Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 février 1997 et 17 juin 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Confédération des syndicats médicaux français, dont le siège est ... (75340 Cedex 07), représentée par ses représentants en exercice, M. Claude E..., demeurant ..., M. Patrick Z..., demeurant ... à Bois de Cène (85830), M. Alain G..., demeurant ..., M. Michel A..., demeurant ..., M. Le Goff, demeurant ..., M. Jean-Pierre Y..., demeurant ..., M. X...
B..., demeurant ..., M. Jean-Luc C..., demeurant ..., M. Serge D..., demeurant ..., M. Hervé F..., demeurant ..., M. Pierre H..., demeurant ... et M. Alain I..., élisant domicile à l'hôpital Saint-Joseph, ..., docteurs en médecine ; la Confédération des syndicats médicaux français et MM. E..., Z..., G..., A..., Le Goff, Y..., B..., C..., D..., F..., H... et I... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision conjointe du président de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, du président de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles et du président de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole résiliant la convention médicale approuvée par arrêté du 25 novembre 1993 ainsi que ses avenants ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du ministre du travail et des affaires sociales prenant acte de l'envoi de la lettre résiliant la convention nationale des médecins du 21 octobre 1993 ;
3°) de condamner in solidum la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, la caisse centrale de la mutualité sociale agricole et l'Etat à leur verser la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 95-116 du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social ;
Vu l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Boissard, Auditeur,
- les observations de Me Parmentier, avocat de la Confédération des syndicats médicaux français et autres,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'acte par lequel la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole ont décidé de résilier la convention médicale approuvée par arrêté du 25 novembre 1993 ainsi que ses avenants :
Sur la compétence du Conseil d'Etat en premier ressort :
Considérant qu'il résulte du premier alinéa de l'article 2 bis du décret du 30 septembre 1953 que, lorsque le Conseil d'Etat est saisi de conclusions ressortissant à sacompétence en premier et dernier ressort, il est également compétent pour connaître de conclusions connexes ressortissant normalement à la compétence en premier ressort d'un tribunal administratif ;
Considérant que le Conseil d'Etat est compétent, en vertu du 3° de l'article 2 du décret du 30 septembre 1953, pour connaître en premier et dernier ressort des conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision par laquelle les caisses ont décidé de résilier la convention médicale et ses avenants, en tant qu'elles émanent de MM. E..., Z..., G..., A..., Le Goff, Y..., B..., C..., D..., F..., H... et I... ; que si ces conclusions, en tant qu'elles émanent de la Confédération des syndicats médicaux français, ressortissent en première instance à la compétence du tribunal administratif de Paris, juge de la convention, dans le ressort duquel ont leur siège les autorités administratives signataires de ladite convention et de ses avenants, il existe entre les conclusions précitées en tant qu'elles émanent de la Confédération des syndicats médicaux français et en tant qu'elles émanent de MM. E..., Z..., G..., A..., Le Goff, Y..., B..., C..., D..., F..., H... et I... un lien de connexité au sens des dispositions de l'article 2 bis du décret du 30 septembre 1953 ; qu'ainsi, le Conseil d'Etat est compétent, en premier ressort, pour connaître des conclusions susmentionnées en tant qu'elles émanent de l'ensemble des requérants ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'emploi et de la solidarité :
Considérant, en premier lieu, que les requérants invoquent par la voie de l'exception l'illégalité dont serait entaché l'article 44 de la convention nationale des médecins du 21 octobre 1993, approuvée par arrêté du 25 novembre 1993, aux termes duquel : "La présente convention peut être résiliée soit par une décision conjointe des caisses nationales signataires, soit par une décision conjointe des organisations médicales signataires, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) dans le cas où l'une ou l'autre des parties signataires considère que l'économie du dispositif a porté gravement atteinte à ses intérêts, ou encore si les conditions de fonctionnement du système sont substantiellement différentes de la situation enregistrée au début de la convention (...)" ; que, toutefois, l'article 119 de la loi susvisée du 4 février 1995 a validé l'arrêté du 25 novembre 1993, faisant ainsi obstacle à ce que sa légalité puisse être discutée devant la juridiction administrative ; qu'il fait également obstacle à ce que soit utilement invoqué par la voie de l'exception un moyen tiré de l'illégalité des stipulations de la convention, lesquelles n'ont d'effet juridique qu'en vertu de l'arrêté validé ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'article 119 de la loi susvisée du 4 février 1995 n'a pas conféré à la convention et à son avenant ni aux arrêtés les approuvant le caractère de textes législatifs ; que, dès lors, les caisses visées à l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale qui avaient conclu la convention et ses avenants sont demeurées compétentes pour décider de leur résiliation, conformément aux stipulations de l'article 44 de la convention ;
Considérant, en troisième lieu, que l'article L. 162-6 du code de la sécurité sociale aux termes duquel : "La ou les conventions, leurs annexes ou avenants n'entrent en vigueur lors de leur conclusion ou lors d'une tacite reconduction, qu'après approbation par arrêté ministériel", n'édicte aucune règle relative à la résiliation des conventions ; que les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que les caisses nationales se seraient incompétemment substituées aux ministres détenteurs du pouvoir d'approbation des conventions et de leurs annexes et avenants ; que le moyen tiré de l'absence d'intervention d'un arrêté d'approbation est inopérant à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de l'acte par lequel les caisses nationales d'assurances maladie ont décidé de résilier la convention ;
Considérant, en quatrième lieu, que la décision de résiliation de la convention et de ses avenants n'est pas au nombre des décisions devant être motivées en vertu des articles 1 à 6 de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant, enfin, qu'eu égard aux bouleversements introduits dans les dispositions régissant les relations conventionnelles entre les médecins et les caisses par l'ordonnance du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins, notamment du fait de l'instauration d'un objectif prévisionnel d'évolution des dépenses médicales dont le non-respect entraîne, le cas échéant, un reversement exigible de l'ensemble des médecins conventionnés, les caisses nationales d'assurance maladie ont pu à bon droit considérer que les conditions de fonctionnement du système étaient substantiellement différentes de la situation enregistrée au début de la convention et qu'ainsi, la condition de sa résiliation était remplie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'acte par lequel les caisses nationales d'assurance maladie ont décidé de résilier la convention médicale approuvée par arrêté du 25 novembre 1993 ainsi que ses avenants ;
Sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'avis portant publicité de la résiliation de la convention nationale des médecins :
Considérant que, par avis publié au Journal officiel de la République française du 4 janvier 1997, le ministre du travail et des affaires sociales a pris acte de l'envoi le 20 décembre 1996 de la lettre par laquelle la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole ont résilié la convention nationale des médecins du 21 octobre 1993 et a constaté qu'en conséquence, cette convention cesserait de produire effet le 20 février 1997, conformémement à son article 44 ; que cet avis ne constitue pas une décision susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir ; que, par suite, les conclusions tendant à son annulation ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, de la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole et de l'Etat, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que la Confédération des syndicats médicaux français et MM. E..., Z..., G..., A..., Le Goff, Y..., B..., C..., D..., F..., H... et I... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la Confédération des syndicats médicaux français et de MM. E..., Z..., G..., A..., Le Goff, Y..., B..., C..., D..., F..., H... et I... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Confédération DES SYNDICATS médicaux français, à MM. Claude E..., Patrick Z..., Alain G..., Michel A..., Le Goff, Jean-Pierre Y..., X...
B..., Jean-Luc C..., Serge D..., Hervé F..., Pierre H..., Alain I..., à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, à la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole et au ministre de l'emploi et de la solidarité.