Vu la procédure suivante :
M. B... L... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1405716 du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 17LY02492 du 19 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de M. L..., annulé ce jugement et rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 février et 21 août 2020 et le 24 novembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. L... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mathieu Le Coq, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de M. L... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par actes des 1er juin, 7 juillet et 27 août 1989, Mme L... a consenti à la SAS Ateliers Mécaniques de la Madeleine (AMM), dont son époux était alors le président directeur général, trois baux à construction sur des parcelles de terrains dont elle était propriétaire. Le 21 juin 2011, Mme L... a cédé les terrains supportant les constructions édifiées par la SAS AMM à la SARL JGM Tournel moyennant un prix de 149 000 euros. A l'issue d'un contrôle sur pièces des déclarations de revenus de M. et Mme L... au titre de l'année 2011, des rehaussements leur ont été notifiés par une proposition de rectification du 14 décembre 2012, au motif que la cession des terrains intervenue le 21 juin 2011 avait entraîné le retour des constructions dans le patrimoine du bailleur, induisant ainsi la perception par Mme L... d'un revenu foncier à raison de la remise gratuite des biens édifiés sur ces parcelles. Par un jugement du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. L... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, à raison de ce rehaussement, au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes. M. L... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 19 décembre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir annulé ce jugement, a rejeté la demande qu'il avait présentée devant le tribunal administratif de Lyon.
2. Aux termes de l'article 33 bis du code général des impôts : " (...) les loyers et prestations de toute nature qui constituent le prix d'un bail à construction passé dans les conditions prévues par les articles L. 251-1 à L. 251-8 du code de la construction et de l'habitation, ont le caractère de revenus fonciers au sens de l'article 14 ". Aux termes de l'article 33 ter du même code : " I. Lorsque le prix du bail consiste, en tout ou partie, dans la remise d'immeubles ou de titres dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 251-5 du code de la construction et de l'habitation, le bailleur peut demander que le revenu représenté par la valeur de ces biens calculée d'après le prix de revient soit réparti sur l'année ou l'exercice au cours duquel lesdits biens lui ont été attribués et les quatorze années ou exercices suivants. / En cas de cession des biens, la partie du revenu visé au premier alinéa qui n'aurait pas encore été taxée est rattachée aux revenus de l'année ou de l'exercice de la cession. Le cédant peut, toutefois, demander le bénéfice des dispositions de l'article 163-0 A. (...) II. - Les dispositions du I s'appliquent également aux constructions revenant sans indemnité au bailleur à l'expiration du bail. / Toutefois, la remise de ces constructions ne donne lieu à aucune imposition lorsque la durée du bail est au moins égale à trente ans. Si la durée du bail est inférieure à trente ans, l'imposition est due sur une valeur réduite en fonction de la durée du bail dans des conditions fixées par décret ".
3. En vertu des dispositions combinées des articles 33 bis et 33 ter du code général des impôts, lorsque le prix d'un bail à construction consiste, en tout ou en partie, dans la remise gratuite d'immeubles en fin de bail, la valeur de ces derniers, calculée d'après leur prix de revient, constitue un revenu foncier perçu par le bailleur à la fin du bail. En présence de plusieurs actes concomitants cédant au même acquéreur, avant le terme du bail, les biens et droits respectifs du bailleur et du preneur, la réunion des qualités de bailleur et de preneur en la même personne, alors même qu'elle constitue une cause d'extinction des obligations issues du bail par confusion des qualités de créancier et de débiteur en application des règles du droit civil, a les mêmes effets au regard de la loi fiscale que la résiliation anticipée du bail impliquant la remise des constructions au bailleur et par suite l'application à son égard des dispositions des articles 33 bis et 33 ter du code général des impôts.
4. La cour administrative d'appel de Lyon a relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que le terrain d'assiette des baux à construction conclus entre Mme L... et la société AMM et les droits que cette dernière société tenait de ces mêmes baux avaient été cédés concomitamment à la société JGM Tournel par deux actes du 21 juin 2011. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en déduisant de ces constatations, par un arrêt suffisamment motivé, que ces cessions avaient produit, au regard de la loi fiscale, quelle qu'ait été l'intention des parties et indépendamment des dispositions du code civil en application desquelles la confusion en la même personne des qualités de bailleur et de preneur entraîne l'extinction du bail, les mêmes effets qu'une résiliation amiable tacite des baux impliquant, pour l'application des dispositions des articles 33 bis et 33 ter du code général des impôts, la remise gratuite des constructions à Mme L... en sa qualité de bailleur.
5. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. L... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. L... est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... L... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré à l'issue de la séance du 26 novembre 2021 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. J... D..., M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. H... M..., M. I... F..., M. E... K..., M. C... N..., M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. Mathieu Le Coq, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 29 décembre 2021.
La Présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
Le rapporteur :
Signé : M. Mathieu Le Coq
La secrétaire :
Signé : Mme A... G...