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19/07/2017 | FRANCE | N°395243

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 19 juillet 2017, 395243


Vu la procédure suivante :

M. E...D..., agissant en son nom propre et en qualité de tuteur légal de M. B...D..., son frère, et Mme A...C..., néeD..., ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes à les indemniser des préjudices ayant résulté pour eux de l'accident subi par M. B...D...dans cet établissement le 6 octobre 2007. Par un jugement n° 1004982 du 28 mai 2014, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14NT01757 du 15 octobre 2015, la cour administrative d'appel de Nante

s, statuant sur l'appel des consortsD..., a rejeté leur requête.

Par un p...

Vu la procédure suivante :

M. E...D..., agissant en son nom propre et en qualité de tuteur légal de M. B...D..., son frère, et Mme A...C..., néeD..., ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes à les indemniser des préjudices ayant résulté pour eux de l'accident subi par M. B...D...dans cet établissement le 6 octobre 2007. Par un jugement n° 1004982 du 28 mai 2014, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14NT01757 du 15 octobre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes, statuant sur l'appel des consortsD..., a rejeté leur requête.

Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistré les 14 décembre 2015 et 12 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les consorts D...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Rennes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat des consorts D...et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier régional universitaire de Rennes.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...D...a subi le 6 octobre 2007, au cours d'une cure de sevrage alcoolique, une première crise d'épilepsie survenue à son domicile ; qu'il a été admis à 18h44 aux urgences du CHU de Rennes où il a été installé sur un brancard ; qu'à l'occasion d'une deuxième crise d'épilepsie survenue entre 19h00 et 20h30, il a chuté au sol et subi un traumatisme crânien ; que son frère, M. E...D..., agissant en qualité de tuteur légal, et sa soeur, Mme A...C..., imputant à cette chute les dommages neurologiques dont M. D...reste atteint, ont demandé au juge administratif de condamner le CHU de Rennes ou, à titre subsidiaire, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à les indemniser de leurs préjudices ; qu'ils se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 15 octobre 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur requête ;

Sur la prise en charge de M. D...au titre de la solidarité nationale :

2. Considérant que la cour administrative d'appel a jugé que la chute de M. D... ne pouvait être regardée comme un accident directement imputable à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins au sens des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ; qu'en se prononçant par ces motifs, elle a suffisamment motivé son refus de mettre la réparation des préjudices des consorts D...à la charge de l'ONIAM sur le fondement de ces dispositions ;

Sur la responsabilité pour faute du CHU de Rennes :

3. Considérant qu'il ressort du dossier soumis aux juges du fond, et notamment des recommandations de la Société française de médecine d'urgence, que la crise d'épilepsie survenue en contexte de sevrage alcoolique comporte un risque de récidive accru et justifie une surveillance particulière du patient ; que le CHU de Rennes, où M. D...était ordinairement suivi et où son état antérieur était connu, ne justifie d'aucun traitement ni d'aucune forme de surveillance organisée de ce patient après son admission, ni même de son installation dans des lieux permettant une surveillance occasionnelle ou incidente, alors que son placement sur un brancard dont les barrières de sécurité se trouvaient au minimum à 110 centimètres du sol était susceptible, en cas de chute, d'aggraver notablement les conséquences d'une nouvelle crise ; que l'absence de surveillance adéquate constituait, dans ces circonstances, une faute de nature à engager la responsabilité du CHU ; que par suite, en écartant toute faute de cet établissement aux motifs que l'installation de M. D...sur un brancard à 80 centimètres du sol était conforme aux bonnes pratiques en cas de crise épileptique et que seule la présence en permanence d'un membre du personnel hospitalier à son chevet, incompatible avec les moyens du service, aurait pu prévenir sa chute, la cour administrative d'appel a inexactement qualifié les faits de l'espèce ; que son arrêt doit par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, être annulé en tant qu'il statue sur la responsabilité du CHU de Rennes ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Rennes la somme de 1 500 euros chacun à verser à M. E...D...et à Mme C...au titre de l'article L. 761 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 15 octobre 2015 de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé en tant qu'il statue sur la responsabilité du CHU de Rennes.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Article 3 : Le CHU de Rennes versera la somme de 1 500 euros chacun à M. E...D...et à Mme C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des consorts D...est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. E...D..., à Mme A...C..., néeD..., au centre hospitalier universitaire de Rennes, à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 395243
Date de la décision : 19/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2017, n° 395243
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Florian Roussel
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : LE PRADO ; SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:395243.20170719
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