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04/08/2006 | FRANCE | N°256015

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 04 août 2006, 256015


Vu, le recours, enregistré le 14 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 11 février 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 14 décembre 1998 rejetant la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision du directeur des services fiscaux de Paris Sud en date du 28 août 1996 refusant

de lui accorder une indemnité d'éloignement, ensemble ladite déc...

Vu, le recours, enregistré le 14 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 11 février 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 14 décembre 1998 rejetant la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision du directeur des services fiscaux de Paris Sud en date du 28 août 1996 refusant de lui accorder une indemnité d'éloignement, ensemble ladite décision et condamné l'Etat à verser 1000 euros à M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) statuant au fond, de rejeter la requête présentée par M. A devant la cour administrative d'appel de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Savoie, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A,

- les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6, alors en vigueur, du décret du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l'Etat en service dans les départements d'outre-mer : « Les fonctionnaires de l'Etat domiciliés dans un département d'outre-mer qui recevront une affectation en France métropolitaine à la suite de leur entrée dans l'administration, d'une promotion ou d'une mutation, percevront s'ils accomplissent une durée minimum de service de quatre années consécutives en métropole, une indemnité d'éloignement non renouvelable » ;

Considérant que l'arrêt attaqué, pour juger que M. A avait conservé en Guadeloupe le centre de ses intérêts matériels et moraux, a omis de tenir compte de l'importance de la durée du séjour de l'intéressé en métropole et à l'étranger ; que cet arrêt est par suite entaché d'erreur de droit ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est donc fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce que soutient M. A, la décision du directeur des services fiscaux de Paris Sud en date du 28 août 1996 était, en tout état de cause, suffisamment motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, que pour l'application des dispositions précitées de l'article 6 du décret du 22 décembre 1953, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge, de tenir compte non seulement de l'acquisition de biens, de la possession de comptes bancaires et de la résidence de la famille du requérant mais aussi de la durée du séjour en métropole ou à l'étranger pour déterminer le centre des intérêts matériels et moraux du fonctionnaire ;

Considérant que M. A, né le 6 décembre 1940 en Guadeloupe où il a été scolarisé jusqu'en 1959, a été recruté en janvier 1959 pour exercer comme militaire en métropole ; qu'il a servi hors de Guadeloupe d'abord alternativement en France et à l'étranger jusqu'au 11 octobre 1974, puis, après cette date, exclusivement en France métropolitaine, où il était domicilié à Orléans ; qu'il s'est marié en métropole et que ses enfants sont nés hors de Guadeloupe ; qu'après avoir obtenu son inscription sur la liste des emplois réservés comme agent de constatation des impôts en 1983, il a été admis à la retraite comme militaire en 1987 et a exercé en métropole divers emplois dans le secteur privé jusqu'à sa nomination, puis sa titularisation en 1992 et 1993 comme fonctionnaire des impôts à la direction des services fiscaux de Paris Sud ; qu'à la date de sa titularisation, il avait séjourné hors de Guadeloupe depuis trente-trois ans et de manière continue près de vingt ans en métropole ; que dans ces circonstances, et alors même que sa famille et celle de son épouse demeurent en Guadeloupe, que lui-même et son épouse y sont propriétaires de biens immobiliers, que l'un et l'autre y disposent de comptes bancaires, que des congés bonifiés lui ont été accordés lorsqu'il exerçait son activité militaire, M. A n'avait pas conservé dans ce département le centre de ses intérêts matériels et moraux, lorsqu'il a été titularisé le 4 octobre 1993 en qualité d'agent de constatation des impôts ;

Considérant, enfin que la décision attaquée n'est pas contraire au principe d'égalité du seul fait que d'autres agents se seraient vu reconnaître qu'ils disposaient en Guadeloupe du centre de leurs intérêts matériels et moraux ;

Considérant que M. A n'est par suite pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision en date du 28 août 1996 du directeur des services fiscaux de Paris Sud en tant qu'elle refusait de lui accorder le bénéfice d'une indemnité d'éloignement ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui ne peut être regardé comme la partie perdante, le versement à M. A de la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 11 février 2003 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par M. A devant la cour administrative d'appel de Paris et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... A et au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE.


Synthèse
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 256015
Date de la décision : 04/08/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 aoû. 2006, n° 256015
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Henri Savoie
Rapporteur public ?: Mlle Verot
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:256015.20060804
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