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27/10/2016 | FRANCE | N°392171

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 27 octobre 2016, 392171


Vu la procédure suivante :

La société Cora a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la restitution de la taxe sur les surfaces commerciales qu'elle a acquittée au titre de l'année 2010 pour son établissement de Vesoul. Par un jugement n° 1300184 du 27 décembre 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14NC00338 du 4 juin 2015, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enreg

istrés les 29 juillet et 29 octobre 2015 ainsi que le 2 février 2016 au secrétariat du...

Vu la procédure suivante :

La société Cora a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la restitution de la taxe sur les surfaces commerciales qu'elle a acquittée au titre de l'année 2010 pour son établissement de Vesoul. Par un jugement n° 1300184 du 27 décembre 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14NC00338 du 4 juin 2015, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 juillet et 29 octobre 2015 ainsi que le 2 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Cora demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 ;

- la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 ;

- le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Simon Chassard, auditeur,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société Cora ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 octobre 2016, présentée pour la société Cora ;

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

1. D'une part, il ressort de l'examen de la minute de l'arrêt attaqué que le moyen tiré par la société requérante de ce que la cour aurait omis de viser et d'analyser le mémoire complémentaire qu'elle avait présenté le 29 avril 2015 manque en fait. D'autre part, la cour a répondu au moyen développé dans ce mémoire, tiré de l'incompétence du ministre du budget et des services de l'administration pour remédier aux imprécisions découlant de la loi du 13 juillet 1972 modifiée, qui avait, au demeurant, déjà été développé par la société requérante dans sa requête introductive d'instance. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêt doit également être écarté.

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

En ce qui concerne l'applicabilité des dispositions de la loi du 13 juillet 1972, dans leur rédaction issue de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 :

2. Les dispositions des articles 4 et 6 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, relatives à la taxe sur les surfaces commerciales, dans leur rédaction issue de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, prévoient respectivement que : " La taxe est déclarée et payée avant le 15 juin de l'année au titre de laquelle elle est due " et que : " La taxe est due par l'exploitant de l'établissement. Le fait générateur de la taxe est constitué par l'existence de l'établissement au 1er janvier de l'année au titre de laquelle elle est due. La taxe est exigible le 15 mai de la même année ". Si ces dispositions ont eu pour effet de modifier les règles applicables à l'imputabilité de la taxe sur les surfaces commerciales, à son fait générateur et à son exigibilité dans le temps, la loi du 30 décembre 2009 a maintenu, à l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972, des dispositions précises relatives à l'assiette et aux taux applicables. Les dispositions de cet article ayant été précisées par celles du décret du 26 janvier 1995 relatif à la taxe sur les surfaces commerciales prises pour son application, toujours en vigueur à la date à laquelle la société requérante a procédé au calcul de ses cotisations, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'elles ne comportaient aucune ambigüité susceptible d'empêcher les redevables de calculer le montant de la taxe à acquitter.

3. L'article 7 de la loi du 13 juillet 1972, dans sa rédaction issue de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, dispose que : " La taxe est recouvrée, contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe ". La cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que ces dispositions, qui renvoient aux règles applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sont suffisamment précises pour que les redevables de la taxe sur les surfaces commerciales identifient le service des impôts des entreprises auquel les déclarations, accompagnées du paiement de la taxe, doivent être adressées, c'est-à-dire le service des impôts des entreprises dans le ressort duquel est situé leur siège. Elle n'a pas non plus commis d'erreur de droit en jugeant sans incidence sur l'applicabilité immédiate de ces dispositions modifiées la circonstance qu'un communiqué de presse du 2 mars 2010 révèle que le ministre chargé du budget, qui n'avait pas compétence pour ce faire, avait alors confié le soin de recevoir les déclarations au service des impôts des entreprises dans le ressort duquel est situé chaque établissement à raison duquel une société est redevable de la taxe et non le service dans le ressort duquel est situé le siège de la société.

4. Il résulte de ce qui précède que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'application des modifications apportées à la loi du 13 juillet 1972 par l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 n'était pas rendue impossible par l'absence de décret d'application prévu par le B de cet article.

En ce qui concerne l'inopérance des moyens tirés de l'incompétence territoriale du service des impôts des entreprises et du comptable du Trésor public du centre des finances publiques de Vesoul :

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société requérante, suivant les prescriptions incompétemment édictées par le ministre chargé du budget dans le communiqué de presse du 2 mars 2010, a procédé à la déclaration et au paiement de la taxe sur les surfaces commerciales dont elle était redevable à raison du magasin de commerce de détail qu'elle exploite à Vesoul auprès du service des impôts des entreprises du centre des finances publiques de Vesoul. Elle faisait valoir, à l'appui de sa demande tendant à la restitution de cette taxe, que ce service était territorialement incompétent pour en recevoir déclaration et paiement, à la différence du service des impôts des entreprises du centre des finances publiques de Paris 8ème arrondissement, dans le ressort duquel est situé son siège. Toutefois, la circonstance que la taxe litigieuse aurait été déclarée et payée par la société requérante auprès d'un service des impôts des entreprises territorialement incompétent est sans incidence sur la légalité de celle-ci. Par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la société requérante ne pouvait utilement se prévaloir de l'incompétence territoriale du service des impôts des entreprises du centre des finances publiques de Vesoul.

6. En second lieu, la société faisait valoir devant la cour que le comptable public du centre départemental des impôts de Haute-Saône n'était pas compétent pour recevoir la déclaration accompagnée du paiement de la taxe sur les surfaces commerciales due par elle au titre de l'année 2010. Dès lors que ce moyen est relatif au contentieux du recouvrement, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'il ne pouvait être utilement invoqué par la société requérante dans le cadre du contentieux d'assiette qu'elle avait engagé.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société Cora doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi la société Cora est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Cora et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 392171
Date de la décision : 27/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - INCOMPÉTENCE TERRITORIALE DU SERVICE AUPRÈS DUQUEL L'IMPÔT EST DÉCLARÉ ET PAYÉ - INCIDENCE SUR LE BIEN FONDÉ DE L'IMPOSITION - ABSENCE.

19-01-03 La circonstance qu'une imposition aurait été déclarée et payée auprès d'un service territorialement incompétent est sans incidence sur la légalité de celle-ci.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - QUESTIONS COMMUNES - POUVOIRS DU JUGE FISCAL - 1) MOYEN TIRÉ DE L'INCOMPÉTENCE TERRITORIALE DU SERVICE AUPRÈS DUQUEL L'IMPÔT EST DÉCLARÉ ET PAYÉ - OPÉRANCE - ABSENCE - 2) MOYEN RELATIF AU CONTENTIEUX DU RECOUVREMENT - OPÉRANCE DANS LE CADRE D'UN CONTENTIEUX D'ASSIETTE - ABSENCE [RJ1].

19-02-01-02 1) La circonstance qu'une imposition aurait été déclarée et payée auprès d'un service territorialement incompétent est sans incidence sur la légalité de celle-ci.... ,,2) Un moyen tiré de l'incompétence du comptable public, dès lors qu'il est relatif au contentieux du recouvrement, ne peut être utilement invoqué dans le cadre d'un contentieux d'assiette.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - MOYENS - MOYENS INOPÉRANTS - 1) MOYEN TIRÉ DE L'INCOMPÉTENCE TERRITORIALE DU SERVICE AUPRÈS DUQUEL L'IMPÔT EST DÉCLARÉ ET PAYÉ - 2) MOYEN RELATIF AU CONTENTIEUX DU RECOUVREMENT SOULEVÉ DANS LE CADRE D'UN CONTENTIEUX D'ASSIETTE [RJ1].

54-07-01-04-03 1) La circonstance qu'une imposition aurait été déclarée et payée auprès d'un service territorialement incompétent est sans incidence sur la légalité de celle-ci.... ,,2) Un moyen tiré de l'incompétence du comptable public, dès lors qu'il est relatif au contentieux du recouvrement, ne peut être utilement invoqué dans le cadre d'un contentieux d'assiette.


Références :

[RJ1]

Rappr., sur le cas symétrique de l'inopérance d'un moyen relatif à l'assiette dans le cadre du contentieux du recouvrement, CE, 12 janvier 2004, Comité interprofessionnel du logement Solendi, n° 249938, T. p. 653-657. Ab. jur., sur l'irrecevabilité d'un tel moyen, CE, 28 juillet 2011, SA Affinerie de l'Est, n° 313279, aux Tables sur un autre point.


Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 2016, n° 392171
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Simon Chassard
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:392171.20161027
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