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25/04/2003 | FRANCE | N°237601

France | France, Conseil d'État, 2eme et 1ere sous-sections reunies, 25 avril 2003, 237601


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2001, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le 24 août 2001, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris transmet au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal le 22 juin 2001 pour M. et Mme Daniel X ;

Vu la demande présentée à ce tribunal le 22 juin 2001 ainsi que la requête enregistrée au greffe du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 2 août et 9 décembre 2002, présentée pour M. et Mme Daniel X demeuran

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1°) la condamnation de l'Etat à leur v...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2001, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le 24 août 2001, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris transmet au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal le 22 juin 2001 pour M. et Mme Daniel X ;

Vu la demande présentée à ce tribunal le 22 juin 2001 ainsi que la requête enregistrée au greffe du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 2 août et 9 décembre 2002, présentée pour M. et Mme Daniel X demeurant ... ; M. et Mme X demandent :

1°) la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 4 456,70 euros augmentée des intérêts de droit à compter du 11 novembre 1993 en réparation du préjudice matériel subi et la somme de 760 euros en réparation du préjudice moral résultant de l'obligation dans laquelle ils se sont trouvés de devoir quitter l'Algérie en novembre 1993 ;

2°) la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 2 100 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Le Prado, avocat de M. X,

- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant que M. X, qui occupait le poste de directeur de l'école Pierre et Marie Curie à Annaba (Algérie), et son épouse, demandent réparation à l'Etat de la perte d'une partie de leurs effets mobiliers restés en Algérie après leur retour en France ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'ayant été destinataires de menaces de mort authentifiées, les époux X ont reçu instruction de la part des autorités françaises de quitter d'urgence leur pays de résidence, ce qu'ils ont fait à la mi-novembre 1993 ; qu'ils n'ont pu, dans ces conditions, organiser avant leur départ le déménagement de leurs meubles et effets personnels ; que pour des raisons tenant à leur propre sécurité, ils n'ont pas, par la suite, été autorisés à se rendre en Algérie et n'ont pas pu récupérer ce qui leur appartenait ; que dans le courant de l'année 2000, à la suite de la restitution de l'établissement scolaire aux autorités algériennes, l'appartement de fonction qu'ils y occupaient a été vidé et une partie de son contenu transporté à Alger sur ordre des autorités françaises ; qu'en raison des délais mis par l'administration à organiser ce transfert, une partie des meubles et objets a été endommagée ou perdue ; que la négligence de l'administration pendant sept ans à mettre en sécurité les biens des époux X et à en organiser la restitution, malgré les demandes réitérées de ces derniers et alors que l'administration n'invoque aucune circonstance particulière justifiant de difficultés à y satisfaire, est constitutive d'une faute qui engage la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'il est constant que l'indemnité forfaitaire de déménagement et d'aide à la réinstallation d'un montant de 35 000 F versée au époux X par le comité d'entraide aux Français rapatriés n'avait pas pour objet de réparer le préjudice dont ils demandent l'indemnisation dans la présente instance ; qu'ils n'ont reçu aucune indemnisation pour le dommage matériel qu'ils ont supporté ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice matériel et moral subi par eux en évaluant celui-ci à 5 000 euros tous intérêts compris au jour de la présente décision ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à payer aux époux X la somme de 760 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'Etat est condamné à verser aux époux X la somme de 5 000 euros.

Article 2 : L'Etat versera aux époux X la somme de 760 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête des époux X est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Daniel X et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 2eme et 1ere sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 237601
Date de la décision : 25/04/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CONTENTIEUX DE LA FONCTION PUBLIQUE - CONTENTIEUX DE L'INDEMNITÉ - FONCTIONNAIRES AYANT REÇU INSTRUCTION DE QUITTER D'URGENCE LEUR PAYS DE RÉSIDENCE ET DONT UNE PARTIE DES MEUBLES ET EFFETS PERSONNELS A ÉTÉ PERDUE OU ENDOMMAGÉE - A) RESPONSABILITÉ SANS FAUTE POUR RISQUE EXCEPTIONNEL - ABSENCE (SOL - IMPL - ) [RJ1] - B) NÉGLIGENCE DE L'ADMINISTRATION PENDANT PLUSIEURS ANNÉES À METTRE EN SÉCURITÉ LEURS BIENS - FAUTE DE NATURE À ENGAGER LA RESPONSABILITÉ DE L'ETAT - EXISTENCE.

36-13-03 Fonctionnaires, destinataires de menaces de mort, ayant reçu instruction de la part des autorités françaises de quitter d'urgence leur pays de résidence et n'ayant pu ainsi organiser le déménagement de leurs meubles et effets personnels, dont une partie a été par la suite perdue ou endommagée.,,a) Les intéressés n'ont pas été placés dans une situation comportant pour eux comme pour leurs biens des risques exceptionnels qui justifieraient que le préjudice supporté fût de nature à leur ouvrir droit à réparation sur le fondement du principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques.... ...b) La négligence de l'administration pendant sept ans à mettre en sécurité leurs biens et à en organiser la restitution, malgré les demandes réitérées des intéressés et alors que l'administration n'invoque aucune circonstance particulière justifiant de difficultés à y satisfaire, est constitutive d'une faute qui engage la responsabilité de l'Etat.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITÉ - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITÉ - RESPONSABILITÉ SANS FAUTE - RESPONSABILITÉ FONDÉE SUR L'ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES - RESPONSABILITÉ SANS FAUTE POUR RISQUE EXCEPTIONNEL - ABSENCE (SOL - IMPL - ) - FONCTIONNAIRES AYANT REÇU INSTRUCTION DE QUITTER D'URGENCE LEUR PAYS DE RÉSIDENCE ET DONT UNE PARTIE DES MEUBLES ET EFFETS PERSONNELS A ÉTÉ PERDUE OU ENDOMMAGÉE [RJ1].

60-01-02-01-01 Fonctionnaires, destinataires de menaces de mort, ayant reçu instruction de la part des autorités françaises de quitter d'urgence leur pays de résidence et n'ayant pu ainsi organiser le déménagement de leurs meubles et effets personnels, dont une partie a été par la suite perdue ou endommagée. Les intéressés n'ont pas été placés dans une situation comportant pour eux comme pour leurs biens des risques exceptionnels qui justifieraient que le préjudice supporté fût de nature à leur ouvrir droit à réparation sur le fondement du principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITÉ - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RETARDS - FONCTIONNAIRES AYANT REÇU INSTRUCTION DE QUITTER D'URGENCE LEUR PAYS DE RÉSIDENCE ET DONT UNE PARTIE DES MEUBLES ET EFFETS PERSONNELS A ÉTÉ PERDUE OU ENDOMMAGÉE - NÉGLIGENCE DE L'ADMINISTRATION PENDANT PLUSIEURS ANNÉES À METTRE EN SÉCURITÉ LEURS BIENS - FAUTE DE NATURE À ENGAGER LA RESPONSABILITÉ DE L'ETAT - EXISTENCE.

60-01-03-01 Fonctionnaires, destinataires de menaces de mort, ayant reçu instruction de la part des autorités françaises de quitter d'urgence leur pays de résidence et n'ayant pu ainsi organiser le déménagement de leurs meubles et effets personnels, dont une partie a été par la suite perdue ou endommagée. La négligence de l'administration pendant sept ans à mettre en sécurité leurs biens et à en organiser la restitution, malgré les demandes réitérées des intéressés et alors que l'administration n'invoque aucune circonstance particulière justifiant de difficultés à y satisfaire, est constitutive d'une faute qui engage la responsabilité de l'Etat.


Références :

[RJ1]

Cf. sol. contr. Section, 19 octobre 1962, Sieur Perruche, p. 555 ;

Assemblée, 16 octobre 1970, Epoux Martin, p. 593.


Publications
Proposition de citation : CE, 25 avr. 2003, n° 237601
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:237601.20030425
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