La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/2014 | FRANCE | N°367252

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 05 mars 2014, 367252


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 mars et 27 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour Mme C...A..., demeurant ... ; Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11NT02883 en date du 26 octobre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, d'une part, annulé le jugement n° 10-3763 du 1er septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 18 février 2010 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du dévelo

ppement solidaire rejetant sa demande de naturalisation, d'autre part, ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 mars et 27 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour Mme C...A..., demeurant ... ; Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11NT02883 en date du 26 octobre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, d'une part, annulé le jugement n° 10-3763 du 1er septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 18 février 2010 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire rejetant sa demande de naturalisation, d'autre part, rejeté sa demande devant le tribunal administratif de Nantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre de l'intérieur ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier Domino, Rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A...;

1. Considérant que lorsque le juge d'appel, saisi par le défendeur en première instance, censure le motif retenu par les premiers juges, il lui appartient, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens présentés par le demandeur en première instance, alors même qu'ils ne seraient pas repris dans les écritures produites, le cas échéant, devant lui, à la seule exception de ceux qui auraient été expressément abandonnés en appel ;

2. Considérant que, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir censuré le motif du jugement du tribunal administratif de Nantes qui constituait le soutien nécessaire du dispositif du jugement attaqué devant elle, a fait droit au recours du ministre de l'intérieur sans répondre au moyen que, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier qui lui était soumis, Mme A...avait soulevé en première instance et qui était tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision du 18 février 2010 rejetant sa demande de naturalisation ; que, par suite, Mme A...est fondée à soutenir que la cour a fait une inexacte application des règles rappelées ci-dessus ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé ;

3. Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " ...L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993 relatif à la manifestation de volonté, aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ;

5. Considérant que, pour rejeter la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par MmeA..., ressortissante mongole, le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur ce qu'elle entretiendrait des relations étroites avec des membres de l'ambassade de la République de Mongolie en France, incompatibles avec l'allégeance française ; que, pour justifier cette appréciation, il se prévaut notamment d'une note du 1er décembre 2008 du directeur des libertés publiques et des affaires juridiques au ministère de l'intérieur, de laquelle il ressort que Mme A...a été entendue en 2003 par les services de police français dans le cadre d'une procédure d'enlèvement de l'un de ses compatriotes sur le territoire français; qu'il ressort également de cette note que l'époux de l'intéressée avait déclaré que Mme A...lui imposait de maintenir des relations avec les représentants diplomatiques de son pays d'origine ;

6. Considérant, toutefois, que si l'intéressée reconnaît avoir été interpellée et placée en garde à vue le 16 septembre 2003 par les services de police français dans le cadre de l'affaire d'enlèvement mentionnée ci-dessus, elle affirme, sans être contredite, avoir été convoquée, le 28 novembre 2008, par les mêmes services et informée que l'affaire était, en ce qui la concerne, close; qu'elle conteste la réalité des éléments retenus par la note du ministère de l'intérieur ; que les relations éventuellement entretenues par l'intéressée avec des membres de l'ambassade de la république de Mongolie en France, notamment dans le cadre de ses fonctions d'interprète de langue mongole, ne sont pas, par elles-mêmes, de nature à créer un doute sur son loyalisme envers la France ; qu'ainsi le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a jugé que la décision du 18 février 2010 rejetant la demande de naturalisation de Mme A...était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et l'a annulée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 4 500 € que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens tant devant le Conseil d'Etat que devant la cour administrative d'appel de Nantes ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 26 octobre 2012 de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé.

Article 2 : L'appel du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 4 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme C...A...épouse B...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 367252
Date de la décision : 05/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mar. 2014, n° 367252
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:367252.20140305
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award