Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 6 août 2018 par laquelle la garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande de changement de nom de " B... " en " Audirac-d'Aygalliers de la Rouvière " et d'enjoindre au ministre de réexaminer sa demande dans un délai de trois mois.
Par un jugement n° 1817891 du 4 octobre 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 19PA03840 du 19 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement et la décision du 6 août 2018 de la garde des sceaux, ministre de la justice et a enjoint au ministre de présenter au Premier ministre, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt, un projet de décret autorisant M. B... à changer son patronyme en " Audirac-d'Aygalliers de la Rouvière ".
Par un pourvoi, enregistré le 5 janvier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteure publique,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... B... a demandé à la garde des sceaux, ministre de la justice, de l'autoriser à adjoindre à son nom celui de " d'Aygalliers de la Rouvière ". Par une décision du 6 août 2018, la ministre a rejeté sa demande. Par un jugement du 4 octobre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de cette décision. Par un arrêt du 19 novembre 2020, contre lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement, ensemble la décision du 6 août 2018 et a enjoint au ministre de présenter au Premier ministre, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt, un projet de décret autorisant M. B... à changer son patronyme en " Audirac-d'Aygalliers de la Rouvière ".
2. Aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. / La demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré / Le changement de nom est autorisé par décret ". Le relèvement d'un nom afin d'éviter son extinction ne saurait s'appliquer à un nom d'usage mais suppose qu'il soit établi que le nom en cause a été légalement porté par un ascendant de celui qui demande à changer de nom ou par un collatéral jusqu'au quatrième degré.
3. En se fondant, pour juger que le garde des sceaux, ministre de la justice ne pouvait légalement refuser la demande présentée par M. B..., sur la circonstance que si le nom dont il demandait le relèvement n'avait été porté par aucun de ses ascendants ou collatéraux jusqu'au quatrième degré, ce nom aurait toutefois pu être porté par son trisaïeul, et par suite par ses descendants, s'il n'avait pas été retranscrit de façon incomplète sur les registres d'état civil, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit. Par suite, le garde des sceaux, ministre de la justice, est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un ascendant ou collatéral jusqu'au quatrième degré de M. B... aurait légalement porté le nom de " d'Aygalliers de la Rouvière " dont il revendique l'adjonction à son patronyme. La circonstance, à la supposer établie, que ce nom aurait été porté par son quadrisaïeul et par deux filles de celui-ci - respectivement ascendant au cinquième degré et collatérales au sixième degré de l'intéressé - et que le non-usage de ce nom n'aurait pas fait perdre à ses ascendants plus proches le droit d'en réclamer la possession, est sans incidence sur l'appréciation de l'intérêt légitime de l'intéressé à en demander le relèvement en application du deuxième alinéa de l'article 61 du code civil. En l'absence d'un tel intérêt, celui-ci ne saurait utilement se prévaloir du risque d'extinction de ce nom, ni de ce qu'il devrait être relevé dans son intégralité.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 août 2018 par laquelle la garde des sceaux a rejeté sa demande de changement de nom et ses conclusions à fin d'injonction.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 19 novembre 2020 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : La requête présentée par M. B... devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. A... B....