Vu le pourvoi, enregistré le 15 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 09/04604 du 8 juillet 2010 par lequel la cour régionale des pensions d'Amiens a, en premier lieu, infirmé le jugement rendu le 20 octobre 2009 par lequel le tribunal départemental des pensions de l'Aisne a rejeté la demande présentée par M. Jean-Luc A contre la décision du 14 avril 2008 par laquelle le service des pensions du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique a certifié que l'allocation n° 9 prévue à l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre devait lui être versée du 6 septembre 2001 au 27 juillet 2006, et qu'à compter du 28 juillet 2006, aucun paiement ne pouvait être effectué au titre de cette allocation et, en second lieu, ordonné que le versement de cette allocation reprenne à compter de cette dernière date ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le décret n° 61-443 du 2 mai 1961 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume Prévost, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. A,
- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boulloche, avocat de M. A ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il est alloué une allocation spéciale aux pensionnés qui se trouvent dans l'impossibilité médicalement constatée d'exercer une activité professionnelle quand cette impossibilité a sa cause déterminante dans une ou plusieurs infirmités incurables indemnisées au titre du présent code, si le reclassement social du pensionné est impossible et si celui-ci ne dispose pas par ailleurs, sous la forme d'une hospitalisation ou tout autrement, de ressources suffisantes. / Le reclassement social est réputé possible quand l'invalidité de l'intéressé ne met pas obstacle à sa rééducation professionnelle, éventuellement précédée de sa réadaptation fonctionnelle. / Cette allocation a pour effet de porter le montant global des ressources de ces pensionnés à des taux dont le plus élevé ne pourra excéder celui de la pension à l'indice 1500. / Un décret, pris dans la forme du décret en Conseil d'Etat, fixera les conditions d'application du présent article. " ; qu'en vertu de l'article 1er du décret du 2 mai 1961, pris pour l'application de ces dispositions, l'allocation spéciale qu'elles prévoient porte le numéro 9 ; qu'aux termes de l'article 5 de ce décret : " Les ressources sont considérées comme suffisantes : / a) soit lorsque le montant annuel des ressources personnelles de l'invalide, non compris la pension d'invalidité servie au titre du code, excède le montant correspondant à l'indice de pension 900 ; / b) soit lorsque l'invalide bénéficie d'un avantage de vieillesse faisant appel à une contribution des travailleurs et pouvant être considéré comme étant le prolongement d'un traitement ou d'un salaire. " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, si un pensionné vient à disposer de ressources personnelles, non compris la pension d'invalidité servie au titre du code, suffisantes, il ne peut plus prétendre au versement de cette allocation spéciale ;
Considérant que si, par arrêt devenu définitif en date du 27 juillet 2006, la cour régionale des pensions d'Amiens avait jugé que M. A répondait à la date du 6 septembre 2001 aux conditions d'obtention de l'allocation spéciale prévue à l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et que l'administration devait verser à l'intéressé cette allocation à compter de cette dernière date, le service des pensions du ministère de l'économie des finances et de l'industrie était fondé à décider qu'aucun paiement ne pouvait être effectué à ce titre à partir du 28 juillet 2006 dès lors qu'il constatait que le pensionné ne satisfaisait plus à cette date à la condition de ressources prévue par ces dispositions ; que, dès lors, en jugeant par l'arrêt attaqué que l'administration ne pouvait, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 27 juillet 2006, décider de suspendre le versement de cette allocation à compter du 28 juillet 2006, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 8 juillet 2010 par lequel la cour a ordonné que le versement de cette allocation reprenne à partir du 28 juillet 2006 ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'appel présenté par M. A à la cour régionale des pensions de Douai ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 8 juillet 2010 de la cour régionale des pensions d'Amiens est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour régionale des pensions de Douai.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Jean-Luc A.