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29/07/2020 | FRANCE | N°432685

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 29 juillet 2020, 432685


Vu la procédure suivante :

La société Paris Saint-Germain Football Club a demandé au tribunal administratif de Montreuil la réduction, à concurrence de la somme de 30 433 euros, de sa cotisation minimale de taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2008 et la décharge de la cotisation supplémentaire à cette cotisation à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2009, d'un montant de 130 549 euros. Par un jugement n° 1207203, 1301926 du 2 décembre 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14VE0040

7 du 19 mai 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a, à la suite d'...

Vu la procédure suivante :

La société Paris Saint-Germain Football Club a demandé au tribunal administratif de Montreuil la réduction, à concurrence de la somme de 30 433 euros, de sa cotisation minimale de taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2008 et la décharge de la cotisation supplémentaire à cette cotisation à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2009, d'un montant de 130 549 euros. Par un jugement n° 1207203, 1301926 du 2 décembre 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14VE00407 du 19 mai 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a, à la suite d'un arrêt avant-dire-droit rendu le 26 novembre 2015, annulé ce jugement et fait droit à la demande de la société Paris Saint-Germain Football Club.

Par une décision n° 401533 du 6 décembre 2017, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'action et des comptes publics, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour.

Par une ordonnance n° 17VE03998 du 20 juin 2018, le président de la première chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du 2 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts telles qu'interprétées par le Conseil d'Etat.

Par un arrêt n° 17VE03998 du 14 mai 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Paris Saint-Germain Football Club contre le jugement n° 1207203, 1301926 du 2 décembre 2013 du tribunal administratif de Montreuil.

Par un pourvoi, enregistré le 16 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Paris Saint-Germain Football Club demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Arno Klarsfeld, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Anne Iljic, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la SA Paris Saint-Germain Football Club ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2008 et 2009 de la société Paris Saint-Germain Football Club, l'administration fiscale a réintégré dans la valeur ajoutée servant de référence pour la détermination de la cotisation minimale de taxe professionnelle les produits tirés par cette société de la cession de contrats de joueurs. La société se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 mai 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a, après cassation et sur renvoi de l'affaire par le Conseil d'Etat, rejeté la demande de décharge des cotisations supplémentaires mise à la charge de la société à ce titre. A l'appui de ce pourvoi, elle conteste l'ordonnance du 20 juin 2018 par laquelle le président de la première chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du 2 du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts telles qu'interprétées par le Conseil d'Etat statuant au contentieux.

Sur la contestation du refus de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité :

2. Les dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance portant loi organique du 7 novembre 1958 prévoient que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative aux droits et libertés garantis par la Constitution, elle transmet au Conseil d'Etat la question de constitutionnalité ainsi posée à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle ne soit pas dépourvue de caractère sérieux.

3. Le 1° du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige dispose que la valeur ajoutée produite par l'entreprise et qui entre dans le calcul de la cotisation de taxe professionnelle " est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. ". Aux termes du 2° de ce même II : " pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : / D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les transferts de charges mentionnées aux troisième et quatrième alinéas ainsi que les transferts de charges de personnel mis à disposition d'une autre entreprises ; les stocks à la fin de l'exercice ; / Et, d'autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice (...) ". Aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III à ce code : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ".

4. Il résulte de ces dispositions, telles qu'interprétées par la jurisprudence du Conseil d'Etat, qu'il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une des catégories d'éléments comptables énumérés au 2° du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée, dès lors qu'elles s'imposent obligatoirement aux entreprises. Il en va de même pour déterminer, le cas échéant, le mode de calcul des éléments comptables ainsi énumérés. Il ressort du plan comptable général qu'en cas de cession d'une immobilisation, la plus-value ou la moins-value réalisée est constatée dans les comptes par la différence entre le prix de cession et la valeur nette comptable de l'immobilisation cédée, laquelle correspond à la différence entre la valeur d'origine du bien inscrit au compte d'actif et, le cas échéant, le cumul des amortissements comptabilisés au titre de ce bien. Par suite, pour l'application des dispositions du 2° du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts à des cessions d'immobilisations corporelles ou incorporelles revêtant, compte tenu de la spécificité de l'activité de l'entreprise, un caractère habituel, et devant dès lors être comptabilisées en produits de l'exercice, il convient, afin de déterminer la valeur ajoutée produite par l'entreprise, de prendre en compte la différence entre le prix de cession de l'immobilisation et sa valeur nette comptable, et non la différence entre le prix de cession et le coût d'acquisition de cette immobilisation.

5. La société Paris Saint-Germain Football Club soutenait devant la cour administrative d'appel de Versailles que n'était pas dépourvue de caractère sérieux la question de la conformité au principe d'égalité devant les charges publiques des dispositions du 2° du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, telles qu'interprétées conformément au point 4, dès lors que, selon elle, ces dispositions soumettent les entreprises à l'imposition d'une plus-value fictive sans lien avec leur capacité contributive, faute d'avoir prévu une règle de correction d'assiette de la plus-value permettant de neutraliser les amortissements qui n'ont pu être déduits de la valeur ajoutée. Toutefois, la seule circonstance que les dispositions du 2° du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts conduisent à constater la plus-value ou la moins-value réalisée, en cas de cession d'une immobilisation, par référence à sa valeur nette comptable et non à son prix d'acquisition, ne saurait être regardée comme entraînant une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques, alors même que les éventuelles dotations aux amortissements comptabilisées au titre de l'élément d'actif cédé ne seraient pas déductibles du chiffre d'affaires pour la détermination de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation de taxe professionnelle. Par suite, la société Paris Saint-Germain Football Club n'est pas fondée à soutenir que le président de la première chambre de la cour administrative d'appel de Versailles, qui s'est attaché à vérifier la prise en compte des capacités contributives des redevables pour la détermination de la plus-value taxable à la valeur ajoutée et ne s'est pas donc fondé sur un motif inopérant, aurait entaché son ordonnance d'erreur de droit ou d'inexacte qualification juridique.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Paris Saint-Germain Football Club n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du 20 juin 2018 par laquelle le président de la première chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a refusé de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité qu'elle avait soulevée devant lui.

Sur l'autre moyen du pourvoi :

7. Si la société soutient que la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit en se fondant sur une interprétation contraire à la Constitution des dispositions du 2° du II de l'article 1647 B sexies dans sa rédaction applicable aux impositions en litige pour juger que les indemnités de cession de contrats de joueurs devant être prises en compte dans le calcul de la valeur ajoutée pour la détermination de la cotisation minimale de taxe professionnelle correspondaient à la différence entre le prix de de cession et sa valeur nette comptable, il résulte de ce qui a été dit au point 5 que cette modalité de calcul ne méconnaît pas le principe d'égalité devant les charges publiques. Il s'ensuit que c'est sans erreur de droit que la cour administrative d'appel de Versailles a jugé que le produit à retenir lors de la cession de contrats de joueurs est le solde du prix de cession et de la valeur nette comptable constatée à la date de cette cession.

8. Il résulte de ce qui précède que la société Paris Saint-Germain Football Club n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société Paris Saint-Germain Football Club est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Paris Saint-Germain Football Club et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 432685
Date de la décision : 29/07/2020
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2020, n° 432685
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Arno Klarsfeld
Rapporteur public ?: Mme Anne Iljic
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:432685.20200729
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