Vu la procédure suivante :
M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités correspondantes, qui ont été mises à leur charge au titre de l'année 2007. Par un jugement n° 1427537 du 9 décembre 2015, le tribunal a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 16PA00245 du 6 avril 2017, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 7 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M.B....
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., gérant et associé majoritaire de la société civile immobilière (SCI) l'Immobilière de l'Oise et de la SCI Péronne, sociétés relevant de l'article 8 du code général des impôts, a fait l'objet d'une plainte pénale et d'une procédure judiciaire d'enquête préliminaire, à la suite de la saisie auprès d'un tiers de fichiers informatiques laissant apparaître qu'il était susceptible de détenir en Suisse des avoirs financiers non déclarés. Les perquisitions et interrogatoires effectués dans le cadre de l'enquête ont fait apparaître une pratique de fausse facturation mise en place dans les deux SCI. En conséquence, ces deux sociétés ont fait l'objet de procédures de contrôle sur pièces, à la suite desquelles l'administration a rehaussé leurs revenus fonciers, au titre des années 2005 à 2009 pour la SCI l'Immobilière de l'Oise et des années 2007 à 2010 pour la SCI Péronne, notamment à raison de la réintégration de dépenses de travaux regardées comme fictives par l'administration. M. et Mme B...ont parallèlement fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre de l'année 2007, à la suite duquel l'administration fiscale a rehaussé leurs revenus fonciers issus des deux SCI et leur a notifié à ce titre des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, assorties de majorations pour manoeuvres frauduleuses. M. B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 avril 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre le jugement du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires et pénalités.
2. En premier lieu, eu égard aux exigences découlant notamment de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, l'administration fiscale ne saurait se prévaloir, pour établir une imposition, de pièces ou documents obtenus par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge. Toutefois, la seule circonstance qu'avant de mettre en oeuvre à l'égard d'un contribuable les pouvoirs qu'elle tient du titre II du livre des procédures fiscales aux fins de procéder au contrôle de sa situation fiscale et de recueillir les éléments nécessaires pour, le cas échéant, établir des impositions supplémentaires, l'administration aurait disposé d'informations relatives à ce contribuable issues de documents initialement obtenus de manière frauduleuse par un tiers est, par elle-même, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.
3. La cour administrative d'appel a, par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, estimé que les impositions supplémentaires et pénalités en litige n'étaient pas fondées sur le contenu des fichiers informatiques saisis au domicile d'un tiers mais constituaient la conséquence des contrôles de la SCI l'Immobilière de l'Oise et de la SCI Péronne. Il résulte de ce qui est dit au point 2 que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en écartant le moyen de M. B... tiré de ce que la procédure d'imposition suivie à son encontre serait irrégulière du seul fait que l'administration fiscale aurait engagé le contrôle de sa situation fiscale en raison de ce que son nom figurait dans les fichiers informatiques mentionnés au point 1.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, applicable à la présente procédure : " Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ".
5. La circonstance que les renseignements recueillis par l'administration fiscale, avant le début d'une instance devant les tribunaux, au sens de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, ne pouvaient suffire à fonder les redressements correspondant aux insuffisances d'imposition qui pouvaient être présumées n'établit pas, par elle-même, que ces insuffisances doivent être nécessairement regardées comme ayant été révélées par cette instance. Pour apprécier si l'administration fiscale peut se prévaloir du délai spécial de reprise prévu par cet article, le juge doit, dès lors qu'il est saisi d'une argumentation en ce sens, rechercher si l'administration disposait, avant l'ouverture de l'instance devant les tribunaux, dans le délai normal de reprise ou même après son expiration, d'éléments suffisants pour lui permettre, par la mise en oeuvre des procédures d'investigation dont elle dispose, d'établir les insuffisances ou omissions d'impositions. En l'espèce, M. B... n'a toutefois pas fait valoir devant la cour une telle argumentation. Dès lors, son moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en ne recherchant pas si l'administration fiscale disposait, dès avant leur révélation par une instance devant les tribunaux, des informations nécessaires pour établir l'omission ou l'insuffisance d'imposition en litige ne peut qu'être écarté.
6. Pour l'application de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales aux omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux répressifs, seul l'engagement de poursuites, qui inclut la phase de l'instruction conduite par le juge d'instruction, doit être regardé comme ouvrant l'instance. L'ouverture d'une enquête préliminaire, en revanche, n'a pas un tel effet. Lorsque des insuffisances ou omissions d'impositions sont révélées à l'administration fiscale postérieurement à l'ouverture d'une instance, au sens de ces dispositions, le délai spécial de reprise qu'elles prévoient est applicable, alors même que les insuffisances ou omissions d'impositions sont mises en évidence par des pièces de la procédure établies au stade d'une enquête préliminaire.
7. La cour a rappelé que, si les procès-verbaux d'auditions et de constatations faisant apparaître la pratique de fausse facturation mentionnée au point 1 avaient été dressés au stade de l'enquête préliminaire dirigée par le parquet financier avant la désignation d'un juge d'instruction et l'ouverture d'une information judiciaire ayant la nature d'une instance, au sens de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales, le droit de communication de l'administration fiscale avait été exercé pour la première fois auprès du juge d'instruction. Il résulte de ce qui est jugé au point 6 qu'en en déduisant que la prescription spéciale prévue par cet article était applicable, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.
8. En troisième lieu, en jugeant que les manquements commis par M. B... présentaient un caractère intentionnel, la cour a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine qui n'est pas arguée de dénaturation. Le moyen de M. B... tiré de ce que, faute d'avoir établi le caractère intentionnel des manquements, la cour aurait commis une erreur de droit en jugeant que la circonstance qu'il a fait simultanément l'objet de poursuites pénales pour fraude fiscale et de l'application des pénalités pour manoeuvres frauduleuses prévues à l'article 1729 du code général des impôts n'avait pas entraîné une méconnaissance de l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut, par suite, qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.