N° P.19.0594.N
E. D. C.,
prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
Me Maarten Vandermeersch, avocat au barreau de Flandre occidentale,
contre
1. W. S.,
2. A.-M. D.,
3. M. S.,
4. N. S.,
Me Raf Verstraeten, avocat au barreau de Louvain,
5. H. S.,
6. D. S.,
7. E. G.,
8. Y. W.,
9. R. D.,
parties civiles,
défendeurs en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 6 mai 2019 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Antoine Lievens a fait rapport.
L'avocat général Alain Winants a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
(...)
Sur le troisième moyen :
12. Le moyen est pris de la violation de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 149 de la Constitution et 47bis (ancien et nouveau) du Code d'instruction criminelle, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense, au droit à un procès équitable en ce compris le droit à l'égalité des armes et le droit au contradictoire, et de l'obligation générale pour le juge de répondre aux conclusions du prévenu et de son conseil : l'arrêt ne répond pas à la défense du demandeur selon laquelle l'audition de F. L. du 16 juin 2015 consiste, de facto, en une déclaration de son conseil, qui ne respecte pas les règles élémentaires et légales d'un interrogatoire et qui doit, par conséquent, être écarté des débats ; l'article 6 de la Convention ne prévoit pas que l'avocat puisse donner des conseils au suspect au cours de l'audition ni qu'il ait un droit de parole au cours de celle-ci et l'article 47bis, § 6, 7° (nouveau), du Code d'instruction criminelle prévoit que l'avocat n'est pas autorisé à répondre à la place du suspect ni à entraver le déroulement de l'audition ; l'audition de F. L. a été menée en violation de ces dispositions légales et l'arrêt fonde illégalement la condamnation du demandeur sur cette déclaration.
13. L'article 47bis, § 6, 7), c), alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, entré en vigueur le 27 novembre 2016, n'est pas applicable aux auditions qui se sont tenues avant cette date.
Dans la mesure où il invoque la violation de cette disposition légale, le moyen manque en droit.
14. Il ne résulte ni de l'article 6 la Convention, tel qu'interprété par la Cour européenne des droits de l'Homme, ni de l'article 47bis (ancien) du Code d'instruction criminelle, que le juge ne peut prendre en considération l'audition d'un prévenu au motif que son conseil ne se serait pas limité pendant cet interrogatoire à la surveillance du respect des droits du suspect, mais aurait activement participé à celui-ci.
Dans la mesure où il procède d'une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.
15. L'obligation de motiver tout jugement, prévue à l'article 149 de la Constitution, n'implique pas que le juge soit tenu de répondre à chaque argument invoqué à l'appui d'un moyen sans toutefois constituer un moyen distinct.
16. Par un ensemble de motifs qu'il contient, l'arrêt examine les différentes déclarations de F. L., dont celle du 16 juin 2015. Il prend ces déclarations en considération dans l'appréciation de la culpabilité du demandeur. Ainsi, l'arrêt indique que cette audition n'est pas dénuée de valeur et qu'elle peut bel et bien être prise en considération, et il répond à l'allégation visée par le moyen et la rejette.
Dans cette mesure, le moyen manque en fait.
Le contrôle d'office
17. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Geert Jocqué, conseiller faisant fonction de président, Peter Hoet, Antoine Lievens, Erwin Francis et Sidney Berneman, conseillers, et prononcé en audience publique du douze novembre deux mille dix-neuf par le conseiller faisant fonction de président Geert Jocqué, en présence de l'avocat général Alain Winants, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Françoise Roggen et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.