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17/12/2004 | FRANCE | N°257597

France | France, Conseil d'État, 5eme et 4eme sous-sections reunies, 17 décembre 2004, 257597


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 juin et 8 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Isabelle X..., docteur en pharmacie, demeurant ... ; Mlle X... demande au Conseil d'Etat :

1) d'annuler la décision du 20 mars 2003 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens a réduit de 6 mois à 3 mois la sanction de l'interdiction de servir des prestations aux assurés sociaux prononcée à son encontre le 1er juin 2001 par la section des assurances sociales du c

onseil régional d'Aquitaine, sanction qui sera exécutoire à compte...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 juin et 8 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Isabelle X..., docteur en pharmacie, demeurant ... ; Mlle X... demande au Conseil d'Etat :

1) d'annuler la décision du 20 mars 2003 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens a réduit de 6 mois à 3 mois la sanction de l'interdiction de servir des prestations aux assurés sociaux prononcée à son encontre le 1er juin 2001 par la section des assurances sociales du conseil régional d'Aquitaine, sanction qui sera exécutoire à compter du 1er septembre 2003 ;

2) de mettre à la charge de la caisse nationale d'assurance maladie la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Herbert Maisl, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mlle X... et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du conseil national de l'Ordre des pharmaciens,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour prendre la décision attaquée prononçant à l'encontre de Mlle X... la sanction de l'interdiction de servir des prestations aux assurés sociaux pendant une durée de 3 mois, la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens a pris en compte le fait que les produits délivrés par celle-ci, prescrits sous forme de cures courtes et répétitives, ne constituent en rien un traitement de sevrage du dopage mais offrent, au contraire, aux personnes dopées les moyens pharmacologiques leur permettant de poursuivre une pratique néfaste pour leur santé ; que celle-ci a également pris en compte la circonstance aggravante tenant à la négligence dont Mlle X... a fait montre dans la transcription des préparations magistrales à l'ordonnancier ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 5015-60 du code de la santé publique : Lorsque l'intérêt du patient lui paraît l'exiger, le pharmacien doit refuser de dispenser un médicament. Si ce médicament est prescrit sur une ordonnance, le pharmacien doit informer immédiatement le prescripteur de son refus et le mentionner sur l'ordonnance ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en estimant que l'argumentation de Mlle X... était en contradiction avec ses actes dès lors qu'elle évoque les prescriptions parfaitement établies du Dr Y tout en ayant systématiquement procédé à une diminution des posologies prescrites, la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens n'a pas dénaturé les pièces du dossier ; que la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens a pu, sans entacher sa décision d'une contradiction de motifs, estimer à la fois que Mlle X... avait une confiance toute relative dans les prescriptions du Dr. Y puisqu'elle réduisait fréquemment les doses prescrites et qu'elle avait néanmoins accordé à celui-ci une trop large confiance, en continuant, malgré ses doutes, de délivrer ces produits ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article R. 5015-60 du code de la santé publique imposent au pharmacien de refuser de dispenser un médicament lorsque l'intérêt du patient lui paraît l'exiger et d'informer de ce refus le prescripteur ; que la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens, par une appréciation souveraine, a pu estimer que les traitements prescrits présentaient un caractère nocif et juger, sans entacher sa décision d'une erreur de qualification juridique, que le fait, pour Mlle X..., de ne pas avoir refusé de délivrer les médicaments en cause, était constitutif d'une faute ;

Considérant, en troisième lieu, que, si Mlle X... reproche à la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens de ne pas avoir répondu à son argument selon lequel le conseil régional de l'Ordre des médecins d'Aquitaine, par une décision jointe à son mémoire et mentionnée dans les visas, n'ayant relevé aucune faute à l'encontre du Dr Y, prescripteur des traitements en cause, toute faute liée à la délivrance de ces traitements aurait dû être écartée, le conseil national de l'Ordre des pharmaciens n'a pas entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, dès lors qu'il s'est prononcé de manière précise et circonstanciée sur les raisons pour lesquelles les prescriptions en cause étaient injustifiées et dangereuses, répondant ainsi au moyen de Mlle X... selon lequel les prescriptions en cause n'étaient pas anormales ;

Considérant enfin, que la section des assurances sociales du conseil national de l'Ordre des pharmaciens n'a pas inexactement qualifié les faits en estimant que le comportement ainsi reproché à Mlle X... était contraire à l'honneur professionnel et se trouvait exclu du bénéfice de l'amnistie prévue par la loi du 6 août 2002 ;

Sur les conclusions de Mlle X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la caisse nationale d'assurance maladie qui, en tout état de cause, n'est pas dans la présente instance la partie perdante la somme que demande Mlle X... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mlle X... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Isabelle X..., au conseil national de l'Ordre des pharmaciens et au ministre des solidarités, de la santé et de la famille.


Synthèse
Formation : 5eme et 4eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 257597
Date de la décision : 17/12/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 déc. 2004, n° 257597
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Herbert Maisl
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:257597.20041217
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