Vu la procédure suivante :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 13 novembre 2008 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a prononcé son licenciement en fin de stage comme professeur de lycée professionnel, ainsi que la décision du 4 mars 2009 rejetant son recours gracieux. Par un jugement n° 0902020 du 9 juin 2010, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 14NC01568 du 10 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Nancy, statuant sur renvoi du Conseil d'Etat, a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 4 août et 4 novembre 2016 et le 24 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992 ;
- l'arrêté du 22 août 2005 modifié relatif au certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel ;
- l'arrêté du 22 août 2005 modifié relatif aux conditions d'accomplissement du stage et de la formation de certains personnels stagiaires de l'enseignement du second degré relevant du ministre chargé de l'éducation ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Puigserver, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Ricard, avocat de M. B...;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...B..., admis au concours d'accès au corps des professeurs de lycée professionnel au titre de la session 2007, a été licencié, à l'issue de sa première année de stage, par arrêté du ministre de l'éducation nationale du 13 novembre 2008. Par un jugement du 9 juin 2010, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté. M. B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 10 décembre 2015 par lequel la cour administrative de Nancy, statuant sur renvoi du Conseil d'Etat, a rejeté l'appel qu'il a formé contre ce jugement.
2. Aux termes des sixième et septième alinéas de l'article 10 du décret du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel, dans sa rédaction applicable à la décision litigieuse, " les professeurs de lycée professionnel stagiaires qui obtiennent le certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel sont titularisés par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle ils ont effectué leur stage./ A titre exceptionnel, le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage a été effectué peut autoriser l'accomplissement d'une seconde année de stage. A l'issue de cette période, l'intéressé est soit titularisé par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle il a effectué cette seconde année, soit licencié (...) ". En vertu de l'arrêté du 22 août 2005 relatif au certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel, un jury académique établit la liste des professeurs stagiaires qui ont obtenu le certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel et sont, en conséquence, admis à être titularisés. Pour les candidats non admis au certificat d'aptitude, " il formule un avis sur l'intérêt, au regard de l'aptitude professionnelle, d'autoriser le stagiaire à effectuer une seconde et dernière année de stage ".
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Nancy a omis de répondre au moyen, soulevé devant elle par M. B...et qui n'était pas inopérant, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision litigieuse en ne l'ayant pas autorisé à effectuer une seconde année de stage. Il en résulte que M. B... est fondé à soutenir que la cour a entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation et à en demander pour ce motif l'annulation, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi.
4. Aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ". Il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond.
5. Aux termes des dispositions combinées de l'article 3 de l'arrêté précité du 22 août 2005 relatif au certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel et de l'article 5-1 de l'arrêté du même jour relatif aux conditions d'accomplissement du stage et de la formation de certains personnels stagiaires de l'enseignement du second degré relevant du ministre chargé de l'éducation, dans leur rédaction applicable issue des arrêtés du 9 mai 2007 : " le jury académique se prononce après avoir pris connaissance des éléments du dossier de compétences du professeur stagiaire ", composé, pour les professeurs de lycée professionnel stagiaires qui accomplissent leur stage " en situation d'exercice des fonctions ", tels que M. B..., de " 1° l'avis de l'autorité responsable de la formation spécifique (...) rendant compte de la maîtrise des compétences attendues à la fin de l'année de stage (...) ; / 2° L'avis du chef de l'établissement au sein duquel s'est déroulé le stage en situation sur la manière de servir du stagiaire ;/ 3° L'avis d'un membre d'un des corps d'inspection./ L'avis prévu au 3° peut résulter d'une inspection ". L'article 4 de l'arrêté du 22 août 2005 relatif au certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel, dans sa rédaction applicable, prévoit que : " Les stagiaires non admis au certificat d'aptitude doivent avoir subi un entretien avec le jury ou avoir été inspectés. Le jury peut procéder à un entretien avec le stagiaire même si son dossier de compétences comporte un rapport d'inspection. "
6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le jury académique s'est prononcé après avoir entendu M. B...lors d'un entretien conformément à la procédure prévue par les dispositions précitées, alors en vigueur, de l'article 4 de l'arrêté du 22 août 2005 relatif au certificat d'aptitude au professorat professionnel, sans que le requérant puisse utilement se prévaloir, pour contester la régularité de cette procédure, de l'obligation qui pesait sur le jury de diligenter une inspection en vertu des dispositions de l'article 5 du même arrêté, antérieures à leur modification le 9 mai 2007 et qui n'étaient plus en vigueur à la date de la décision attaquée.
7. En deuxième lieu, aux termes du septième alinéa de l'article 10 du décret du 6 novembre 1992, cité au point 2, l'autorisation d'accomplir une deuxième année de stage relève d'une décision du recteur de l'académie, prise " à titre exceptionnel " après avis du jury académique. En l'espèce, le recteur de l'académie de Strasbourg doit être regardé comme ayant refusé d'autoriser M. B...à accomplir une seconde année de stage, par la décision qu'il a adressée à M. B...le 15 juillet 2008. Il ressort des mentions de cette décision, selon laquelle " le jury académique a proposé [son] licenciement " que le jury académique, qui a explicitement relevé que " son absence de réflexion pédagogique et de volonté de se former, son manque d'empathie pour les élèves de lycée professionnel ne plaident pas en faveur d'une prolongation de la formation de M. C... ", a nécessairement, ce faisant, entendu ne pas délivrer à l'intéressé le certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel et émettre un avis défavorable au renouvellement de son stage pour une deuxième année. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que la délibération du jury académique serait illégale faute pour celui-ci de s'être prononcé, d'une part, sur la délivrance du certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel et, d'autre part, sur l'éventualité de l'autoriser à accomplir une seconde année de stage.
8. En troisième lieu, si le requérant soutient qu'il n'a pas été évalué en toute équité et impartialité au cours de son stage, en raison notamment de l'attitude de sa conseillère pédagogique, les éléments dont il fait état ne sont pas de nature à établir un parti pris de cette dernière à son égard, alors au demeurant que le requérant lui-même se prévaut des éléments positifs ressortant des évaluations opérées par cette conseillère pédagogique, pour contester l'appréciation portée par le jury académique principalement fondée, outre sur l'avis du chef de l'établissement au sein duquel s'est déroulé son stage, sur le rapport d'inspection établi le 12 juin 2008 ainsi que sur la teneur de son entretien avec le jury.
9. En dernier lieu, si le requérant fait valoir que les évaluations opérées au cours et à l'issue de son stage par sa conseillère pédagogique et par des membres de l'institut universitaire de formation des maîtres attestent qu'il a acquis la quasi-totalité des compétences qui étaient attendues de lui, l'avis du chef de l'établissement au sein duquel s'est déroulé son stage, le rapport d'inspection établi le 12 juin 2008 ainsi que la teneur de son entretien avec le jury témoignent de difficultés comportementales sérieuses et d'une " attitude négative " qui, ainsi qu'il a été dit au point 7, faisait même obstacle, pour le jury académique, au renouvellement de son stage. Ainsi, ni le jury académique, ni le recteur de l'académie de Strasbourg qui ne se sont pas fondés sur des faits matériellement inexacts, n'ont commis une erreur manifeste d'appréciation en ne délivrant pas à M. B...le certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel à l'issue de sa première année de stage et en ne l'autorisant pas, à titre exceptionnel, à accomplir une seconde année de stage.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 13 novembre 2008 prononçant son licenciement, par voie de conséquence de la délibération du jury académique et du refus du recteur de l'académie de Strasbourg de l'autoriser à accomplir une seconde année de stage.
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 10 décembre 2015 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par M. B...devant la cour administrative d'appel de Nancy est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'éducation nationale.