Vu la requête, enregistrée le 25 septembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le PREFET DU BAS-RHIN demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 août 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 12 août 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Louiza A, épouse B ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Chadelat, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à la date à laquelle le PREFET DU BAS-RHIN a refusé un certificat de résidence à Mme B, le dernier avenant à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, signé le 11 juillet 2001, n'était pas encore entré en vigueur, contrairement à ce que soutient Mme B ; qu'aux termes de l'article 7 bis de cet accord, dans sa rédaction issue de l'avenant du 28 septembre 1994, alors en vigueur : Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit : b) ... aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge et qu'aux termes de l'article 9 du même accord : Pour être admis à entrer et à séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7bis alinéa 4 (lettres a à d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ;
Considérant que, pour annuler l'arrêté du PREFET DU BAS-RHIN décidant la reconduite à la frontière de Mme B, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur la circonstance que la décision du PREFET DU BAS-RHIN en date du 19 mars 2002 refusant à Mme B le certificat de résidence qu'elle demandait en qualité d'ascendante à charge ou de visiteur était illégal dès lors que Mme B pouvait être regardée comme ascendante à charge de son fils de nationalité française ; qu'il ressort toutefois des motifs de la décision litigieuse que, pour refuser le certificat de résidence sollicité, le PREFET DU BAS-RHIN s'est fondé non seulement sur ce que Mme B n'était pas à la charge de son fils de nationalité française mais également sur ce qu'elle n'était pas titulaire d'un visa de long séjour ; qu'en n'examinant pas si ce dernier motif n'était pas de nature à justifier légalement le refus litigieux, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a entaché son jugement d'une erreur de droit ; qu'ainsi, le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur ce que Mme B remplissait les conditions de délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'ascendante à charge de français et s'était ainsi vu refuser illégalement le certificat qu'elle demandait, pour annuler son arrêté du 12 août 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressée ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B ;
Sur l'exception d'illégalité de la décision du PREFET DU BAS-RHIN en date du 19 mars 2002 refusant à Mme B la délivrance d'un certificat de résidence :
Considérant qu'il est constant que Mme B, à supposer même qu'elle puisse être regardée comme ascendante à charge de son fils français ou se voir reconnaître la qualité de visiteur, n'était pas titulaire du visa de long séjour exigé par l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié pour pouvoir bénéficier d'un certificat de résidence portant la mention ascendant à charge ou visiteur ; que, par suite, le PREFET DU BAS-RHIN a pu légalement se fonder sur ce motif pour refuser à Mme B le certificat de résidence qu'elle sollicitait ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Considérant que si Mme B fait valoir que ses deux enfants sont français et que sa fille souffre de migraines invalidantes qui rendent nécessaire sa présence à ses côtés, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée, titulaire d'un visa de circulation, peut venir rendre visite à ses enfants en France et n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où réside en particulier son époux ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et méconnaîtrait, ce faisant, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 12 août 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme B ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme B la somme que celle-ci demande au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 22 août 2002 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de Mme B tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU BAS-RHIN, à Mme Louiza B et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.