Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juin et 22 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Charles A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 8 avril 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 1er juillet 2005 du tribunal administratif de Lyon rejetant ses conclusions tendant à la décharge des sommes de 234 206,84 euros et 91 904,01 euros mises à sa charge par deux titres de perception émis le 26 août 2003 par le président du conseil régional de Rhône-Alpes ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la région Rhône-Alpes la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Xavier Domino, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de M. A et de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la région Rhône-Alpes,
- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de M. A et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la région Rhône-Alpes ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par deux jugements du 26 juin 2001, le tribunal administratif de Lyon a, à la demande de M. Tête, annulé la délibération du 10 février 1989 par laquelle le bureau du conseil régional de Rhône-Alpes a autorisé le président de la région, M. Charles A, à signer au nom de la région un bail portant sur un logement destiné à lui servir d'appartement de fonction, la décision du président de la région de signer ce bail, ainsi que la délibération du 24 novembre 1989 par laquelle le bureau a autorisé le président du conseil régional à bénéficier d'un logement de fonction par nécessité absolue de service, au motif que l'avantage ainsi consenti à M. A était sans fondement légal ; que, par un troisième jugement du même jour, le tribunal administratif a rejeté la demande de M. Tête dirigée contre la délibération du 28 juillet 1995 de la commission permanente du conseil régional en ce qu'elle avait pour objet la mise à disposition de personnel de maison au profit de M. A ; que, par un jugement du 19 mars 2002, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les demandes en tierce opposition de M. A tendant à ce que soient déclarés non avenus les deux premiers jugements du 26 juin 2001 ; que, par ailleurs, par un premier arrêt du 10 juillet 2003, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le troisième jugement du 26 juin 2001 du tribunal administratif de Lyon mentionné ci-dessus, en tant qu'il a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de la délibération de la commission permanente du conseil régional du 28 juillet 1995, et annulé, comme dépourvue de tout fondement légal, cette délibération en ce qu'elle avait pour objet la mise à disposition de personnel de maison au profit de M. A ; qu'en outre, par deux arrêts des 10 juillet 2003 et 6 juillet 2004, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté les conclusions en tierce opposition portées devant elle par M. A tendant à faire juger que les décisions de justice mentionnées ci-dessus, annulant les avantages attribués à l'ancien président de la région comme dépourvus de fondement légal, étaient nulles et non avenues ; qu'enfin, par deux titres exécutoires du 26 août 2003, la région Rhône-Alpes a réclamé à M. A le paiement de sommes de 234 206,84 et 91 904,01 euros aux fins de remboursement des avantages résultant de la mise à disposition d'un logement et de personnel de service ; que, par un jugement du 1er juillet 2005, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de M. A tendant à la décharge des sommes en cause ; que, par un arrêt du 8 avril 2008, contre lequel M. A se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Lyon a confirmé ce jugement ;
Considérant, en premier lieu, qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il a été émis ; qu'en jugeant que les titres qui étaient contestés devant elle satisfaisaient à cette exigence, après avoir relevé qu'ils étaient accompagnés d'états détaillant les différentes sommes réclamées par la région et alors même qu'ils mentionnaient des décisions juridictionnelles qui n'avaient pas été notifiées à l'intéressé, la cour a porté une appréciation souveraine sur les pièces du dossier qui lui était soumis exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2277 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige : Se prescrivent par cinq ans les actions en paiement : / Des salaires ; / Des arrérages des rentes perpétuelles et viagères et de ceux des pensions alimentaires /Des loyers et des fermages / Des intérêts des sommes prêtées, et généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts ; qu'eu égard à la nature des liens entre un élu et une collectivité territoriale, l'action en paiement d'une collectivité territoriale contre un élu de cette collectivité aux fins de remboursement par ce dernier des avantages dont il a, en dehors de tout fondement légal, irrégulièrement bénéficié au titre de ses fonctions, n'est pas au nombre de celles qui sont mentionnées à l'article 2277, alors même que cette collectivité aurait elle-même payé le prix de ces avantages à des tiers par année ou à des termes périodiques plus courts ; que, par suite, en jugeant que l'article 2277 du code civil ne faisait pas obstacle à la répétition des sommes litigieuses au-delà du délai de cinq ans prévu par cet article, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en jugeant que la région était fondée à réclamer à M. A la valeur réelle des avantages dont il avait indûment bénéficié et que celui-ci n'établissait pas que ces avantages fussent d'un montant inférieur aux sommes acquittées par la région, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les faits qui lui étaient soumis ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la région Rhône-Alpes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. A la somme de 3 000 euros à verser à la région au même titre ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.
Article 2 : M. A versera à la région Rhône-Alpes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Charles A et à la région Rhône-Alpes.
Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.