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19/07/2017 | FRANCE | N°395083

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 19 juillet 2017, 395083


Vu la procédure suivante :

L'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a demandé au tribunal administratif de Basse-Terre de condamner solidairement le centre hospitalier de la Basse-Terre et son assureur, la société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM), à lui verser la somme de 157 226,60 euros, correspondant aux indemnités transactionnelles versées à M. A...B...en vue de l'indemnisation des préjudices résultant de l'infection dont il a été victime, ainsi que la somme de 23 583,99 euros, c

orrespondant à la majoration prévue par les articles L. 1142-14 et L...

Vu la procédure suivante :

L'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a demandé au tribunal administratif de Basse-Terre de condamner solidairement le centre hospitalier de la Basse-Terre et son assureur, la société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM), à lui verser la somme de 157 226,60 euros, correspondant aux indemnités transactionnelles versées à M. A...B...en vue de l'indemnisation des préjudices résultant de l'infection dont il a été victime, ainsi que la somme de 23 583,99 euros, correspondant à la majoration prévue par les articles L. 1142-14 et L. 1142-15 du code de la santé publique. Par un jugement n° 1100657 du 23 octobre 2013, le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté la demande de l'ONIAM.

Par un arrêt n° 13BX03510 du 6 octobre 2015, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par l'ONIAM contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 décembre 2015 et 4 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ONIAM demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier de la Basse-Terre et de son assureur, la SHAM, le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l' ONIAM et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de la Basse-Terre.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'après avoir été victime d'une fracture ouverte de la jambe droite à l'issue d'une chute survenue le 2 août 2005 vers 18 heures, M. B...a été transporté au centre hospitalier (CH) de la Basse-Terre où il a subi, le lendemain à 8h50 un débridement, un lavage et une réduction de la fracture et une antibiothérapie ; qu'une nécrose de la face interne de la jambe et une infection s'étant produites, une amputation de la jambe a été réalisée le 24 août 2005 ; que, se fondant sur les conclusions de l'expert qu'elle avait désigné, la commission régionale de conciliation et d'indemnisation (CRCI) de Guadeloupe-Martinique a, le 17 juin 2008, émis l'avis que le CH de la Basse-Terre était responsable des dommages subis par M. B...et a transmis le dossier à son assureur pour qu'il fasse une offre d'indemnisation ; que la SHAM, assureur du centre hospitalier, ayant refusé de présenter une offre, l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) s'est substitué à l'assureur, en application de l'article L. 1442-15 du code de la santé publique, et a signé le 4 mars 2010 avec M. B... un protocole d'indemnisation transactionnelle par lequel celui-ci a accepté le versement de la somme globale de 157 226,60 euros ; que, par un jugement du 23 octobre 2013, le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté la demande de l'ONIAM, subrogé dans les droits de M.B..., tendant à la condamnation du CH de la Basse-Terre au paiement de cette somme, de frais d'expertise et d'une pénalité ; que l'ONIAM se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 octobre 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel dirigé contre ce jugement ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment du rapport d'expertise du 26 septembre 2007, complété le 6 juin 2008, que M. B..., qui présentait à son arrivée au CH de la Basse-Terre le 2 août 2005 à 20h30 une fracture du pilon tibial ouverte, stade II, avec des contusions cutanées à la face interne de la jambe, n'a pu être opéré que le 3 août 2005 à 8h50, après un délai de plus de douze heures, alors que selon les termes de l'expert, en cas de fracture ouverte dans un environnement septique comme en l'espèce, les opérations de parage, d'excision et de lavage doivent intervenir le plus rapidement possible, et si possible, dans un délai de six heures ;

3. Considérant que pour écarter toute faute du CH de la Basse-Terre dans la prise en charge de M.B..., la cour administrative d'appel a retenu qu'il n'avait pas été possible de réaliser plus rapidement l'opération qu'appelait l'état de celui-ci dès lors que le seul bloc opératoire dont disposait l'établissement était, au moment de la prise en charge de l'intéressé, occupé pour une césarienne et que si l'ONIAM faisait valoir que cette salle d'opération pouvait être remise en état opérationnel après la fin de la césarienne, il ne faisait état d'aucun risque exceptionnel qui aurait justifié un bouleversement des programmes d'utilisation du bloc opératoire ; que toutefois, le fait pour le centre hospitalier d'avoir été dans l'incapacité d'assurer l'opération du patient dans le délai qu'exigeait son état, en effectuant la remise en état opérationnelle de la salle d'opération immédiatement après la fin de la césarienne, révèle, alors que la situation à laquelle était confronté l'hôpital n'avait aucun caractère exceptionnel, une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier ; que, par suite, la cour, qui ne pouvait sans erreur de droit subordonner dans un tel cas l'existence d'une faute à celle d'un risque exceptionnel justifiant de modifier la programmation de l'utilisation du bloc opératoire, a, en estimant que le centre hospitalier n'avait commis aucune faute, inexactement qualifié les faits de l'espèce ; que son arrêt doit dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, être annulé :

4. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge solidairement du CH de la Basse-Terre et de son assureur, la SHAM, la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par l'ONIAM et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 6 octobre 2015 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Le centre hospitalier de la Basse-Terre et la SHAM verseront à l'ONIAM la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, au centre hospitalier de la Basse-Terre, à la société hospitalière des assurances mutuelles et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Guadeloupe.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 395083
Date de la décision : 19/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2017, n° 395083
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Florian Roussel
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP SEVAUX, MATHONNET ; LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:395083.20170719
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