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30/06/2020 | BELGIQUE | N°P.20.0355.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 30 juin 2020, P.20.0355.N


N° P.20.0355.N
D. C.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Mathias Dendievel, avocat au barreau de Flandre occidentale.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 13 février 2020 par le tribunal correctionnel du Limbourg, division Hasselt, statuant en degré d’appel et en tant que juridiction de renvoi ensuite de l’arrêt de la Cour du 19 mars 2019.
Le demandeur invoque des griefs
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L’avocat général Bart De Smet a conclu.
II. LES ANTÉCÉDENTS
1. Le demand

eur est poursuivi du chef de s’être rendu coupable à Anvers, le 22 septembre 2014, d’une infracti...

N° P.20.0355.N
D. C.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Mathias Dendievel, avocat au barreau de Flandre occidentale.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 13 février 2020 par le tribunal correctionnel du Limbourg, division Hasselt, statuant en degré d’appel et en tant que juridiction de renvoi ensuite de l’arrêt de la Cour du 19 mars 2019.
Le demandeur invoque des griefs
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L’avocat général Bart De Smet a conclu.
II. LES ANTÉCÉDENTS
1. Le demandeur est poursuivi du chef de s’être rendu coupable à Anvers, le 22 septembre 2014, d’une infraction aux articles 24, § 1er, 26 et 28 de l’arrêté royal du 15 mars 1968 portant règlement général sur les conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles et leurs remorques, leurs éléments ainsi que les accessoires de sécurité, et 4 de la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité, du fait d’avoir laissé se trouver sur la voie publique, sous le couvert d’une plaque d’immatriculation roumaine, un véhicule soumis au contrôle technique selon l’arrêté royal du 15 mars 1968, qui n’était pas pourvu d’un certificat de visite accompagné d’une vignette de contrôle en cours de validité et d’un rapport d’identification ou fiche technique correspondant à son utilisation ou d’un document ‘Inspection visuelle du véhicule’, pour autant que ces documents soient requis.
2. Par le jugement du 17 février 2016, le tribunal de police d’Anvers, division Anvers, a déclaré le demandeur coupable du fait ainsi qualifié et l’a condamné à une peine. Ledit jugement a été confirmé par le jugement rendu le 5 septembre 2016 par le tribunal correctionnel d’Anvers, division Anvers.
3. Par son arrêt P.16.1008.N rendu le 19 mars 2019, la Cour a cassé le jugement rendu le 5 septembre 2016 par le tribunal correctionnel d’Anvers, division Anvers, en tant qu’il déclarait le demandeur coupable, lui imposait une peine du chef de la prévention A et le condamnait aux frais, la cause ainsi limitée étant renvoyée au tribunal correctionnel du Limbourg, siégeant en degré d’appel.
4. Par cet arrêt, la Cour a considéré que, dès lors que les véhicules automobiles circulant sous le couvert d'une plaque d'immatriculation belge, ainsi que les remorques belges tirées par eux, sont, selon l’article 2, § 1er, de l’arrêté royal du 15 mars 1968, soumis aux prescriptions dudit règlement général, la déclaration de culpabilité du demandeur, poursuivi du chef d’avoir laissé se trouver sur la voie publique, sous le couvert d’une plaque d’immatriculation roumaine, un véhicule qui n’était pas pourvu d’un certificat de visite en cours de validité, en contravention aux dispositions précitées de l’arrêté royal du 15 mars 1968 et de la loi du 21 juin 1985, était illégale.
5. Par son jugement rendu le 13 février 2020, le tribunal correctionnel du Limbourg, division Hasselt, a de nouveau déclaré le demandeur coupable du fait requalifié sous la prévention A et l’a condamné à une peine. La prévention A est requalifiée ainsi qu’il suit :
« à Anvers, le 22 septembre 2014,
Avoir mis en circulation un véhicule à moteur, une remorque, un semi-remorque immatriculé dans un pays de l’Espace économique européen, ayant une M.M.A. de plus de 3,5 tonnes et destiné au transport de personnes ou un véhicule à moteur de plus de 8 places assises (non compris le siège du conducteur), sans qu’il soit pourvu d’un rapport du contrôle technique en cours de validité ou d’un document attestant que le véhicule utilitaire a passé le contrôle imposé par la Directive 96/96/CE du Conseil du 20 décembre 1996 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au contrôle technique des véhicules à moteur et de leurs remorques ou présente un ou plusieurs des défauts d’entretien énumérés à l’annexe 1, point 10, de l’arrêté royal du 1er septembre 2006 instituant le contrôle technique routier des véhicules utilitaires immatriculés en Belgique ou à l'étranger (article 3, § 1er, 2°-3° de l’arrêté royal du 1er septembre 2006 précité, article 3.1 de la Directive 2009/40/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009 relative au contrôle technique des véhicules à moteur et de leurs remorques, article 4, § 1er, de la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité).
Actuellement punissable tel qu’il suit :
Avoir mis en circulation un véhicule utilitaire immatriculé dans un pays de l’Espace économique européen de la catégorie M2, M3, N2, N3, O3, O4 ou T (conçus pour une vitesse maximale supérieure à 40 km/h), tel que définies à l’article 1er de l’arrêté royal du 16 mars 1968 portant règlement général sur les conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles et leurs remorques, leurs éléments ainsi que les accessoires de sécurité, sans qu’il soit pourvu d’un rapport du contrôle technique en cours de validité ou d’un document attestant que le véhicule utilitaire a passé le contrôle imposé par la Directive 2014/45/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur et de leurs remorques, et abrogeant la directive 2009/40/CE, ou présente un ou plusieurs des défauts d’entretien énumérés à l’annexe 1, point 3, de l’arrêté du Gouvernement flamand du 2 mars 2018 relatif au contrôle technique routier des véhicules utilitaires (article 8.1 de la Directive 2014/45/UE précitée, article 10.1 de la Directive 2014/47/UE, art. 4, § 1er, de la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité, articles 2, 13°, 4 et 9, § 1er, 1°, de l’arrêté du Gouvernement flamand du 2 mars 2018) ».
Il s’agit en l’espèce du jugement attaqué.
III. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur la recevabilité du mémoire :
6. Selon l’article 429, alinéa 2, du Code d’instruction criminelle, le demandeur ne peut produire de mémoire ou de pièces autres que les désistements, les actes de reprise d'instance, les actes qui révèlent que le pourvoi est devenu sans objet et les notes visées à l'article 1107 du Code judiciaire, après les deux mois qui suivent la déclaration de pourvoi en cassation. L’article 429, § 5, du Code d’instruction criminelle prévoit que le greffier constate la remise par les parties de mémoires ou de pièces en indiquant la date de réception.
7. Il ressort de l’indication faite par le greffier que le mémoire du demandeur a été reçu au greffe de la Cour le mercredi 29 avril 2020, à savoir plus de deux mois suivant sa déclaration de pourvoi en cassation du 25 février 2020.
Le mémoire est irrecevable pour cause de tardiveté.
Sur le moyen soulevé d’office :
Dispositions légales violées et principe général du droit méconnu :
- articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution ;
- article 2, alinéa 1er, du Code pénal ;
- principe général du droit relatif à la légalité en matière répressive ;
- article 4, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité ;
- article 3, § 1er, de l’arrêté royal du 1er septembre 2006 instituant le contrôle technique routier des véhicules utilitaires immatriculés en Belgique ou à l'étranger, tel qu’applicable au moment des faits.
8. Il résulte des articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, de l’article 2, alinéa 1er, du Code pénal et du principe général du droit relatif à la légalité en matière répressive que le juge ne peut déclarer un prévenu coupable du chef d’une infraction et le sanctionner de ce chef que lorsqu’une disposition légale punissait son comportement au moment de sa commission.
9. L’article 4, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 21 juin 1985 punit les infractions aux dispositions de cette même loi et aux arrêtés qui ont pour objet les conditions techniques relatives aux véhicules de transport par terre, à leurs éléments et aux accessoires de sécurité.
10. L’inobservation des dispositions d’une directive européenne dont la teneur n’est pas transposée dans la loi du 21 juin 1985 ou dans un arrêté d’exécution de ladite loi ne peut être punie sur le fondement de l’article 4, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 21 juin 1985.
11. L’article 3, § 1er, de l’arrêté royal du 1er septembre 2006, tel qu’applicable au moment des faits, dispose :
« § 1er. Le contrôle technique se compose d'un ou de plusieurs des éléments suivants :
1° l'inspection visuelle de l'état d'entretien du véhicule utilitaire à l'arrêt ;
2° le contrôle, soit du rapport de contrôle technique routier, tel que visé à l'article 4 du présent arrêté et rédigé dans le courant des trois derniers mois, soit des documents sur lesquels apparaisse la correspondance avec les prescriptions techniques qui sont d'application pour le véhicule, et plus particulièrement, pour les véhicules immatriculés ou mis en circulation dans un État membre, le contrôle du document qui atteste que le véhicule utilitaire a été soumis au contrôle technique obligatoire de la directive 96/96/CE du Conseil du 20 décembre 1996 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au contrôle technique des véhicules à moteur et de leurs remorques ;
3° l'inspection visant à déceler les défauts d'entretien. Cette inspection porte sur un ou plusieurs des points énumérés à l'annexe 1re, point 10, du présent arrêté. L'inspection des freins et des émissions d'échappement est effectuée conformément à l'annexe 2 du présent arrêté. »
12. Il ne saurait être déduit du libellé de cette disposition qu’un véhicule qui relève du champ d’application de l’arrêté royal du 1er septembre 2006 en vertu de son article 2, b), et c), doit toujours être pourvu d’un « rapport de contrôle technique en cours de validité, tel que prévu à l’article 4 dudit arrêté et rédigé dans le courant des trois derniers mois, soit des documents sur lesquels apparaisse la correspondance avec les prescriptions techniques qui sont d’application sur le véhicule, et plus particulièrement, pour les véhicules immatriculés ou mis en circulation dans un État membre, le contrôle du document qui atteste que le véhicule utilitaire a été soumis au contrôle technique obligatoire de la Directive 96/96/CE du Conseil du 20 décembre 1996 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au contrôle technique des véhicules à moteur et de leurs remorques. » Cette disposition ne peut ainsi fonder la condamnation du demandeur du chef des faits tels qu’ils ont été requalifiés par le jugement attaqué.
13. Ni le renvoi aux directives européennes auxquelles l’arrêté royal du 1er septembre 2006 donne exécution, ni le renvoi à l’arrêté du Gouvernement flamand du 2 mars 2018 relatif au contrôle technique routier des véhicules utilitaires, lequel a remplacé l’arrêté royal du 1er septembre 2006 à compter du 20 mai 2018 et dont l’article 9, § 1er, alinéa 1er, 1°, prévoit que les véhicules utilitaires qui relèvent du champ d’application dudit arrêté doivent conserver à bord du véhicule le dernier certificat de visite et le dernier rapport de contrôle technique, ne permettent de décider autrement.
Le jugement attaqué qui déclare le demandeur coupable de la prévention requalifiée et le condamne de ce chef à une peine n’est pas légalement justifié.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse le jugement attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement cassé ;
Réserve les frais pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge de renvoi ;
Renvoie la cause au tribunal correctionnel de Flandre orientale, siégeant en degré d’appel.
(…)
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Peter Hoet, Sidney Berneman, Ilse Couwenberg et Steven Van Overbeke, conseillers, et prononcé en audience publique du trente juin deux mille vingt par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l’avocat général Bart De Smet, avec l’assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Frédéric Lugentz et transcrite avec l’assistance du greffier Fabienne Gobert.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.20.0355.N
Date de la décision : 30/06/2020
Type d'affaire : Droit constitutionnel - Autres - Droit pénal

Analyses

Le juge ne peut déclarer un prévenu coupable du chef d'une infraction et le sanctionner de ce chef que lorsqu'une disposition légale punissait son comportement au moment de sa commission.

CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 12 - Droit à la liberté personnelle - Principe de légalité - Comportement punissable - Application de la loi pénale dans le temps - Limites - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 14 - Principe de légalité - Comportement punissable - Application de la loi pénale dans le temps - Limites - PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - Principe de légalité - Matière répressive - Agissement punissable - Application de la loi pénale dans le temps - Limites - INFRACTION - GENERALITES. NOTION. ELEMENT MATERIEL. ELEMENT MORAL. UNITE D'INTENTION - Principe de légalité - Agissement punissable - Application de la loi pénale dans le temps - Limites [notice1]

Il ne saurait être déduit de l'article 3, § 1er, de l'arrêté royal du 1er septembre 2006 instituant le contrôle technique routier des véhicules utilitaires immatriculés en Belgique ou à l'étranger, tel qu'applicable avant sa modification par l'arrêté du Gouvernement flamand du 2 mars 2018 relatif au contrôle technique routier des véhicules utilitaires, qu'un véhicule utilitaire soumis au contrôle technique doit toujours être pourvu du récent rapport requis du contrôle technique en cours de validité ou des documents requis sur lesquels apparaît la correspondance avec les prescriptions techniques qui sont d'application pour le véhicule (1). (1) A.R. du 1er septembre 2006, art. 3, § 1er, tel qu‘applicable avant sa modification par l'art. 9, § 1er, 1° de l'A. Gouv. Fl. du 2 mars 2018.

ROULAGE - IMMATRICULATION DES VEHICULES - Véhicule utilitaire - Contrôle technique en cours de validité - Certification de visite - Portée - ROULAGE - DIVERS - Conditions techniques des véhicules - Véhicule utilitaire - Certificat de visite - Contrôle en cours de validité - Obligation de détention - Portée [notice5]


Références :

[notice1]

La Constitution coordonnée 1994 - 17-02-1994 - Art. 12, al. 2, et 14 - 30 / No pub 1994021048 ;

Code pénal - 08-06-1867 - Art. 2, al. 1er - 01 / No pub 1867060850

[notice5]

L. du 21 juin 1985 - 21-06-1985 - Art. 4, § 1er - 36 / No pub 1985014311 ;

A.R. du 1er septembre 2006 - 01-09-2006 - Art. 3, § 1er - 34 / No pub 2006014187


Composition du Tribunal
Président : VAN VOLSEM FILIP
Greffier : VANDEN BOSSCHE KRISTEL
Ministère public : DE SMET BART
Assesseurs : HOET PETER, LIEVENS ANTOINE, BERNEMAN SIDNEY, COUWENBERG ILSE, VAN OVERBEKE STEVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-06-30;p.20.0355.n ?

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