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07/11/2008 | FRANCE | N°307412

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 07 novembre 2008, 307412


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet 2007 et 11 octobre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Michole A, demeurant ... et pour M. Martial B, demeurant route de Bernay, le Beau Soleil à LA VESPIERE (14290) ; Mlle A et M. B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 mai 2006 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du Consul Général de France à Yaoundé refusant à Melle A un

visa d'entrée en France ;

2°) d'enjoindre à l'autorité compétente de dé...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet 2007 et 11 octobre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Michole A, demeurant ... et pour M. Martial B, demeurant route de Bernay, le Beau Soleil à LA VESPIERE (14290) ; Mlle A et M. B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 mai 2006 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du Consul Général de France à Yaoundé refusant à Melle A un visa d'entrée en France ;

2°) d'enjoindre à l'autorité compétente de délivrer le visa sollicité ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP L. PARMENTIER-H.DIDIER de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 signée le 19 juin 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

Vu la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Denis Prieur, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Didier, Pinet, avocat M. Martial B,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire :

Considérant que M. B qui ne justifie d'aucun lien, ni familial, ni matrimonial, ni de concubinage avec Melle A, ne justifie d'aucune qualité lui conférant un intérêt pour agir ; que les conclusions qu'il présente à l'encontre de la décision contestée sont, dès lors, irrecevables ;

Considérant que Melle A, de nationalité camerounaise, a sollicité un visa de court séjour d'une durée de vingt-deux jours afin de pouvoir rendre régulièrement visite à son ami, M. B ; que, par une décision du 26 mai 2006, la commission de recours contre les décision de refus de visa d'entrée en France a confirmé le refus opposé par le consul général de France à Yaoundé et rejeté sa demande, en se fondant d'une part sur l'insuffisance des ressources du demandeur et d'autre part, sur le risque de détournement de l'objet du visa ;

Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions combinées de l'article L. 211-2 et du 8° de L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par dérogation aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, les décisions de refus de visa d'entrée en France, prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, ne sont pas motivées, sauf dans les cas où le visa est refusé à un étranger appartenant à l'une des catégories énumérées par cet article ; qu'il découle de ces dispositions que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, dont les décisions se substituent à celles des autorités diplomatiques ou consulaires qui lui sont déférées, n'est tenue, lorsqu'elle confirme un refus de visa opposé par lesdites autorités, de motiver sa décision que dans les cas limitativement énumérés par les dispositions susvisées ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Melle A relève de l'un de ces cas ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision n'est pas motivée doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que pour rejeter la demande de Melle A, la commission de recours contre les décision de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'insuffisance des ressources du demandeur et sur le risque de détournement de l'objet du visa ; que dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à la réalité du projet matrimonial des intéressés doit être écarté ;

Considérant en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que si la commission de recours a pu entacher sa décision d'une erreur d'appréciation dans l'évaluation des ressources dont justifiait Melle A, eu égard aux engagements pris par M. B elle aurait pris la même décision si elle s'était fondée uniquement sur le second motif de ce refus tiré du risque de détournement de l'objet du visa ; que si Melle A soutient vouloir venir en France pour rendre visite à son ami, elle envisageait néanmoins de conclure un pacte de solidarité civil avec celui-ci ; que, dans ces conditions, la commission de recours a pu, sans erreur manifeste d'appréciation, estimer que Melle A pouvait avoir un projet d'installation durable sur le territoire français ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la commission de recours a commis une erreur manifeste d'appréciation quant au risque de détournement de l'objet du visa doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que si Melle A soutient que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, il ressort des pièces du dossier que, d'une part, elle ne dispose d'aucune attache familiale en France, et que d'autre part, le centre de sa vie privée et familiale se trouve au Cameroun, pays dans lequel elle réside avec les membres de sa famille et possède un emploi ; que dans ces conditions et eu égard à l'objet du visa sollicité, qui est de rendre visite à un ami durant vingt-deux jours, la décision attaquée n'a pas porté au droit de Melle A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue desquels elle a été prise ; que si Melle A soutient également que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de son ami, M. B, elle ne peut en tout état de cause se prévaloir des conséquences éventuelles de la décision attaquée sur la vie privée d'un tiers ; que dès lors, le moyen tiré de ce que la décision de refus de visa qui lui a été opposé méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant, enfin, qu'au regard de l'objet du visa demandé qui est de rendre visite à un ami pendant une durée de vingt-deux jours, Melle A ne peut utilement soutenir que la décision contestée d'une part porte atteinte à son droit au mariage qu'elle tire de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'autre part est constitutive d'une discrimination prohibée par les dispositions de l'article 14 combinées avec celles des articles 8 et 12 de la même convention ; que dès lors ces moyens doivent être écartés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Melle A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 26 mai 2006 de la commission de recours contre les décision de refus de visa d'entrée en France ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que demandent Melle A et M. B en faveur de la SCP L. PARMENTIER-H. DIDIER, au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative pour les frais que la requérante aurait exposé si elle n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Melle A et de M. B est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Melle A, à M. B, et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 307412
Date de la décision : 07/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 nov. 2008, n° 307412
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur ?: M. Denis Prieur
Rapporteur public ?: M. Dacosta Bertrand
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:307412.20081107
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