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27/06/2018 | FRANCE | N°403164

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 27 juin 2018, 403164


Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004, 2005 et 2006. Par un jugement n° 0901494 du 8 novembre 2011, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 11NC02075 du 14 mai 2013, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. et Mme B...contre ce jugement.

Par une décision n° 370049 du 24 juin 2015, le Conseil d'Etat statuant

au contentieux a annulé cet arrêt en tant qu'il a statué sur les cotisations sup...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004, 2005 et 2006. Par un jugement n° 0901494 du 8 novembre 2011, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 11NC02075 du 14 mai 2013, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. et Mme B...contre ce jugement.

Par une décision n° 370049 du 24 juin 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt en tant qu'il a statué sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et les pénalités correspondantes mises à la charge de M. et Mme B...au titre des années 2004 et 2005 et résultant de la limitation à 50 % du montant des charges foncières admises en déduction de leur revenu global. Il a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour.

Par un arrêt n° 15NC01502 du 5 juillet 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté les conclusions de M. et Mme B...tendant à la décharge des cotisations et pénalités en question.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 septembre et 5 décembre 2016 et le 16 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leurs conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Yohann Bénard, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de M. et MmeB....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B...sont propriétaires, depuis 1999, d'un immeuble situé à Gondreville (Meurthe-et-Moselle), qui constitue leur résidence principale et dont certaines parties (façades, toiture, escalier extérieur, murs de clôture et jardin) ont été inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques. Ils ont déduit de leurs revenus imposables déclarés au titre des années 2004 à 2006, sur le fondement des dispositions du 1° ter du II de l'article 156 du code général des impôts, des dépenses de fournitures et de travaux relatives à la restauration de cet immeuble. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a remis en cause une partie des déductions pratiquées. Elle a, notamment, d'une part, refusé la déduction, au titre des trois années 2004, 2005 et 2006, des charges correspondant à des travaux qui ne concernaient pas les parties de l'immeuble inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et a, d'autre part, limité à 50 % le montant des charges admises en déduction, au titre des années 2004 et 2005, au motif que l'immeuble n'était pas, pendant ces années, ouvert au public. M. et Mme B...ont contesté les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et les pénalités auxquelles ils ont, en conséquence, été assujettis. Par une décision du 24 juin 2015, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 14 mai 2013 en tant qu'il a statué sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et les pénalités correspondantes mises à la charge de M. et Mme B...au titre des années 2004 et 2005 et résultant de la limitation à 50 % du montant des charges foncières admises en déduction de leur revenu global et a rejeté le surplus des conclusions de leur pourvoi. Par un arrêt du 5 juillet 2016 la cour, à qui le Conseil d'Etat avait renvoyé l'affaire dans la mesure de la cassation prononcée, a rejeté les conclusions de la requête des épouxB....

2. Aux termes de l'article 41 F de l'annexe III au code général des impôts, les charges foncières admises en déduction du revenu global en application du 1° ter du II de l'article 156 de ce code " sont déductibles pour leur montant total si le public est admis à visiter l'immeuble et pour 50 p. 100 de leur montant dans le cas contraire ". Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que les charges foncières correspondant à des travaux réalisés antérieurement à l'ouverture de l'immeuble au public puissent être déduites du revenu global du contribuable, dès lors que ces travaux sont, en tout ou en partie, liés à l'intention manifestée par le contribuable d'ouvrir l'immeuble à la visite et qu'il a fait toutes diligences pour procéder à cette ouverture. La preuve de l'intention d'ouvrir l'immeuble à la visite peut être apportée par tous moyens et pas seulement par des démarches entreprises auprès de l'administration.

3. Pour estimer que l'administration avait à bon droit limité à 50 % le montant des charges foncières admises en déduction du revenu global de M. et Mme B...au titre des années 2004 et 2005, la cour a jugé, en premier lieu, que le seul fait d'avoir, dans la déclaration de leurs revenus des années 2004 et 2005, porté en déduction de leur revenu global le montant total de leurs charges foncières ne pouvait suffire à établir leur intention d'ouvrir leur immeuble au public, en deuxième lieu, que si les contribuables indiquaient que les travaux réalisés dans leur propriété avaient été entrepris en vue d'un accueil du public, ils ne fournissaient aucune précision à cet égard, en troisième lieu, que s'ils faisaient également état de ce que les travaux avaient bénéficié d'une subvention de la direction régionale des affaires culturelles de Lorraine, ils ne démontraient pas, ni d'ailleurs n'alléguaient, que cette subvention leur avait été accordée à la condition qu'ils ouvrent leur propriété au public, en quatrième lieu, que le fait qu'ils auraient, dès l'acquisition de leur bien, autorisé des visites sur demande ne permettait pas de démontrer qu'ils avaient l'intention d'ouvrir leur immeuble au public après l'achèvement des travaux, enfin, que s'il était constant que la propriété avait été ouverte au public à partir du mois d'août 2006, cette circonstance ne constituait pas, à elle seule, une preuve suffisante de ce que les requérants avaient l'intention, dès 2004 et 2005, d'agir de la sorte.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si les requérants ont produit des documents, notamment des factures, afin de justifier de la réalité et de la nature des travaux réalisés dans leur propriété, ces documents ne comportent aucun élément de nature à démontrer l'existence d'un lien entre ces travaux et un projet d'ouverture de l'immeuble au public. Par suite, la cour n'a pas dénaturé les faits de l'espèce ni méconnu les écritures des parties en jugeant que, faute de précision de ces documents quant à la nature exacte et la consistance des travaux, M. et Mme B...ne justifiaient pas que ces travaux avaient été entrepris en vue d'un accueil du public.

5. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 2, les charges foncières correspondant à des travaux réalisés antérieurement à l'ouverture de l'immeuble au public ne peuvent être déduites du revenu global du contribuable que si ce dernier a, d'une part, manifesté, dès la réalisation de ces travaux, son intention d'ouvrir l'immeuble à la visite après leur achèvement et s'il a, d'autre part, fait toutes diligences pour procéder à cette ouverture. L'ouverture effective de l'immeuble au public, postérieurement aux années au cours desquelles les travaux ont été réalisés, ne suffit pas à établir l'intention antérieure du contribuable de procéder à cette ouverture. Par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que la propriété des époux B...ait été effectivement ouverte au public à partir du mois d'août 2006 ne suffisait pas à démontrer que les requérants avaient eu l'intention, dès 2004 et 2005, de procéder à cette ouverture.

6. En troisième et dernier lieu, si en l'absence de preuve matérielle directe de l'intention manifestée par le contribuable d'ouvrir l'immeuble au public, cette preuve peut être rapportée par un faisceau d'indices précis et concordants, il appartient au juge d'apprécier la force probatoire de chacun de ces indices avant, le cas échéant, d'estimer, par une appréciation souveraine, s'ils sont ou non de nature à rapporter la preuve requise. La cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé, n'a pas commis d'erreur de droit en appliquant cette règle et en en déduisant, par une appréciation souveraine, que les arguments avancés par les contribuables ne démontraient pas leur intention d'ouvrir leur immeuble au public au cours des années en litige.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. En conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme B...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Monsieur et Madame B... et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 403164
Date de la décision : 27/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2018, n° 403164
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Matias de Sainte Lorette
Rapporteur public ?: M. Yohann Bénard
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:403164.20180627
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