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22/12/2022 | FRANCE | N°448005

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 22 décembre 2022, 448005


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 24 mars 2016 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental et métropolitain d'incendie et de secours (SDMIS) du Rhône l'a radié des cadres pour abandon de poste, de condamner le SDMIS du Rhône à lui verser la somme de 87 200 euros avec intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cette décision, de le réintégrer dans les effectifs, dès la notification du jugement, et de reconstituer sa

carrière dans le délai de huit jours à compter de la notification du ju...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 24 mars 2016 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental et métropolitain d'incendie et de secours (SDMIS) du Rhône l'a radié des cadres pour abandon de poste, de condamner le SDMIS du Rhône à lui verser la somme de 87 200 euros avec intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cette décision, de le réintégrer dans les effectifs, dès la notification du jugement, et de reconstituer sa carrière dans le délai de huit jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1604427 du 11 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 19LY00141 du 20 octobre 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de M. A..., annulé ce jugement et la décision du 24 mars 2016 par laquelle le président du conseil d'administration du SDMIS du Rhône l'a radié des cadres, enjoint au président du conseil d'administration du SDMIS du Rhône de le réintégrer dans ses fonctions et de procéder à la reconstitution de sa carrière, condamné le SDMIS à lui verser une indemnité de 4 000 euros et rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 décembre 2020 et 22 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le service départemental et métropolitain d'incendie et de secours du Rhône demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A..., la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Jau, auditeur,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat du service départemental et métropolitain d'incendie et de secours et à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. B... A... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 décembre 2022, présentée par M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juges du fond que M. B... A..., attaché territorial au sein du SDMIS du Rhône, a été placé en congé de maladie à plein traitement du 6 janvier 2010 au 31 août 2013 en raison d'un état anxio-dépressif reconnu comme un accident imputable au service par un arrêté du 1er août 2013. La commission de réforme, dans sa séance du 9 septembre 2014, saisie à la suite d'une demande de retraite pour invalidité imputable au service présentée par M. A..., a conclu, d'une part, à l'inaptitude " définitive et absolue " de M. A... à toutes fonctions et à l'impossibilité d'envisager un reclassement et, d'autre part, à l'absence d'imputabilité au service de l'inaptitude. Le 28 février 2015, M. A... a retiré sa demande de retraite pour invalidité. M. A... a ensuite refusé de se rendre à deux contre-visites médicales organisées par son employeur les 15 juillet et 26 août 2015 et a exigé que la troisième contre-visite, le 9 février 2016, se déroule en présence d'un huissier et d'une personne qui l'accompagnait, faisant ainsi obstacle, eu regard à la protection du secret médical, à sa réalisation. Par un courrier du 24 février 2016, le SDMIS du Rhône a mis en demeure M. A... de reprendre son poste au plus tard le 14 mars 2016 en lui indiquant qu'à défaut il pourrait faire l'objet d'une procédure de radiation des cadres pour abandon de poste. M. A... s'est présenté au SDMIS du Rhône, le 11 mars 2016, assisté de trois représentants syndicaux et en est reparti sans avoir repris ses fonctions. Le président du conseil d'administration du SDMIS du Rhône, par une décision du 24 mars 2016, a radié M. A... des cadres pour abandon de poste. Le SDMIS du Rhône se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 octobre 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de M. A..., annulé le jugement du 11 juillet 2018 du tribunal administratif de Lyon ayant rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 24 mars 2016, annulé cette décision et condamné le SDMIS du Rhône à verser 4 000 euros à M. A... en réparation du préjudice qu'il a subi.

2. La cour administrative d'appel de Lyon a relevé que M. A... s'était soustrait sans justification à trois contre-visites mais a jugé que le fait qu'il se soit rendu sur son lieu de travail le vendredi 11 mars 2016 manifestait une réelle intention, de sa part, de reprendre son service et qu'il devait être regardé comme ayant repris son service à l'échéance fixée par sa hiérarchie et s'étant conformé à la mise en demeure qui lui a été adressée.

3. Toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si M. A..., mis en demeure de reprendre son service, s'est rendu le vendredi 11 mars 2016 au SDMIS accompagné par trois représentants syndicaux, il n'a, à cette occasion, exprimé aucune intention de reprendre son service et n'a d'ailleurs repris son activité au SDMIS ni le jour même, ni les jours suivants. S'il a fait parvenir par la suite au SDMIS un certificat médical daté du 11 mars 2016 mentionnant une contre-indication à la reprise du travail, celui-ci n'a été produit qu'après le délai fixé par la mise en demeure et n'apporte aucune précision sur son état de santé par rapport aux certificats médicaux antérieurement produits, alors que M. A... s'est soustrait sans justification à toutes les contre-visites médicales organisées par son employeur, permettant de justifier son abstention. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, l'autorité compétente était en droit d'estimer que le lien avec le service avait été rompu du fait de l'intéressé. Par suite, en jugeant que l'abandon de poste de M. A... n'était pas constitué, la cour administrative d'appel a inexactement qualifié les faits de l'espèce.

4. Il résulte de ce qui précède que le SDMIS du Rhône est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, par la SCP G. Thouvenin, O. Coudray, et M. Grévy, avocat de M. A..., le SDMIS du Rhône n'étant pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 20 octobre 2020 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : Les conclusions présentées par le SDMIS du Rhône au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. A... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à au service départemental et métropolitain d'incendie et de secours du Rhône et à M. B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 29 novembre 2022 où siégeaient : M. Guillaume Goulard, président de chambre, présidant ; M. Christian Fournier, conseiller d'Etat et M. Nicolas Jau, auditeur-rapporteur.

Rendu le 22 décembre 2022.

Le président :

Signé : M. Guillaume Goulard

Le rapporteur :

Signé : M. Nicolas Jau

La secrétaire :

Signé : Mme Elisabeth Ravanne


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 448005
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 déc. 2022, n° 448005
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Nicolas Jau
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT ; SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:448005.20221222
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