atteinte des objectifs internationaux, européens et nationaux rappelés. En jugeant que ce projet de parc éolien répondait ainsi, nonobstant son caractère privé, à une raison impérative d'intérêt public majeur, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, a exactement qualifié les faits de l'espèce.
36. Pour juger, ensuite, qu'il n'existait pas d'autre solution satisfaisante, la cour a relevé, en se référant aux pages 151 et suivantes du dossier de demande de la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport, d'une part, que l'emplacement du projet litigieux avait été choisi sur le fondement d'études visant à en diminuer l'impact et, d'autre part, que le pétitionnaire avait examiné et justifié l'absence d'autre solution satisfaisante s'agissant du choix de l'éolienne, des fondations, notamment vis-à-vis du niveau sonore, de la tension du câble, et de l'implantation. En retenant, au vu de ces éléments, que le préfet n'avait pas commis d'erreur d'appréciation en estimant qu'il n'existait pas d'autre solution satisfaisante, la cour administrative d'appel s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce, exempte de dénaturation.
37. Enfin, pour juger qu'était satisfaite la condition tenant à ce que le parc éolien litigieux ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, la cour a relevé que le dossier de demande de dérogation concluait que les mesures d'évitement et de réduction, dont l'efficacité doit être garantie par un suivi spécifique, permettaient d'assurer le maintien dans un état de conservation favorable des espèces faisant l'objet de la demande, dont le goéland marin. Elle a également relevé que la société pétitionnaire avait prévu de rehausser de 15 mètres la hauteur des machines, afin de réduire la mortalité de l'avifaune par collision et, enfin, que des mesures de réduction et de suivi avaient été prévues, comme la réduction du diamètre des pieux et du bruit de leur battage dans la colonne d'eau et dans la colonne d'air, le démarrage progressif des opérations, la mise en place de rideaux de bulles ou de systèmes de confinement et une mesure de suivi acoustique des niveaux de bruits sous-marins avant et pendant la construction, pendant l'exploitation et durant le démantèlement, ainsi que des mesures destinées à évaluer l'efficacité des mesures de réduction prévues. La cour a ainsi estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que l'ensemble des mesures prévues étaient suffisantes pour garantir le maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, sans entacher son arrêt d'insuffisance de motivation ou d'erreur de droit.
En ce qui concerne l'application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :
38. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " I.- Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. (...) ".
39. Les dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 permettent au juge, lorsqu'il constate un vice qui entache la légalité de la décision mais qui peut être régularisé par une décision modificative, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation. Ces dispositions peuvent trouver à s'appliquer, que le vice constaté entache d'illégalité l'ensemble de l'autorisation environnementale, y compris s'agissant d'un vice d'incompétence, ou une partie divisible de celle-ci.
40. Lorsque les juges du fond, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, ont cependant retenu l'existence d'un ou de plusieurs vices entachant la légalité d'une autorisation environnementale dont l'annulation leur était demandée et ont alors décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'ils tiennent de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour inviter l'administration à régulariser ce ou ces vices, l'auteur du recours formé contre le jugement ou l'arrêt avant dire droit peut contester ce jugement ou cet arrêt en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'autorisation environnementale initiale et également en tant qu'il a fait application des dispositions de l'article L. 181-18. Toutefois, à compter de la délivrance de l'autorisation modificative en vue de régulariser le ou les vices relevés, les conclusions dirigées contre le jugement ou l'arrêt avant dire droit, en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sont privées d'objet.
41. Dès lors qu'un arrêté modificatif, qui s'est substitué aux arrêtés litigieux, a été délivré le 29 décembre 2020 pour la régularisation des vices relevés dans l'arrêt avant dire droit attaqué, il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi des associations requérantes dirigées contre l'arrêt avant dire droit en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.
42. Il résulte de tout ce qui précède que l'association " Sans Offshore à l'Horizon " et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.
Sur l'arrêt du 27 avril 2021 :
43. Si les requérants demandent l'annulation de l'arrêt du 27 avril 2021 par voie de conséquence de celle de l'arrêt du 6 octobre 2020, il résulte de ce qui a été dit au point 42 que ce moyen ne peut qu'être écarté.
Sur les frais des litiges :
44. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association " Sans offshore à l'horizon " et autres la somme de 3 000 euros à verser à la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat et de la société Eoliennes en Mer de Dieppe-Le Tréport qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Les pourvois de l'association " Sans offshore à l'horizon " et autres sont rejetés.
Article 2 : L'association " Sans offshore à l'horizon " et autres verseront à la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association " Sans offshore à l'horizon ", première requérante dénommée, à la société Eoliennes en mer de Dieppe-Le Tréport et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 décembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, conseillers d'Etat et Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 28 décembre 2022.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
La rapporteure :
Signé : Mme Rozen Noguellou
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Adeline Allain