Vu la procédure suivante :
L'association En toute franchise département des Alpes-Maritimes a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande tendant à la mise en œuvre des pouvoirs prévus à l'article L. 752-23 du code de commerce concernant le centre commercial " Nice One ", et, d'autre part, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes d'exercer ces pouvoirs afin de mettre fin à l'exploitation illicite de surface commerciale sur le site de ce centre commercial. Par un jugement n° 1605166 du 12 décembre 2018, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 19MA00852 du 15 février 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé ce jugement et la décision implicite de rejet du préfet des Alpes-Maritimes en tant qu'ils portent sur le refus d'exercer les pouvoirs prévus à l'article L. 752-23 du code de commerce et, d'autre part, enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de faire procéder au constat de l'exploitation illicite de la surface de vente du magasin exploité sous l'enseigne " Conforama " au sein du centre commercial " Nice One " dans un délai de quinze jours à compter de la date de réouverture des magasins de vente et centres commerciaux d'une surface supérieure ou égale à 20 000 m², sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, et de mettre en œuvre les pouvoirs prévus à l'article L. 752-23 du code de commerce pour mettre fin à l'exploitation illicite de cette surface de vente en tant qu'elle excède 2 000 m², sous astreinte de 5 000 euros par jour.
Par un pourvoi, enregistré le 9 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de l'association En toute franchise département des Alpes-Maritimes ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 21 mars 2012, la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a autorisé la société civile de construction-vente (SCCV) PIA Stade de Nice à créer un ensemble commercial d'une surface de 22 700 m² s'intégrant au sein du projet " Nice Stadium ". Le 16 février 2016, l'ensemble commercial a ouvert ses portes au public sur 15 300 m² de surface de vente, dont 5 755 m² sous l'enseigne " Conforama ", qui fournit des biens destinés à l'équipement de la maison. L'association En toute franchise du département des Alpes-Maritimes a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du préfet des Alpes-Maritimes rejetant sa demande tendant à faire constater l'exploitation illicite d'une surface de vente par le magasin " Conforama " et à mettre en œuvre les pouvoirs prévus à l'article L. 752-23 du code de commerce. Par un jugement du 12 décembre 2018, le tribunal administratif a rejeté la demande de l'association. Par un arrêt du 15 février 2021 contre lequel le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé ce jugement et la décision implicite de refus du préfet des Alpes-Maritimes en tant qu'ils portent sur le refus d'exercer les pouvoirs prévus à l'article L. 752-23 du code de commerce et, d'autre part, enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de faire procéder au constat de l'exploitation illicite de la surface de vente du magasin " Conforama " au sein du centre commercial " Nice One ", et de mettre en œuvre les pouvoirs prévus à l'article L. 752-23 du code de commerce pour mettre effectivement fin à l'exploitation illicite de cette surface de vente en tant qu'elle excède 2 000 m².
2. Aux termes de l'article L. 752-15 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorisation d'exploitation commerciale est délivrée préalablement à la réalisation du projet si le permis de construire n'est pas exigé. / L'autorisation est accordée par mètre carré de surface de vente. / Une nouvelle demande est nécessaire lorsque le projet, en cours d'instruction ou dans sa réalisation, subit des modifications substantielles, du fait du pétitionnaire, au regard de l'un des critères énoncés à l'article L. 752-6, ou dans la nature des surfaces de vente ".
3. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel a relevé que, dans sa décision du 21 mars 2012, la CNAC avait autorisé la création, au sein d'un ensemble commercial composé de 39 cellules, de deux moyennes surfaces d'équipement de la maison de 2 000 et 830 m², et que le magasin exploité sous l'enseigne " Conforama " provenait du regroupement de ces deux moyennes surfaces d'équipement de la maison ainsi que de surfaces supplémentaires provenant d'autres cellules du centre commercial. Elle en a déduit que, dès lors que ce magasin occupait depuis son ouverture 5 755 m² de surface de vente, le projet avait fait l'objet d'une modification substantielle au cours de sa réalisation sans qu'aucune nouvelle demande d'autorisation d'exploitation commerciale ne soit déposée en application de l'article L. 752-15 du code de commerce. Il ressort toutefois des pièces du dossier soumis à la cour que l'autorisation d'exploitation commerciale accordée par la CNAC dans sa décision du 21 mars 2012 concerne non seulement la création de deux moyennes surfaces d'équipement de la maison de respectivement 2 000 m² et 830 m², mais aussi celle d'une moyenne surface d'équipement de la maison/culture et loisirs de 3 300 m². En se fondant ainsi sur une appréciation incomplète des surfaces du projet autorisé par la CNAC destinées à l'équipement de la maison, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé.
4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 15 février 2021 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : Les conclusions de l'association En toute franchise département des Alpes-Maritimes présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'association En toute franchise département des Alpes-Maritimes et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie pour information sera transmise à la société civile de construction-vente PIA Stade de Nice.
Délibéré à l'issue de la séance du 27 octobre 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; M. Alban de Nervaux, conseiller d'Etat et M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 20 décembre 2022.
La présidente :
Signé : Mme Maud Vialettes
Le rapporteur :
Signé : M. Julien Fradel
Le secrétaire :
Signé : M. Jean-Marie Baune