La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/12/1996 | FRANCE | N°176891

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 11 décembre 1996, 176891


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier 1996 et 15 février 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain A..., demeurant ..., Mme Maryse A..., demeurant ..., Mme Antoinette H..., demeurant ... (13100), M. Claude I..., demeurant ... ; ils demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 14 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs protestations contre les opérations électorales qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 1995 dans la ville d'Aix-en-Provence ;> 2°) annule ces opérations électorales ;
3°) constate l'inéligibil...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier 1996 et 15 février 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain A..., demeurant ..., Mme Maryse A..., demeurant ..., Mme Antoinette H..., demeurant ... (13100), M. Claude I..., demeurant ... ; ils demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 14 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs protestations contre les opérations électorales qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 1995 dans la ville d'Aix-en-Provence ;
2°) annule ces opérations électorales ;
3°) constate l'inéligibilité de M. E..., M. X... et M. C... ;
4°) constate l'inéligibilité pour un an de MM. E..., X..., Z..., B..., D..., Arbore et Mmes F..., Gay, Dantier et Rumani ;
5°) condamne M. E... et ses colistiers à leur verser la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 ;
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lafouge, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Alain A... et autres et de Me Choucroy, avocat de M. Jean-François E... et autres,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'au premier tour de scrutin où aucune liste n'a atteint la majorité absolue, la liste conduite par M. Alain A..., qui avait obtenu 5 293 suffrages, était devancée par la liste de M. Y..., candidat soutenu par le Front National, la liste de M. Jean-Bernard G... qui totalisait 10 373 suffrages et celle dirigée par M. Jean-François E..., maire sortant, qui recueillait 13 323 voix ; qu'au second tour, la liste de M. A... qui avait fusionné avec celle de M. G... a obtenu 18 471 voix contre 22 930 à la liste de M. E... et 5 759 à celle de M. Y... ;
Sur les conclusions dirigées contre le premier tour de scrutin :
Considérant que les opérations du premier tour de scrutin n'ont abouti à la proclamation d'aucun candidat ; que M. A... et les autres protestataires se sont bornés à demander l'annulation desdites opérations sans conclure à la proclamation d'un ou plusieurs candidats ; que, dès lors, leurs protestations tendant à l'annulation du premier tour étaient sans objet et, par suite, irrecevables ;
Considérant, en revanche, que les requérants sont recevables à invoquer à l'appui de leurs conclusions dirigées contre le second tour de scrutin, les irrégularités qui auraient pu entacher le premier tour si celles-ci étaient susceptibles de modifier la situation des listes en présence au regard de leur possibilité de participer au second tour ou si elles ont été de nature à influencer le comportement des électeurs lors de ce second tour ;
Sur les conclusions dirigées contre le second tour de scrutin :
En ce qui concerne les griefs relatifs au déroulement de la campagne électorale du premier tour :
Considérant, en premier lieu, que si un sondage publié dans la presse locale le 13 avril 1995 créditait la liste conduite par M. A... d'intentions de votes sensiblement inférieures au nombre des suffrages dont cette liste a bénéficié lors du premier tour, cette circonstance ne peut être regardée comme une manoeuvre dès lors qu'il résulte de l'instruction que ce sondage a été effectué selon les méthodes habituellement pratiquées par les instituts spécialisés et que sa diffusion n'a pas été opérée en méconnaissance des prescriptions de la loi susvisée du 19 juillet 1977 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne limite les prises de position de la presse dans les campagnes électorales ; que, par suite, le grief tiré de ce qu'un quotidien régional a réservé, dans ses informations, une place prépondérante au programme des listes conduites respectivement par M. E... et par M. G... ne saurait entacher d'irrégularité le scrutin ;

Considérant, en troisième lieu, que si, indépendamment des obligations particulières pesant sur les sociétés nationales de progamme en vertu de l'article 13 de la loi du 30 septembre 1986, il incombe à l'ensemble des services de radiodiffusion sonore et de télévision de veiller pendant les campagnes électorales au respect des recommandations émises, sur le fondement de l'article 16 de la loi précitée, par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, la circonstance qu'en l'espèce une station de radiodiffusion privée a mis davantage l'accent, dans ses programmes d'information, sur les candidats dont la notoriété était la plus grande, n'a pas constitué une irrégularité ;
Considérant, en quatrième lieu, que si a été diffusé avant le premier tour de scrutin un tract anonyme, se présentant comme une décision de justice alors qu'il en constituait seulement une citation volontairement tronquée dans l'intention de nuire à M. A..., cette circonstance, pour particulièrement regrettable qu'elle ait été, n'a cependant pas faussé le résultat du scrutin en raison tant du fait que M. A... s'est expliqué auprès des électeurs sur les accusations dont il était l'objet, notamment dans un livre publié préalablement à la campagne électorale, que de l'ampleur de l'écart des voix séparant la liste de M. A... de celle conduite par M. G... ;
En ce qui concerne les griefs tirés du déroulement de la campagne électorale du second tour :
Considérant que la diffusion entre le premier et le second tour de scrutin d'un tract qui, à l'occasion de la fusion des listes conduites respectivement par M. A... et par M. G..., a fait état du jugement porté par ce dernier sur son concurrent lors du premier tour, n'a pas exécédé les limites de la polémique électorale ; qu'il en est de même de la diffusion du tract "Rassemblement des Aixois pour Aix" invitant à voter pour la liste conduite par M. E... ;
En ce qui concerne les griefs tirés de l'inéligibilité de plusieurs candidats proclamés élus de la liste conduite par M. E... :
Considérant, en premier lieu, que le Centre hospitalier général d'Aix-en-Provence est un établissement public distinct de la ville ; que la circonstance que M. E... effectue des prestations dans cet établissement, au titre de sa profession de médecin-radiologue, ne saurait lui conférer la qualité de salarié de la ville d'Aix-en-Provence et le faire tomber sous le coup de l'inéligibilité édictée par le troisième alinéa de l'article L. 231 du code électoral ;
Considérant, en deuxième lieu, que ne tombait pas davantage sous le coup de cette inéligibilité, M. Paul-Antoine C... qui, avant le premier tour de scrutin, avait démissionné de ses fonctions de chef de cabinet du maire d'Aix-en-Provence ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. Jacques X... est salarié d'une entreprise qui a passé des marchés de fourniture de produits lubrifiants avec la ville d'Aix-en-Provence, cette circonstance ne saurait faire de l'intéressé un entrepreneur de service municipal au sens de l'article L. 231-(6°) du code électoral ; qu'au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction que M. X... exerce un rôle prédominant au sein de l'entreprise qui l'emploie ;
Considérant, enfin, que si les requérants allèguent que l'ensemble des membres de la municipalité sortante étaient inéligibles, ce grief n'est assorti d'aucune précision ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs protestations ;
Sur les conclusions de la requête tendant à l'application de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. E... et ses colistiers, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, soient condamnés à payer aux requérants la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de MM. Alain A... et Claude I... et de Mmes Maryse A... et Antoinette H... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Alain A..., à Mme Maryse A..., à Mme Antoinette H..., à M. Claude I..., à M. Jean-François E... et ses colistiers et au ministre de l'intérieur.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ELECTIONS - DISPOSITIONS GENERALES APPLICABLES AUX ELECTIONS POLITIQUES - CAMPAGNE ET PROPAGANDE ELECTORALES - Obligations incombant aux services de radiodiffusion sonore et de télévision lors des campagnes électorales - Absence d irrégularité en l'espèce.

28-005-02, 56-02-03 Indépendamment des obligations particulières pesant sur les sociétés nationales de programme en vertu de l'article 13 de la loi du 30 septembre 1986, il incombe à l'ensemble des services de radiodiffusion sonore et de télévision de veiller pendant les campagnes électorales au respect des recommandations émises par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur le fondement de l'article 16 de ladite loi. Toutefois, la circonstance qu'au cours de la période ayant précédé les élections municipales de juin 1995 à Aix-en-Provence une station de radiodiffusion privée a mis davantage l'accent, dans ses programmes d'information, sur les candidats dont la notoriété était la plus grande, n'a pas en l'espèce constitué une irrégularité de nature à entacher la sincérité du scrutin.

RADIODIFFUSION SONORE ET TELEVISION - REGLES GENERALES - CAMPAGNES ET PROPAGANDE ELECTORALES - Obligations incombant aux services de radiodiffusion sonore et de télévision - Absence d'irrégularité en l'espèce.


Références :

Code électoral L231
Loi 77-808 du 19 juillet 1977
Loi 86-1067 du 30 septembre 1986 art. 13, art. 16
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 11 déc. 1996, n° 176891
Publié au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Lafouge
Rapporteur public ?: M. Bonichot
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge, Hazan, Avocat

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 11/12/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 176891
Numéro NOR : CETATEXT000007932437 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1996-12-11;176891 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award