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09/04/2004 | FRANCE | N°263145

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 09 avril 2004, 263145


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 décembre 2003 et 12 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 12 décembre 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Mamoudzou a rejeté, sur le fondement de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, sa demande tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 4 novembre 2003 du préfet de Mayotte mettant fin à son détachement

à compter du 1er janvier 2004, et d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 décembre 2003 et 12 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 12 décembre 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Mamoudzou a rejeté, sur le fondement de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, sa demande tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 4 novembre 2003 du préfet de Mayotte mettant fin à son détachement à compter du 1er janvier 2004, et d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la collectivité départementale de Mayotte de prendre en charge son traitement jusqu'au règlement définitif de sa situation administrative, et, enfin, de dire que son détachement auprès de la collectivité départementale de Mayotte expirera le 31 mars 2007 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu la loi programme pour l'outre-mer n° 2003-660 du 21 juillet 2003 modifiant la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Herry, Auditeur,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. X et de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat du préfet de Mayotte,

- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; qu'aux termes de l'article L. 522-3 du code de justice administrative : Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée, sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ;

Considérant que pour rejeter la demande de M. X tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté en date du 4 novembre 2003 par lequel le préfet de Mayotte a mis fin à son détachement à compter du 1er janvier 2004, le juge des référés du tribunal administratif de Mamoudzou s'est borné à relever qu'au regard des moyens invoqués par le requérant à l'appui de sa demande, dépourvus de toutes précisions et justifications, il apparaissait manifeste que celle-ci était mal fondée ; qu'il ressort toutefois du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Mamoudzou que M. X exposait dans sa requête les circonstances de fait et de droit constituant le fondement de sa demande ; qu'il produisait en outre un certain nombre de pièces à l'appui de son argumentation ; qu'ainsi, en estimant que les moyens soulevés à l'appui de sa demande par le requérant étaient dépourvus de toutes précisions et justifications, le juge des référés du tribunal administratif de Mamoudzou a dénaturé les pièces du dossier soumis à son examen ; que par suite, M. X est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. X ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension par le juge des référés de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée, notamment, à la condition que l'urgence le justifie ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

Considérant que l'arrêté mettant fin à la mise à disposition de M. X est fondé sur le seul motif que l'intéressé aurait atteint l'âge limite de la retraite, à savoir cinquante-cinq ans, à compter du 1er janvier 2004 ; que, compte tenu de ce motif et dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard aux effets produits par l'application de la décision dont la suspension est demandée sur la situation professionnelle et personnelle du requérant, la condition d'urgence doit être regardée comme remplie ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'arrêté du 16 mars 1977 du préfet de Mayotte relatif à la caisse de retraite des fonctionnaires et des agents de la collectivité publique de Mayotte : Le droit à pension pour ancienneté de service est acquis, lorsque se trouve remplie, à la cessation de l'activité, la double condition de cinquante-cinq ans d'âge et de trente ans de services effectifs ; que le préfet de Mayotte s'est fondé sur ces dispositions pour mettre fin au détachement de M. X dès lors que celui-ci aurait atteint l'âge de cinquante-cinq ans le 1er janvier 2004 ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 64-1 de la loi du 11 juillet 2001 relative à Mayotte modifiée par la loi de programme pour l'outre-mer du 21 juillet 2003 : Sont applicables aux agents de la collectivité départementale, des communes et des établissements publics administratifs de Mayotte, selon les modalités définies ci-après, les dispositions de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ainsi que celles : / de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale pour les agents exerçant des fonctions ressortissant à la compétence des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de ladite loi. Pour son application la collectivité départementale de Mayotte est considérée comme mentionnée audit article ; qu'il résulte de ces dispositions que le moyen soulevé par M. X, tiré de ce qu'il serait régi par les dispositions de droit commun en matière de départ à la retraite et non par les dispositions spéciales prévues par l'arrêté précité est, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté du préfet de Mayotte dont la suspension est demandée ;

Considérant que les deux conditions fixées par les dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative étant remplies, il y a lieu de suspendre l'exécution de l'arrêté du 4 novembre 2003 du préfet de Mayotte mettant fin au détachement de M. X à compter du 1er janvier 2004, jusqu'à ce qu'il soit statué sur les conclusions tendant à son annulation ;

Sur les conclusions tenant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande la collectivité départementale de Mayotte au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de M. X qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante et, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la collectivité départementale de Mayotte la somme de 3 000 euros que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance en date du 12 décembre 2003 du juge des référés du tribunal administratif de Mamoudzou est annulée.

Article 2 : L'exécution de l'arrêté du 4 novembre 2003 du préfet de Mayotte est suspendue.

Article 3 : La collectivité départementale de Mayotte versera à M. X une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la collectivité départementale de Mayotte tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X, au préfet de Mayotte et au ministre de l'outre-mer.


Synthèse
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 263145
Date de la décision : 09/04/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 avr. 2004, n° 263145
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: Mlle Laurence Herry
Rapporteur public ?: Mme Boissard
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:263145.20040409
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