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07/11/2018 | FRANCE | N°414346

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 07 novembre 2018, 414346


Vu la procédure suivante :

M. B...A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 2 mars 2012 par laquelle le ministre de la défense, après avis de la commission de recours des militaires, a rejeté son recours formé contre la décision prononçant le retrait de son habilitation pour l'accès aux informations classées " secret défense " qui lui avait été accordée le 12 avril 2011 ainsi que contre la décision de l'évincer d'un stage de formation des opérateurs linguistiques d'interception en langue arabe, et d'enjoindre au ministre de la d

fense de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le dé...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 2 mars 2012 par laquelle le ministre de la défense, après avis de la commission de recours des militaires, a rejeté son recours formé contre la décision prononçant le retrait de son habilitation pour l'accès aux informations classées " secret défense " qui lui avait été accordée le 12 avril 2011 ainsi que contre la décision de l'évincer d'un stage de formation des opérateurs linguistiques d'interception en langue arabe, et d'enjoindre au ministre de la défense de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1203164 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du ministre de la défense.

Par un arrêt n° 15MA03711 du 4 juillet 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel formé par le ministre de la défense, annulé ce jugement et rejeté la demande de M. A...B....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 septembre et 18 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel formé par le ministre de la défense ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la défense ;

- l'arrêté du 30 novembre 2011 portant approbation de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Firoud, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Balat, avocat de M. A...B....

1. Considérant que M. A...B..., second maître de la marine nationale, a été habilité à connaître des informations classifiées " secret défense " par décision du 12 avril 2011 ; qu'il a été admis au centre de formation interarmées au renseignement pour suivre le stage de formation à l'obtention du certificat d'opérateur linguiste d'interception en langue arabe, à compter du 27 juin 2011 ; que, par une décision du 12 septembre 2011, le commandant du centre de formation interarmées aux renseignements a informé M. A...B...que l'accès aux informations de niveau " secret défense " lui était retiré, avant de l'évincer pour ce motif du stage de formation en cause, par une nouvelle décision référencée n° 0006 DR 2109 ; que le recours gracieux formé par M. A...B...les 9 novembre et 14 décembre 2011 devant la commission des recours des militaires à l'encontre de ces deux décisions a été rejeté par une décision du ministre de la défense prise le 2 mars 2012 ; que, par un jugement avant-dire droit du 12 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille, saisi par M. A...B..., a ordonné au ministre de la défense, avant de statuer sur la légalité de cette décision, de lui en communiquer les motifs ; qu'après que le ministre de la défense a indiqué ces motifs, le tribunal administratif de Marseille a, par un jugement du 6 juillet 2015, annulé la décision litigieuse ; que, par un arrêt du 4 juillet 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel du ministre de la défense, annulé ce jugement et rejeté la demande tendant à l'annulation de la décision prise le 2 mars 2012 ; que M. A...B...se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de la défense :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le courrier en date du 12 juillet 2017 par lequel le greffe de la cour administrative d'appel de Marseille a notifié à M. A... B...l'arrêt attaqué lui a été remis le 15 juillet ; que, par suite, le ministre de la défense n'est pas fondé à soutenir que son pourvoi, enregistré le 15 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, serait tardif ; que la fin de non-recevoir qu'il soulève ne peut, dès lors, qu'être rejetée ;

Sur l'arrêt attaqué :

3. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il statue sur une demande d'annulation d'une décision portant retrait d'une habilitation " secret défense ", de contrôler, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, la légalité des motifs sur lesquels l'administration s'est fondée ; qu'il lui est loisible de prendre, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux de direction de l'instruction, toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, sans porter atteinte au secret de la défense nationale ; qu'il lui revient, au vu des pièces du dossier, de s'assurer que la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

4. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Marseille a jugé que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ne pouvait être utilement invoqué devant le juge administratif à l'encontre d'une décision retirant l'habilitation " secret défense ", dès lors que le ministre avait refusé de déclassifier, après consultation de la commission consultative du secret de la défense nationale, les informations ayant servi de fondement à cette décision ; qu'elle a ainsi entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite, M. A...B...est fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, à en demander l'annulation ;

5. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros à M. A...B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 4 juillet 2017 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...B...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...B...et à la ministre des armées.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 414346
Date de la décision : 07/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 nov. 2018, n° 414346
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc Firoud
Rapporteur public ?: M. Olivier Henrard
Avocat(s) : BALAT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:414346.20181107
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