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13/04/2018 | FRANCE | N°394261

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 13 avril 2018, 394261


Vu la procédure suivante :

La société But International a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction des cotisations de contribution économique territoriale auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 à 2012. Par un jugement nos 1308374, 1402869 du 15 décembre 2014, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15VE00398 du 15 septembre 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de la société But International, annulé ce jugement, réduit les cotisations de contributi

on économique territoriale auxquelles elle avait été assujettie en 2011 et 20...

Vu la procédure suivante :

La société But International a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction des cotisations de contribution économique territoriale auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 à 2012. Par un jugement nos 1308374, 1402869 du 15 décembre 2014, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15VE00398 du 15 septembre 2015, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de la société But International, annulé ce jugement, réduit les cotisations de contribution économique territoriale auxquelles elle avait été assujettie en 2011 et 2012 et rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 27 octobre 2015 et le 10 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er à 3 de cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société BUT International.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Simon Chassard, auditeur,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la société But International.

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 2 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, dispose que : " Sur demande du contribuable effectuée dans le délai légal de réclamation prévu pour la cotisation foncière des entreprises, la somme de la contribution économique territoriale, des taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat et de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux due par l'entreprise au titre des années 2010 à 2013 fait l'objet d'un dégrèvement lorsque cette somme, due au titre de l'année 2010, est supérieure de 500 € et de 10% à la somme des cotisations de taxe professionnelle et des taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat qui auraient été dues au titre de 2010 en application du présent code en vigueur au 31 décembre 2009 " et que : " Le dégrèvement s'applique sur la différence entre : / - la somme de la contribution économique territoriale, des taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat et de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux dues au titre de l'année 2010 ; / - et la somme, majorée de 10 %, des cotisations de taxe professionnelle, de taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat qui auraient été dues au titre de 2010 en application du présent code en vigueur au 31 décembre 2009, à l'exception des coefficients forfaitaires déterminés en application de l'article 1518 bis qui sont, dans tous les cas, ceux fixés au titre de 2010. / Il est égal à un pourcentage de cette différence, fixé à : / - 100 % pour les impositions établies au titre de 2010 ; / - 75 % pour les impositions établies au titre de 2011 ; / - 50 % pour les impositions établies au titre de 2012 ; / - 25 % pour les impositions établies au titre de 2013. ". D'autre part, aux termes de l'article 236-3 du code de commerce : " I. - La fusion ou la scission entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires, dans l'état où il se trouve à la date de réalisation définitive de l'opération. Elle entraîne simultanément l'acquisition, par les associés des sociétés qui disparaissent, de la qualité d'associés des sociétés bénéficiaires, dans les conditions déterminées par le contrat de fusion ou de scission. / (...). ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société But International a absorbé, le 31 décembre 2010, la société But France, laquelle avait au préalable absorbé, au cours du mois de janvier 2010, les sociétés But Exploitation, Européenne de diffusion, Sodico, Modimm, La Maison Verte et Maine Confort. Postérieurement à ces opérations de fusion, la société But International a sollicité, pour son compte propre et celui des sociétés absorbées, le bénéfice des dispositions de l'article 1674 C quinquies B du code général des impôts citées au point 1 ci-dessus. L'administration fiscale a accepté de faire droit à cette demande au titre de l'année 2010 mais n'a accordé, pour les années 2011 et 2012, le bénéfice du dégrèvement transitoire qu'au titre des droits de la société But International, sans prendre en compte ceux des sociétés qu'elle avait absorbées au cours de l'année 2010.

3. Pour juger que la société But International pouvait bénéficier des dégrèvements transitoires qui auraient été accordés, sans l'intervention des opérations de fusion mentionnées au point 2, aux sociétés qu'elle avait absorbées, la cour administrative d'appel de Versailles s'est fondée sur ce que le législateur n'avait pas entendu priver du bénéfice de ces dégrèvements les contribuables redevables de la contribution économique territoriale au 1er janvier 2010 dont les bases d'imposition auraient été ultérieurement modifiées, notamment par l'effet d'une fusion-absorption.

4. Les dispositions de l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts, qui instituent un dégrèvement imputé, au titre des années 2010 à 2013, sur les cotisations de contribution économique territoriale mises à la charge du redevable, bénéficient à l'entreprise qui, au 1er janvier de chacune de ces années, a la qualité de redevable de cette contribution. Il en résulte que lorsqu'une société redevable de la contribution économique territoriale au 1er janvier 2010 et satisfaisant, à cette date, aux conditions posées à l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts disparaît par l'effet d'une fusion-absorption, la société absorbante, venant aux droits et obligations de son absorbée, ne peut solliciter le dégrèvement litigieux qu'au titre des années pour lesquelles la société absorbée avait elle-même la qualité de redevable de la contribution économique territoriale. Il suit de là que les dispositions de l'article 1647 C quinquies B faisaient obstacle, contrairement à ce qu'a jugé la cour administrative d'appel de Versailles, à ce que la société But International obtienne le bénéfice des dégrèvements des années 2011 et 2012 pour le compte des sociétés qu'elle avait préalablement absorbées, qui n'étaient plus redevables de la contribution au titre de ces années et à l'actif desquelles, avant l'intervention de la fusion, le droit au bénéfice des dégrèvements litigieux n'aurait pu, d'ailleurs, faire l'objet d'aucune inscription.

5. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'en jugeant que la société But International pouvait bénéficier, en dépit de la dissolution sans liquidation des sociétés qu'elle avait absorbées, des dégrèvements dont auraient pu bénéficier ces dernières si cette dissolution n'était pas intervenue, la cour administrative d'appel de Versailles a commis une erreur de droit. Le ministre de l'action et des comptes publics est donc fondé à demander l'annulation des articles 1er à 3 de l'arrêt qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er à 3 de l'arrêt du 15 septembre 2015 de la cour administrative d'appel de Versailles sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics et à la société But International.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 394261
Date de la décision : 13/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 13 avr. 2018, n° 394261
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Simon Chassard
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:394261.20180413
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