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10/03/2022 | FRANCE | N°448650

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 10 mars 2022, 448650


Vu la procédure suivante :

Par trois demandes, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 30 janvier 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé l'habilitation secret-défense et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder cette habilitation, d'autre part, d'annuler la décision du 27 septembre 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de réintégration à l'issue de sa mise en disponibilité pour convenances personnelles, ainsi que la décision implicite de rejet de cette deman

de et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à sa réinté...

Vu la procédure suivante :

Par trois demandes, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 30 janvier 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé l'habilitation secret-défense et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder cette habilitation, d'autre part, d'annuler la décision du 27 septembre 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de réintégration à l'issue de sa mise en disponibilité pour convenances personnelles, ainsi que la décision implicite de rejet de cette demande et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à sa réintégration à compter du 31 octobre 2017, enfin, d'annuler la décision du 1er décembre 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a procédé à son licenciement à compter du 2 décembre 2017 et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à sa réintégration à compter du 2 octobre 2017. Par un jugement nos 1704149/5-2-1717573/5-2-1801131/5-2 du 21 février 2019, le tribunal administratif a annulé la décision du 1er décembre 2017 en tant que le licenciement de M. B... prenait effet avant l'expiration du délai de préavis de deux mois, a enjoint au ministre de l'intérieur de réintégrer juridiquement M. B... pour une période correspondant à son préavis et a rejeté le surplus de ses demandes.

Par un arrêt n° 19PA01078 du 13 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 janvier et 13 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, de janvier 1997 jusqu'au mois d'octobre 2014, M. B... a été recruté par deux contrats successifs à durée déterminée en date du 26 octobre 2005 et du 27 octobre 2008 et par un contrat à durée indéterminée en date du 26 août 2011, pour exercer les fonctions de traducteur-interprète en langues arabe et kabyle au sein de la direction de la surveillance du territoire du ministère de l'intérieur, devenue successivement la direction centrale du renseignement intérieur puis la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), fonctions nécessitant une habilitation au niveau secret-défense. A l'issue d'une mise en disponibilité pour convenances personnelles, M. B... a sollicité sa réintégration, d'abord en février 2016 puis par une lettre du 11 juillet 2017. Toutefois, le ministre de l'intérieur a refusé de renouveler son habilitation secret-défense par une décision du 30 janvier 2017 et a refusé de faire droit à sa demande de réintégration par une décision implicite confirmée par un courrier du 27 septembre 2017. Enfin, par une décision du 1er décembre 2017, M. B... a été licencié. Par plusieurs demandes, M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler ces décisions mais, par un jugement du 21 février 2019, le tribunal administratif de Paris a seulement annulé la décision du 1er décembre 2017 en tant que le licenciement prenait effet avant l'expiration du délai de préavis de deux mois et a rejeté le surplus des demandes. M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 13 novembre 2020 par lequel la cour administrative de Paris a rejeté l'appel qu'il a formé contre ce jugement.

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et en particulier des écritures d'appel du requérant, que ce dernier a demandé à la cour administrative d'appel d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu'il avait rejeté sa demande enregistrée sous le n° 1717573/5-2, dirigée contre les décisions du ministre de l'intérieur rejetant sa demande de réintégration à l'issue de son congé pour convenances personnelles, et en tant qu'il avait statué sur sa demande enregistrée sous le n° 1801131/5-2, en limitant l'annulation de la décision du 1er décembre 2017 en tant que son licenciement prenait effet avant l'expiration du délai de préavis de deux mois, et non contre ce jugement en tant qu'il avait rejeté sa demande enregistrée sous le n° 1704149 par laquelle il demandait l'annulation de la décision du 30 janvier 2017 refusant de renouveler son habilitation secret-défense. En outre, il ressort de la décision du 27 septembre 2017 refusant de faire droit à sa demande de réintégration que ce refus était motivé par l'absence d'emploi permettant sa réintégration au sein de la direction générale de la sécurité intérieure ainsi que dans la direction centrale de la sécurité publique et la direction centrale de la police judiciaire. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la cour administrative d'appel se serait méprise sur la portée de ses écritures et commis une erreur de droit en retenant qu'il ne contestait plus, en appel, la légalité du refus d'habilitation secret défense qui lui avait été opposé par la décision du 30 janvier 2017, tout en relevant que ce refus d'habilitation ne constituait pas le motif du rejet de sa demande de réintégration.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 22 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application des articles 7 et 7 bis de la loi du 11 janvier 1984 portant disposition statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " L'agent non titulaire employé pour une durée indéterminée peut solliciter, dans la mesure compatible avec l'intérêt du service, un congé sans rémunération pour convenances personnelles (...) ". En vertu de l'article 24 du même décret, l'agent qui bénéficie d'un congé pour convenances personnelles " sollicite, au moins trois mois avant le terme du congé, le renouvellement de son congé ou sa demande de réemploi par lettre recommandée avec accusé de réception. (...) " et aux termes de l'article 32 du même décret : " A l'issue des congés prévus au titre IV, aux articles 20, 20 bis, 21, 22 et 23 du titre V et à l'article 26 du titre VI, les agents physiquement aptes et qui remplissent toujours les conditions requises sont réemployés sur leur emploi ou occupation précédente dans la mesure permise par le service. Dans le cas contraire, ils disposent d'une priorité pour être réemployés sur un emploi ou occupation similaire assorti d'une rémunération équivalente. "

4. Par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel, a relevé, par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, que la réintégration de M. B... comme traducteur-interprète en langues arabe et kabyle au sein de la DGSI était impossible faute que son habilitation au secret-défense ait été renouvelée et que les recherches de reclassement sur un poste de traducteur-interprète, effectuées auprès de la direction centrale de la police judiciaire, de la direction centrale de la sécurité publique, de la direction des étrangers en France et de la direction générale de la gendarmerie nationale, ainsi que de la direction des ressources et des compétences de la police nationale, seuls services du ministère de l'intérieur susceptibles de proposer un tel poste, avaient été infructueuses. En en déduisant, dans ces conditions, compte tenu de la spécificité des compétences de M. B..., que le ministre de l'intérieur n'avait pas méconnu les obligations découlant de l'article 32 du décret di 17 janvier 1986, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit.

5. En dernier lieu, c'est par une appréciation souveraine exempte de dénaturation que la cour administrative d'appel a estimé que la décision du 1er décembre 2017, intitulée " décision portant licenciement de M. A... B... pour impossibilité de réintégration à l'issue d'un congé pour convenances personnelles ", était suffisamment motivée en fait et en droit dès lors qu'elle mentionnait ainsi le motif retenu pour le licenciement et qu'elle visait tous les textes dont elle faisait application. En statuant ainsi, elle n'a pas davantage entaché son arrêt d'une erreur de droit.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. B... doit être rejeté, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré à l'issue de la séance du 3 février 2022 où siégeaient : M. Fabien Raynaud, président de chambre, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 10 mars 2022.

Le président :

Signé : M. Fabien Raynaud

La rapporteure :

Signé : Mme Catherine Moreau

La secrétaire :

Signé : Mme C... D...


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 448650
Date de la décision : 10/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 mar. 2022, n° 448650
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Moreau
Rapporteur public ?: M. Stéphane Hoynck
Avocat(s) : CABINET ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:448650.20220310
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