Vu la requête, enregistrée le 19 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Teddy Y, demeurant ... ; M. Y demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 octobre 2004 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a, sur la protestation de M. Jean-Marc X, annulé son élection en qualité de conseiller général lors des opérations électorales qui se sont déroulées les 21 et 28 mars 2004 dans le 4ème canton de Saint-Paul (Réunion) ;
2°) de valider son élection en qualité de conseiller général dans le 4ème canton de Saint-Paul ;
3°) de mettre à la charge de M. X une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu, enregistrée comme ci-dessus le 8 septembre 2005 la note en délibéré produite par M. Y ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc El Nouchi, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à l'issue du second tour des opérations électorales qui se sont déroulées les 21 et 28 mars 2004, dans le 4ème canton de Saint-Paul (Réunion), M. Y a été proclamé élu en qualité de conseiller général, avec 9 voix de plus que son concurrent, M. X ; que la requête de M. Y tend à l'annulation du jugement du 19 octobre 2004 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a, sur la protestation de M. X, annulé son élection ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 62-1 du code électoral : Le vote de chaque électeur est constaté par sa signature apposée à l'encre en face de son nom sur la liste d'émargement ; que le second alinéa de l'article L. 64 du même code dispose que : Lorsqu'un électeur se trouve dans l'impossibilité de signer, l'émargement prévu par le troisième alinéa de l'article L. 62-1 est apposé par un électeur de son choix qui fait suivre sa signature de la mention suivante : l'électeur ne peut signer lui-même ; qu'il résulte de ces dispositions destinées à assurer la sincérité des opérations électorales que seule la signature personnelle, à l'encre, d'un électeur est de nature à apporter la preuve de sa participation au scrutin, sauf cas d'impossibilité dûment reportée sur la liste d'émargement ; que, dès lors, la constatation d'un vote par l'apposition d'une croix sur la liste d'émargement ne peut être regardée comme garantissant l'authenticité de ce vote ; que, par suite, les suffrages des électeurs enregistrés sous le n° 36 dans le bureau de vote n° 65, sous le n° 122 dans le bureau n° 75, sous le n° 174 dans le bureau n° 66, sous le n° 220 dans le bureau n° 67, sous les n° 224 et 350 dans le bureau n° 62, sous le n° 458 dans le bureau n° 69 et sous le n° 545 dans le bureau n° 68, doivent être tenus pour irrégulièrement exprimés, sans que la production a posteriori pour sept d'entre eux d'attestations établies par des membres du bureau de vote ou par les électeurs eux-mêmes destinées à démontrer la participation effective de ces électeurs au scrutin, ait une influence à cet égard ;
Considérant, en second lieu, que la réalité du vote enregistré sous le n° 51 dans le bureau de vote n° 63 ne peut être démontrée avec certitude, la mention prévue par l'article L. 64 faisant défaut, comme l'admet M. Y ; que concernant les électeurs enregistrés sous les n°s 55 et 183 dans le bureau de vote n° 63, dont les signatures sur la liste d'émargement sont différentes au premier et au deuxième tour, la mention prévue par l'article L. 64 fait également défaut à la suite des signatures apposées lors du second tour de sorte que ces signatures ne peuvent être regardées comme attestant le vote des électeurs dont il s'agit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que onze suffrages doivent être regardés comme irréguliers et être alternativement retranchés du total des suffrages recueillis par MM. Y et X ; que cette opération, en raison de l'écart de voix entre les deux candidats, ne permet pas de déterminer avec certitude le résultat de l'élection dont s'agit ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. Y n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé son élection en qualité de conseiller général du 4ème canton de Saint-Paul ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le paiement de la somme que demande M. Y au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge de M. Y la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. Y est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Teddy Y, à M. Jean-Marc X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.