Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 décembre 2009 et 11 janvier 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Serge A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 7 décembre 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, faisant droit à la demande présentée par la commune de Saint-Tropez, lui a enjoint de libérer dans un délai de quatre mois à compter de la notification de cette ordonnance les locaux appartenant à la commune situés sur les parcelles BH n° 88 et 90 sis route des plages à Saint-Tropez, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande présentée par la commune de Saint-Tropez devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulon ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Tropez le versement de la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 octobre 2010, présentée pour la commune de Saint-Tropez :
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Agnoux, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de Me Balat, avocat de M. A et de Me Gaschignard, avocat de la commune de Saint-Tropez,
- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Balat, avocat de M. A et à Me Gaschignard, avocat de la commune de Saint-Tropez ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ; que les mesures ainsi sollicitées ne doivent pas être manifestement insusceptibles de se rattacher à un litige relevant de la compétence de la juridiction administrative ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulon que, par une convention du 14 avril 1998, conclue pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, la commune de Saint-Tropez a mis à la disposition de M. A les locaux d'un bâtiment dit club house, situé à l'intérieur du centre de tennis communal Pierre-Philippot, dans lesquels le requérant exploite un bar-restaurant ; que la commune ayant fait connaître à M. A, le 22 octobre 2008, sa volonté de mettre fin à cette convention à compter du 14 avril 2009, ce dernier s'est toutefois maintenu dans les lieux après cette date ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 7 décembre 2009 par laquelle le juge des référés, faisant droit à la demande de la commune de Saint-Tropez présentée sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, lui a enjoint de libérer les locaux en cause dans un délai de quatre mois ;
Considérant que, pour répondre au moyen invoqué par M. A et tiré de ce que ces locaux n'appartenaient pas au domaine public, au motif que la commune n'établissait pas qu'ils auraient été affectés au service public, le juge des référés s'est borné à indiquer qu'ils étaient situés dans l'enceinte du centre de tennis, sur des parcelles appartenant au domaine public de la commune ; qu'en statuant ainsi, il a, eu égard à l'argumentation qui lui était soumise, insuffisamment motivé son ordonnance ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, M. A est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;
Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les locaux litigieux appartiennent à la commune de Saint-Tropez ; que ces locaux, qui se composent d'une salle de réception, d'une cuisine équipée, de toilettes ainsi que d'un appartement de fonction de trois pièces, sont situés dans l'enceinte du centre de tennis ; que, s'ils sont directement accessibles au public, y compris aux personnes extérieures au club de tennis, ainsi qu'en témoigne d'ailleurs la variété de la clientèle du restaurant, l'occupant était soumis, par la convention de mise à disposition conclue avec la commune, à des sujétions liées notamment à la tenue d'une permanence pour la location des courts de tennis et d'un état hebdomadaire des encaissements, à l'ouverture quotidienne du club house et des installations sportives, à la vérification de l'éclairage et de l'extinction des courts le soir, à l'aménagement d'un coin salon pour les membres du club de tennis et à l'organisation de repas pour ces membres ; qu'il en résulte que les locaux en cause ne sont pas manifestement insusceptibles d'être qualifiés de dépendances du domaine public dont le contentieux relève de la compétence de la juridiction administrative ; que M. A n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le juge administratif des référés est incompétent pour statuer sur la demande d'expulsion de cette dépendance présentée par la commune de Saint-Tropez ;
Considérant que la commune de Saint-Tropez ayant décidé, ainsi qu'il a été dit, de ne pas renouveler la convention l'autorisant à occuper le club house à compter du 14 avril 2009, M. A ne justifie plus, depuis cette date, d'aucun titre d'occupation régulier ; que son maintien dans les lieux fait obstacle à la réorganisation du centre sportif décidée par la commune dans le cadre de la reprise en régie directe de la gestion du club sportif ; que dans ces conditions, tant l'urgence que l'utilité de la mesure d'expulsion demandée par la commune de Saint-Tropez sont justifiées ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre à M. A d'évacuer les locaux qu'il occupe irrégulièrement dans le centre sportif communal dans un délai de quinze jours suivant la notification de la présente décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Tropez, qui n'est pas, dans la présence instance, la partie perdante, la somme que demande M. A ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. A le versement à la commune de Saint-Tropez de la somme de 3 000 euros ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulon en date du 7 décembre 2009 est annulée.
Article 2 : Il est enjoint à M. A de libérer, dans un délai de quinze jours à compter de la notification qui lui sera faite de la présente décision, les locaux qu'il occupe dans l'enceinte du centre de tennis Pierre-Philippot, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai.
Article 3 : M. A versera à la commune de Saint-Tropez la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par la commune de Saint-Tropez est rejeté.
Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Serge A et à la commune de Saint-Tropez.