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22/12/2022 | FRANCE | N°450762

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 22 décembre 2022, 450762


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 17 juin 2014 par lequel le préfet de la Haute-Corse a autorisé la création de l'association foncière pastorale autorisée de Carpineto ainsi que la décision du 15 octobre 2014 rejetant son recours gracieux tendant au retrait de cette décision. Par un jugement n° 1401128 du 25 août 2016, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision du 15 octobre 2014 et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 16MA03995 du 12 avril 2019, l

a cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. B......

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 17 juin 2014 par lequel le préfet de la Haute-Corse a autorisé la création de l'association foncière pastorale autorisée de Carpineto ainsi que la décision du 15 octobre 2014 rejetant son recours gracieux tendant au retrait de cette décision. Par un jugement n° 1401128 du 25 août 2016, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision du 15 octobre 2014 et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 16MA03995 du 12 avril 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement et l'appel incident formé par la commune de Carpineto.

Par une décision n° 431975 du 29 juillet 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé cet arrêt et a renvoyé le jugement de l'affaire à la même cour qui, par un arrêt n° 20MA02949 du 18 janvier 2021 a rejeté l'appel de M. B....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mars et 17 juin 2021 au secrétariat de la section du contentieux, M. B... demande au Conseil d'Etat:

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ;

- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Jau, auditeur,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. A... B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... B... est propriétaire de deux parcelles de terrain situées sur le territoire de la commune de Carpineto (Haute-Corse). Par arrêté du 17 juin 2014, le préfet de la Haute-Corse a autorisé la création de l'association foncière pastorale autorisée de Carpineto, ayant pour objet une exploitation rationalisée de l'espace rural et boisé du terroir communal et incluant ces parcelles dans son périmètre. Par décision du 15 octobre 2014, le même préfet a rejeté le recours gracieux de M. B... tendant au retrait de cet arrêté. Par un jugement du 25 août 2016, le tribunal administratif de Bastia a, sur la demande de M. B..., annulé la décision du 15 octobre 2014 et rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2014. Par un arrêt du 12 avril 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement ainsi que l'appel incident de la commune de Carpineto tendant à sa réformation en tant qu'il avait annulé la décision du 15 octobre 2014. Par une décision du 29 juillet 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et a renvoyé le jugement de l'affaire à la même cour qui, par un arrêt du 18 janvier 2021, a rejeté l'appel de M. B....

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

2. D'une part, il résulte d'une règle générale de procédure que lorsque la représentation est obligatoire, la révocation d'un avocat par sa partie ou la décision d'un avocat de mettre fin à son mandat est sans effet sur le déroulement de la procédure juridictionnelle et ne met un terme aux obligations professionnelles incombant à cet avocat que lorsqu'un autre avocat s'est constitué pour le remplacer, le cas échéant après qu'une invitation à cette fin a été adressée à la partie concernée par la juridiction.

3. D'autre part, le juge, auquel il incombe de veiller à la bonne administration de la justice, n'a aucune obligation, hormis le cas où des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire l'imposeraient, de faire droit à une demande de report de l'audience formulée par une partie. Il n'a pas davantage à motiver le refus qu'il oppose à une telle demande.

4. Si le requérant a demandé à la cour administrative d'appel de Marseille, par un courriel adressé au greffe de la cour le 3 janvier 2021, de reporter l'audience fixée au 4 janvier, au motif qu'il n'avait été informé de cette date que tardivement par son avocat, Me Susini, qualifié d'" ancien conseil ", et ne disposait donc pas du temps suffisant pour produire de nouveaux éléments, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 que la cour était tenue de communiquer les éléments de procédure à Me Susini dès lors qu'aucun autre avocat ne s'était constitué pour le remplacer. Ces circonstances, qui ne constituent pas un motif exceptionnel tiré des exigences du débat contradictoire, n'imposaient pas à la cour administrative d'appel de faire droit à la demande de report de l'audience. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait entaché son arrêt d'un vice de procédure et méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure et le droit à un recours effectif ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

5. En premier lieu, l'article 12 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires prévoit que " lorsqu'en raison de leur nature, de leur consistance ou de leur localisation, les ouvrages ou les travaux envisagés sont susceptibles d'affecter l'environnement, ou lorsque les missions de l'association concernent des installations, ouvrages, travaux ou activités prévus à l'article L. 214-1 du code de l'environnement ", l'autorité administrative soumet le projet de statuts de l'association syndicale autorisée à une enquête publique réalisée conformément aux dispositions du chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement et non à celles du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d'une part, que l'association foncière pastorale de Carpineto tend, dans la perspective d'un développement local durable, à une exploitation équilibrée de l'espace rural entre sa destination pastorale, par la gestion des déplacements des animaux, et sa vocation agricole, notamment par la réhabilitation et l'équipement, en vue de sa préservation, du patrimoine arboré de la zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique de type II " Châtaigneraie de la petite Castagniccia " dans laquelle est inclus le territoire de la commune de Carpineto. D'autre part, il ressort notamment du rapport établi en mars 2011 par un expert forestier que l'environnement local est historiquement marqué par une telle exploitation équilibrée des surfaces, que l'association foncière pastorale, comme l'a relevé la cour, ne remet pas en cause. Dès lors, en jugeant qu'aucun des ouvrages ou travaux envisagés à cette fin n'était susceptible, par sa nature, sa consistance ou sa localisation, d'affecter l'environnement, la cour n'a ni insuffisamment motivé son arrêt ni commis d'erreur de droit.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les projets de statuts de l'association foncière pastorale de Carpineto font référence à l'ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires, dont l'article 34 prévoit que " Le recouvrement des créances de l'association syndicale s'effectue comme en matière de contributions directes ", ainsi qu'à son décret d'application du 3 mai 2006 précisant ces dispositions. Dès lors, le moyen tiré de ce que la cour aurait dénaturé les pièces du dossier et commis une erreur de droit, en écartant comme manquant en fait le moyen tiré de ce que l'arrêté du 17 juin 2004 était illégal, faute pour les statuts de préciser le mode de recouvrement des cotisations, doit être écarté.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ".

9. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, si les projets de statuts de l'association lui permettent de donner en location les terres comprises dans son périmètre, elle n'a ni pour objet ni pour effet de priver les propriétaires de ces terres de la substance de leur droit de propriété mais simplement d'en réglementer l'usage. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Marseille aurait insuffisamment motivé son arrêt et commis une erreur de droit en ne recherchant pas si étaient remplies l'ensemble des conditions permettant une privation de propriété, au sens du premier alinéa de l'article 1er du protocole additionnel précité.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 font par suite obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Délibéré à l'issue de la séance du 29 novembre 2022 où siégeaient : M. Guillaume Goulard, président de chambre, présidant ; M. Christian Fournier, conseiller d'Etat et M. Nicolas Jau, auditeur-rapporteur.

Rendu le 22 décembre 2022.

Le président :

Signé : M. Guillaume Goulard

Le rapporteur :

Signé : M. Nicolas Jau

La secrétaire :

Signé : Mme Elisabeth Ravanne


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 450762
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 déc. 2022, n° 450762
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Nicolas Jau
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:450762.20221222
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