Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 3 avril 1998 et le 28 juillet 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel X..., domicilié à la Trésorerie de Tallard et Remollon, à Tallard (05130) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt n° 18121 en date du 18 décembre 1997 par lequel la Cour des comptes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement en date du 19 mars 1997 par lequel la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes l'a constitué, en sa qualité de comptable de la commune, débiteur de la commune de Corps de la somme de 200 000 F augmentée des intérêts de droit au taux légal à compter de la date à laquelle il a payé ladite somme ;
2°) statuant par la voie de l'évocation, le décharge de toute dette à l'égard de la commune de Corps ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié ;
Vu le décret n° 83-16 du 13 janvier 1983 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fanachi, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique : "Les comptables sont tenus d'exercer : .../ B. En matière de dépenses, le contrôle : / ... De la validité de la créance dans les conditions prévues à l'article 13 ci-après ..." et qu'aux termes de cet article 13 : "En ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : / La justification du service fait et l'exactitude des calculs de liquidation ; / L'intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications ..." ; que l'article 1er du décret du 13 janvier 1983 portant établissement de la liste des pièces justificatives des paiements des communes, des départements et des établissements publics locaux dispose qu'avant de procéder au paiement d'une dépense, les comptables ne doivent exiger que les pièces justificatives prévues pour la dépense correspondante dans la liste annexée audit décret ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si le comptable n'a pas le pouvoir de se faire juge de la légalité des décisions administratives qui servent de fondement au mandat de paiement, il doit, afin d'exercer son contrôle sur la production des justifications du service fait, être en mesure d'identifier la nature de la dépense ; que ce contrôle doit conduire le comptable, dans la mesure où les pièces justificatives produites sont à cet égard contradictoires, à suspendre le paiement jusqu'à ce que l'ordonnateur lui ait produit, à cet effet, les justifications nécessaires ;
Considérant que la Cour des comptes, pour confirmer par l'arrêt attaqué le jugement par lequel la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes a constitué M. X..., en sa qualité de comptable de la commune de Corps, débiteur envers celle-ci de la somme de 200 000 F, a constaté qu'au vu des pièces, qui lui avaient été transmises à l'appui du mandat de paiement signé par le maire de Corps, le comptable n'avait pu identifier la nature de la dépense, et n'avait donc pu exercer le contrôle des justifications du service fait que l'ordonnateur lui produisait, et a relevé que les justifications produites à l'appui du mandat de paiement à la société Agecom de 200 000 F étaient entachées de contradictions et d'incertitudes ; qu'en l'état de ces constatations qui ne relèvent que d'elle, la cour a pu légalement considérer que, devant l'incertitude et la contradiction des pièces jointes au mandat, le comptable aurait dû suspendre le paiement et que, faute de l'avoir fait, il devait être déclaré débiteur à l'égard de la commune ;
Considérant que la Cour des comptes, en mentionnant dans son arrêt que le marché passé par le maire de Corps avec la société Agecom ne prévoyait pas d'avance et en précisant en outre que le versement d'une avance correspondant au montant total du marché était en contradiction avec le code des marchés publics, s'est contentée d'interpréter les stipulations du marché conformément aux lois et règlements en vigueur, comme aurait dû le faire le comptable au moment du paiement, et n'a pas, contrairement à ce que soutient le requérant, exigé du comptable qu'il exerce un contrôle de légalité sur les décisions de l'ordonnateur ; qu'elle n'a donc pas entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que cette précision n'entache pas non plus les motifs de l'arrêt attaqué d'une ambiguïté qui ne permettrait pas au juge de cassation d'exercer son contrôle ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt en date du 18 décembre 1997 par lequel laCour des comptes a rejeté son appel tendant à l'annulation du jugement en date du 19 mars 1997 par lequel la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes l'a constitué débiteur de la commune de Corps ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Michel X..., au procureur général près la Cour des comptes et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.