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22/03/2006 | FRANCE | N°264190

France | France, Conseil d'État, 2eme sous-section jugeant seule, 22 mars 2006, 264190


Vu la requête et les mémoires, enregistrés les 4 février, 8 mars et 14 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Abdelghani A, demeurant chez Mme B ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 31 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé, à la demande du ministre de l'intérieur, le jugement du 3 avril 2001 du tribunal administratif de Marseille ayant, d'une part, annulé la décision du 21 décembre 1998 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un certificat de r

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Vu la requête et les mémoires, enregistrés les 4 février, 8 mars et 14 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Abdelghani A, demeurant chez Mme B ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 31 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé, à la demande du ministre de l'intérieur, le jugement du 3 avril 2001 du tribunal administratif de Marseille ayant, d'une part, annulé la décision du 21 décembre 1998 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un certificat de résidence et enjoint audit préfet de délivrer à l'intéressé un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, d'autre part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de deux mois ;

2°) statuant au fond, de rejeter le recours présenté par le ministre de l'intérieur devant la cour administrative d'appel de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, dans sa rédaction issue du 2ème avenant signé le 28 septembre 1994 ;

Vu l'ordonnance n° 45 ;2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Martine Jodeau-Grymberg, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour demander l'annulation de l'arrêt attaqué, M. A soutient notamment que la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas répondu au moyen qu'il avait invoqué en défense devant elle et tiré de l'irrecevabilité, pour tardiveté, de l'appel formé par le ministre de l'intérieur ; que la cour a fait droit à l'appel interjeté par le ministre sans se prononcer sur ce moyen, qu'elle avait visé et qui n'était pas inopérant ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 31 décembre 2003 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par M. A :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement en date du 3 avril 2001 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 21 décembre 1998 refusant à M. A le certificat de résidence qu'il demandait, a été notifié au préfet des Bouches-du-Rhône le 19 avril 2001 ; que le recours formé par le ministre de l'intérieur à l'encontre de ce jugement a été enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 20 juin 2001, soit le jour où expirait le délai de recours contentieux de deux mois à compter de la notification du jugement contesté, qui est un délai franc ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que le recours formé par le ministre de l'intérieur à l'encontre du jugement du 3 avril 2001 serait tardif doit être écartée ;

Sur le fond :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, à la date à laquelle a été prise la décision préfectorale contestée, M. A était entré en France sous couvert d'un visa de trente jours depuis moins de deux mois ; qu'il était célibataire et sans charge de famille ; que si son plus jeune frère, titulaire d'un certificat de résidence, ainsi que sa mère et ses deux demi-soeurs, toutes trois de nationalité française, vivaient en France, il n'était pas dépourvu de toute attache familiale en Algérie, où résidait toujours son frère aîné et où lui-même avait vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans ; que, dans ces circonstances, la décision préfectorale litigieuse n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 21 décembre 1998 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a examiné la situation de M. A au regard des dispositions combinées des articles 7 bis et 9 de l'accord franco-algérien, modifié, et qu'il a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé au regard de ces dispositions ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que, M. A n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations combinées des articles 7 bis et 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans sa rédaction issue de l'avenant du 28 septembre 1994, le préfet des Bouches-du-Rhône n'était pas tenu, en application des dispositions de l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945, alors en vigueur, de soumettre son dossier à la commission du titre de séjour avant de prendre la décision de refus de certificat de résidence contestée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure suivie aurait été irrégulière doit être écarté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône ne s'est pas estimé lié par l'absence de visa de long séjour de M. A pour lui opposer la décision de refus litigieuse ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il aurait commis une erreur de droit en méconnaissant l'étendue de sa compétence doit être écarté ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. A ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 21 décembre 1998 refusant un certificat de résidence à M. A et a enjoint à ce préfet de délivrer à M. A un certificat de résidence dans un délai de deux mois ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 31 décembre 2003 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 3 avril 2001 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Abdelghani A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 2eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 264190
Date de la décision : 22/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 mar. 2006, n° 264190
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Martine Jodeau-Grymberg
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:264190.20060322
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