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02/02/2021 | BELGIQUE | N°P.20.1067.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 02 février 2021, P.20.1067.N


N° P.20.1067.N
I. E. T.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Anna Segers, avocat au barreau d’Anvers,
II. M. D. O.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Kris Masson, avocat au barreau d’Anvers.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 30 septembre 2020 par la cour d’appel d’Anvers, chambre correctionnelle.
Le demandeur I invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le demandeur II invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au prése

nt arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Peter Hoet a fait rapport.
L’avocat général Alai...

N° P.20.1067.N
I. E. T.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Anna Segers, avocat au barreau d’Anvers,
II. M. D. O.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Kris Masson, avocat au barreau d’Anvers.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 30 septembre 2020 par la cour d’appel d’Anvers, chambre correctionnelle.
Le demandeur I invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le demandeur II invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Peter Hoet a fait rapport.
L’avocat général Alain Winants a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur les moyens du demandeur I
(...)
Sur le deuxième moyen :
5. Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution, 322, 323, alinéa 1er, et 324, alinéas 1er et 2, du Code pénal, ainsi que des articles 195 et 211 du Code d’instruction criminelle : l’arrêt n’établit pas à suffisance la participation du demandeur I à une association qui a retiré des stupéfiants du port d’Anvers, dans la nuit du 1er au 2 mars 2019 ; l’arrêt n’a pas égard à l’élément de preuve à décharge ou le déclare non pertinent ; il n’y a aucun lien entre le demandeur I et la personne qui a pris livraison des stupéfiants ; rien ne laisse apparaître que le demandeur I avait la volonté consciente d’être membre d’une association, ni que celle-ci a commis ou avait l’intention de commettre des infractions en matière de stupéfiants ; l’arrêt n’indique pas quelle était la répartition des tâches au sein de l’association et considère qu’il n’apparaît en rien que le demandeur I a effectivement retiré, de ses propres mains, des stupéfiants du port d’Anvers ; cette motivation est contradictoire.
6. L’infraction visée à l’article 322 du Code pénal, consistant à former une association dans le but d’attenter aux personnes ou aux propriétés, existe par le seul fait de l’organisation de la bande. Les articles 323 et 324 du Code pénal établissent ensuite une distinction entre les peines infligées, d’une part, aux provocateurs de l’association, aux chefs de celle-ci et à ceux qui y auront exercé un commandement quelconque et, d’autre part, aux autres personnes. Le juge qui déclare coupable une personne en tant qu’elle appartient à l’association sans en être le provocateur ou le chef et sans y avoir exercé un commandement, n’est pas nécessairement tenu de préciser la répartition précise des tâches qui a été convenue entre les membres de cette association ni d’indiquer le rôle exact joué par chacun des membres de celle-ci.
Dans la mesure où il procède d’une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.
7. Pour le surplus, le moyen a la même portée que le premier moyen et il y a lieu de le rejeter par les motifs énoncés dans la réponse apportée à celui-ci.
Sur les moyens du demandeur II
(...)
Sur le troisième moyen :
10. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 47bis, § 2, 2°, du Code d’instruction criminelle, ainsi que de la méconnaissance du droit de garder le silence : l’arrêt considère, à tort, que l’atteinte au droit du demandeur à un procès équitable n’était pas irrémédiable ; en effet, après que le demandeur II a invoqué son droit de garder le silence, les enquêteurs lui ont posé une seconde question concernant le téléphone portable qu’il avait en sa possession ; il est donc question de provocation policière ; or il est manifeste que les agents n’ont pas entendu se limiter strictement à constater de manière passive l’existence d’une infraction, mais qu’ils ont tenté de poser des questions supplémentaires malgré le fait que le demandeur II ait invoqué son droit de garder le silence ; une violation définitive et irrémédiable du droit à un procès équitable en résulte.
11. Le fait que le suspect d’une infraction ne puisse être contraint de faire une déclaration, conformément au droit qu’il tire des articles 6 de la Convention et 47bis, § 2, 2°, du Code d’instruction criminelle, n’empêche pas les enquêteurs de lui poser des questions. Le seul fait qu’un enquêteur pose une ou plusieurs questions à un suspect qui a d’emblée invoqué son droit de garder le silence, ne donne pas lieu à une violation des droits de ce suspect.
Déduit d’une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.
Sur le quatrième moyen :
12. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention, 322, 323 et 324 du Code pénal, 2bis, § 3, b), de la loi du 19 février 1921 concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, psychotropes, désinfectantes ou antiseptiques et des substances pouvant servir à la fabrication illicite de substances stupéfiantes et psychotropes, ou en vue de la culture de plantes dont peuvent être extraites ces substances : il ressort de l’arrêt que la période d’incrimination et, en réalité, les préventions in concreto n’étaient déterminées qu’à l’audience du 23 janvier 2020, de sorte que le demandeur II n’a pas pu se défendre à cet égard ; les faits se sont produits le 2 mars 2019 et non entre le 1er et le 2 mars 2019 ; l’arrêt continue de se référer aux articles 322, 323 et 324 du Code pénal et qualifie les faits d’organisation criminelle ; il n’indique pas clairement si le demandeur II est condamné en qualité de provocateur, chef ou aidant d’une association, ou de participant à celle-ci ; il n’y a guère eu d’association et l’activité illicite visée par l’arrêt n’a pas été exercée.
13. Dans la mesure où il a la même portée que le second moyen, il y a lieu de rejeter le moyen par les motifs énoncés dans la réponse au second moyen.
14. Le jugement entrepris a précisé la période d’incrimination de l’unique prévention de la manière suivante : « dans la nuit du 1er mars 2019 au 2 mars 2019 ». Dès lors, le demandeur avait donc connaissance du point sur lequel il était appelé à se défendre.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
15. Le demandeur II est poursuivi et l’arrêt le condamne pour avoir participé à une association formée dans le but de perpétrer, contre des personnes ou des propriétés, des crimes emportant la réclusion de dix à quinze ans ou un terme supérieur, en violation, par conséquent, des articles 322, 323, alinéa 1er, et 324, alinéas 1er et 2, du Code pénal. Il n’est ni poursuivi ni condamné en qualité de provocateur de cette association, de chef de celle-ci ou de personne y ayant exercé un commandement quelconque, et n’est donc ni poursuivi ni condamné pour infraction aux articles 323, alinéa 2, et 324, alinéas 3 et 4, du Code pénal, du chef d’organisation criminelle ou du chef d’infraction à la loi sur les stupéfiants.
Dans cette mesure, le moyen manque en fait.
16. La constatation que l’existence d’une association de malfaiteurs est établie :
- est possible y compris lorsque la période infractionnelle s’étend sur un ou deux jours ;
- ne requiert pas qu’apparaisse clairement l’identité des provocateurs, des chefs ou des personnes ayant exercé un commandement au sein de cette association ;
- ne requiert pas, lorsque l’association a été formée dans le but de perpétrer, contre des personnes ou des propriétés, des crimes emportant la réclusion de dix à quinze ans ou un terme supérieur, et plus particulièrement le crime visé à l’article 2bis, § 3, b), de la loi du 19 février 1921, que ce crime soit établi.
Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.
17. Le point 4.4.2 de l’arrêt (…) énonce les motifs sur la base desquels celui-ci déclare le demandeur II coupable de l'unique prévention. Ainsi, le demandeur II a connaissance des raisons pour lesquelles la cour d’appel est parvenue à cette décision.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
18. Dans la mesure où, pour le surplus, il critique l’appréciation souveraine des faits par le juge ou requiert un examen des faits pour lequel la Cour est sans pouvoir, le moyen est irrecevable.
(...)
Le contrôle d’office
21. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et les décisions sont conformes à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette les pourvois ;
Condamne les demandeurs aux frais de leur pourvoi.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Peter Hoet, Antoine Lievens, Sidney Berneman et Steven Van Overbeke, conseillers, et prononcé en audience publique du deux février deux mille vingt et un par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l’avocat général Alain Winants, avec l’assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Tamara Konsek et transcrite avec l’assistance du greffier Tatiana Fenaux.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.20.1067.N
Date de la décision : 02/02/2021
Type d'affaire : Droit pénal - Droit international public

Composition du Tribunal
Président : JOCQUE GEERT
Greffier : VANDEN BOSSCHE KRISTEL, BIRANT AYSE
Ministère public : WINANTS ALAIN
Assesseurs : VAN VOLSEM FILIP, HOET PETER, LIEVENS ANTOINE, FRANCIS ERWIN, BERNEMAN SIDNEY, COUWENBERG ILSE, VAN DOOREN ERIC, VAN OVERBEKE STEVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-02-02;p.20.1067.n ?

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