La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2018 | FRANCE | N°403554

France | France, Conseil d'État, 4ème et 1ère chambres réunies, 01 juin 2018, 403554


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 janvier 2011 par lequel la présidente de l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines a procédé au retrait de son arrêté du 15 novembre 2010 et l'a classé, à compter du 1er septembre 2009, au 3ème échelon de la classe normale des maîtres de conférences avec une ancienneté conservée d'un an et cinq mois. Par un jugement n° 1102996 du 25 septembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14V

E02977 du 19 juillet 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 janvier 2011 par lequel la présidente de l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines a procédé au retrait de son arrêté du 15 novembre 2010 et l'a classé, à compter du 1er septembre 2009, au 3ème échelon de la classe normale des maîtres de conférences avec une ancienneté conservée d'un an et cinq mois. Par un jugement n° 1102996 du 25 septembre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14VE02977 du 19 juillet 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par M. A...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 16 septembre et 16 décembre 2016 et le 3 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009, notamment son article 125 ;

- le décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 ;

- le décret n° 2009-462 du 23 avril 2009 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anissia Morel, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., maître de conférences à l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines depuis 2007, a demandé à être reclassé dans son corps d'enseignant-chercheur par application des nouvelles dispositions du décret du 23 avril 2009 relatif aux règles de classement des personnes nommées dans les corps d'enseignants-chercheurs des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche relevant du ministre chargé de l'enseignement supérieur, rendues applicables, par l'article 125 de la loi de finances pour 2010, aux enseignants-chercheurs recrutés avant l'intervention de ce décret, classés dans le premier grade et en fonctions à la date de la publication de la loi ; qu'il a alors été reclassé, par un arrêté du 15 novembre 2010 de la présidente de cette université, au 4ème échelon de la classe normale des maîtres de conférences à compter du 1er septembre 2009, avec une ancienneté conservée d'un an et onze mois ; que, toutefois, par un arrêté du 22 janvier 2011, la présidente de l'université a retiré son précédent arrêté et reclassé M. A...au 3ème échelon de la classe normale des maîtres de conférences à compter du 1er septembre 2009, avec une ancienneté conservée d'un an et cinq mois ; que la différence entre les deux arrêtés, en termes de reclassement, tient à la prise en compte, pour le premier, en totalité, pour le second, pour moitié seulement, des vingt mois que M. A...a passés au Canada, sous couvert d'un contrat de travail, en qualité de chercheur post-doctorant, avant d'être recruté comme maître de conférences ; que M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel formé contre le jugement ayant rejeté sa requête aux fins d'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 22 janvier 2011 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret du 23 avril 2009 : " Les recherches effectuées après l'obtention du doctorat, dans le cadre d'un contrat de travail, par les personnels nommés, d'une part, dans le corps des professeurs des universités ou dans l'un des corps assimilés à celui des professeurs des universités et qui n'avaient pas antérieurement la qualité de fonctionnaire, et, d'autre part, dans le corps des maîtres de conférences ou dans l'un des corps assimilés à celui des maîtres de conférences, en application de l'arrêté prévu à l'article 6 du décret du 16 janvier 1992 susvisé, et d'un niveau au moins équivalent à celui des fonctions exercées par les membres du corps d'accueil sont retenues, dans les conditions suivantes : / 1° Pour l'accès au corps des maîtres de conférences ou à l'un des corps assimilés, le niveau des fonctions est apprécié par le conseil scientifique de l'établissement, ou l'organe en tenant lieu. Le temps consacré à la recherche est pris en compte en totalité dans la limite de quatre ans (...) " ; qu'aux termes de l'article 14 du même décret : " Les agents qui justifient de services accomplis dans une administration ou un organisme ou un établissement d'un Etat non membre de la Communauté européenne, ou non partie à l'accord sur l'Espace économique européen, dans des fonctions d'un niveau au moins équivalent à celui des fonctions exercées par les membres du corps d'accueil, sont classés dans les conditions suivantes :/Les services sont pris en compte, selon les modalités fixées par le présent décret, sur proposition du conseil scientifique de l'établissement ou de l'organe en tenant lieu, qui statue également sur le niveau des fonctions exercées. Les conditions de cette prise en compte sont déterminées par assimilation aux modalités prévues aux articles 10 et 12 ci-dessus selon que les intéressés ont exercé une activité publique ou assimilée ou une activité privée " ; qu'aux termes de l'article 15 du même décret : " Pour l'application du présent décret : / 1° Les fonctions qui ne sont pas exercées à temps plein sont prises en compte à concurrence des services réellement effectués ; / 2° Une même période ne peut donner lieu à prise en compte qu'une seule fois " ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que lorsqu'une personne remplissant les conditions prévues à l'article 5 du décret du 23 avril 2009 a effectué des recherches à l'étranger, dans un Etat non membre de la Communauté européenne ou non partie à l'accord sur l'Espace économique européen, le temps consacré à la recherche est pris en compte dans la limite de quatre ans prévue à cet article, sans préjudice, au-delà de cette limite, de la prise en compte des services remplissant les conditions prévues à l'article 14 du même décret ;

3. Considérant, dès lors, qu'en jugeant que les recherches effectuées au Canada, dans le cadre d'un contrat de travail, par M.A..., après l'obtention de son doctorat, d'une durée inférieure à quatre ans, relevaient exclusivement de l'article 14 du décret du 23 avril 2009, compte tenu du pays où ces recherches avaient été effectuées, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 951-3 du code de l'éducation : " Le ministre chargé de l'enseignement supérieur peut déléguer par arrêté aux présidents des universités et aux présidents ou directeurs des autres établissements publics d'enseignement supérieur, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, tout ou partie de ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des personnels titulaires, stagiaires et non titulaires de l'Etat qui relèvent de son autorité, dans la limite des emplois inscrits dans la loi de finances et attribués à l'établissement. / Les compétences ainsi déléguées s'exercent au nom de l'Etat et leur exercice est soumis au contrôle financier " ; que les compétences ainsi déléguées aux présidents des universités s'exerçant au nom de l'Etat, l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines n'a pas la qualité de défendeur dans la présente instance ; que sa présence en qualité d'observateur ne lui confère pas davantage la qualité de partie, dès lors qu'elle n'aurait pas eu, à défaut d'être présente, qualité pour faire tierce-opposition du présent arrêt ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.A..., lequel n'a pas, au surplus, la qualité de partie perdante, la somme qu'elle demande à ce titre ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A...d'une somme de 3 000 euros au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 19 juillet 2016 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et à l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines.


Synthèse
Formation : 4ème et 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 403554
Date de la décision : 01/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET GRANDES ÉCOLES - UNIVERSITÉS - LITIGE EN MATIÈRE DE RECRUTEMENT ET DE GESTION DES PERSONNELS - COMPÉTENCE EXERCÉE AU NOM DE L'ETAT PAR LES PRÉSIDENTS D'UNIVERSITÉ SUR DÉLÉGATION DU MINISTRE (ART - L - 951-3 DU CODE DE L'ÉDUCATION) - CONSÉQUENCE - UNIVERSITÉ DEVANT ÊTRE CONSIDÉRÉE COMME PARTIE À L'INSTANCE - ABSENCE.

30-02-05-01 Les compétences déléguées en vertu de l'article L. 951-3 du code de l'éducation aux présidents des universités s'exerçant au nom de l'Etat, l'université n'a pas la qualité de défendeur dans une instance opposant un maître de conférence à une université l'employant s'agissant de son reclassement pris en application du décret n° 2009-642 du 23 avril 2009. Sa présence en qualité d'observateur ne lui confère pas davantage la qualité de partie, dès lors qu'elle n'aurait pas eu, à défaut d'être présente, qualité pour faire tierce-opposition.

ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET GRANDES ÉCOLES - UNIVERSITÉS - GESTION DES UNIVERSITÉS - GESTION DU PERSONNEL - RECRUTEMENT - CLASSEMENT DES PERSONNES NOMMÉES ENSEIGNANTS-CHERCHEURS (DÉCRET DU 23 AVRIL 2009) - MODALITÉS - PRISE EN COMPTE DES RECHERCHES EFFECTUÉES DANS UN PAYS HORS UE ET EEE - COMBINAISON DES ARTICLES 5 ET 14 DU DÉCRET - PRISE EN COMPTE DE LA DURÉE DES RECHERCHES DANS LA LIMITE DE QUATRE ANS ET AU DELÀ DE CETTE LIMITE - DES SERVICES REMPLISSANT LES CONDITIONS DE L'ARTICLE 14 DU DÉCRET.

30-02-05-01-06-01-02 Il résulte des articles 5, 14 et 15 du décret n° 2009-462 du 23 avril 2009 que lorsqu'une personne remplissant les conditions prévues à l'article 5 du même décret a effectué des recherches à l'étranger, dans un Etat non membre de la Communauté européenne ou non partie à l'accord sur l'Espace économique européen, le temps consacré à la recherche est pris en compte dans la limite de quatre ans prévue à cet article, sans préjudice, au-delà de cette limite, de la prise en compte des services remplissant les conditions prévues à l'article 14 du même décret.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DÉPENS - DÉPENS - LITIGE EN MATIÈRE DE RECRUTEMENT ET DE GESTION DES PERSONNELS - COMPÉTENCE EXERCÉE AU NOM DE L'ETAT PAR LES PRÉSIDENTS D'UNIVERSITÉ SUR DÉLÉGATION DU MINISTRE (ART - L - 951-3 DU CODE DE L'ÉDUCATION) - CONSÉQUENCE - UNIVERSITÉ DEVANT ÊTRE CONSIDÉRÉE COMME PARTIE À L'INSTANCE - ABSENCE - CONSÉQUENCE - FRAIS IRRÉPÉTIBLES À LA CHARGE OU AU BÉNÉFICE DE L'ETAT - ET NON DE L'UNIVERSITÉ.

54-06-05-01 Les compétences déléguées en vertu de l'article L. 951-3 du code de l'éducation aux présidents des universités s'exerçant au nom de l'Etat, l'université n'a pas la qualité de défendeur dans une instance opposant un maître de conférence à une université l'employant s'agissant de son reclassement pris en application du décret n° 2009-642 du 23 avril 2009. Sa présence en qualité d'observateur ne lui confère pas davantage la qualité de partie, dès lors qu'elle n'aurait pas eu, à défaut d'être présente, qualité pour faire tierce-opposition à l'arrêt. Par suite, elle ne peut demander qu'il soit mis à la charge d'un requérant une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ni être condamnée à verser une somme au titre de ces mêmes dispositions.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DÉPENS - REMBOURSEMENT DES FRAIS NON COMPRIS DANS LES DÉPENS - LITIGE EN MATIÈRE DE RECRUTEMENT ET DE GESTION DES PERSONNELS - COMPÉTENCE EXERCÉE AU NOM DE L'ETAT PAR LES PRÉSIDENTS D'UNIVERSITÉ SUR DÉLÉGATION DU MINISTRE (ART - L - 951-3 DU CODE DE L'ÉDUCATION) - CONSÉQUENCE - UNIVERSITÉ DEVANT ÊTRE CONSIDÉRÉE COMME PARTIE À L'INSTANCE - ABSENCE - CONSÉQUENCE - FRAIS IRRÉPÉTIBLES À LA CHARGE OU AU BÉNÉFICE DE L'ETAT - ET NON DE L'UNIVERSITÉ.

54-06-05-11 Les compétences déléguées en vertu de l'article L. 951-3 du code de l'éducation aux présidents des universités s'exerçant au nom de l'Etat, l'université n'a pas la qualité de défendeur dans une instance opposant un maître de conférence à une université l'employant s'agissant de son reclassement pris en application du décret n° 2009-642 du 23 avril 2009. Sa présence en qualité d'observateur ne lui confère pas davantage la qualité de partie, dès lors qu'elle n'aurait pas eu, à défaut d'être présente, qualité pour faire tierce-opposition à l'arrêt. Par suite, elle ne peut demander qu'il soit mis à la charge d'un requérant une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ni être condamnée à verser une somme au titre de ces mêmes dispositions.


Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2018, n° 403554
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anissia Morel
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:403554.20180601
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award