LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 mai 2008) et les productions, que M. X... a fait assigner, devant un tribunal de grande instance, plusieurs défendeurs, dont M. Y... et la société Informatique vidéo et communication (la société) qui ont soulevé, par conclusions des 10 janvier et 29 mars 2006, la nullité de l'assignation en faisant valoir qu'elle ne comportait pas de constitution d'avocat ; que le tribunal a déclaré irrecevable cette exception et a accueilli les demandes de M. X... ;
Attendu que M. Y... et la société font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'exception de nullité de l'assignation, alors, selon le moyen :
1°/ que les exceptions de nullité pour irrégularité de fond qui, comme les fins de non-recevoir, peuvent être soulevées en tout état de cause, sont exclues du champ de la compétence exclusive du juge de la mise en état ; qu'en retenant que l'exception de nullité de l'assignation pour défaut de constitution d'avocat, qui constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, s'analysait en une exception de procédure relevant de la seule compétence du juge de la mise en état, la cour d'appel a violé les articles 117, 118 et 771 du code de procédure civile ;
2°/ que si les lois de procédure sont applicables immédiatement aux instances en cours, elles ne régissent que les actes postérieurs à leur entrée en vigueur, les actes antérieurs régulièrement faits selon la loi ancienne restant valables ; qu'en retenant qu'il importait peu que la demande d'annulation de l'assignation ait été formée avant l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles de l'article 771 du code de procédure civile prévoyant l'irrecevabilité des exceptions de procédure soulevées par les parties après le dessaisissement du juge de la mise en état, la cour d'appel a violé les articles 1 et 2 du code civil et 771 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 771 du code de procédure civile, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er mars 2006, que tenues, à peine d'irrecevabilité, de soulever les exceptions de procédure devant le juge de la mise en état, seul compétent, jusqu'à son dessaisissement, pour statuer sur celles-ci, les parties ne sont plus recevables à les soulever ultérieurement à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge ;
Qu'ayant exactement retenu que la demande de nullité de l'assignation pour défaut de constitution d'avocat était une exception de procédure, et relevé que cette demande n'avait pas été présentée au juge de la mise en état avant son dessaisissement postérieur à l'entrée en vigueur du texte susvisé, la cour d'appel a justement déclaré la demande irrecevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le second moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... et la société Informatique vidéo et communication aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande
de M. Y... et de la société Informatique vidéo et communication ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. Y..., et autre
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'exception de nullité de l'assignation soulevée par M. Y... ;
Aux motifs que « Michel Y... et la société X-Matique soutiennent que l'absence de constitution d'avocat dans l'acte introductif d'instance est une irrégularité de fond, non susceptible de régularisation ; que les dispositions nouvelles de l'article 771 du CPC relatives à la compétence exclusive du juge de la mise en état, ne sauraient leur être opposées dans la mesure où ils ont sollicité l'annulation de l'assignation pour défaut de constitution et défaut de motivation dans des conclusions prises antérieurement à l'entrée en application desdites dispositions ; mais que comme le relève Maurice X..., l'article précité, applicable aux procédures en cours au 1er mars 2006, donne compétence au seul juge de la mise en état pour statuer sur les exceptions de procédure et sur les incidents mettant fin à l'instance, en ajoutant que les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins à moins qu'ils ne surviennent ou soient relevés postérieurement au dessaisissement du juge ; que la nullité de l'assignation pour défaut de constitution et de motivation constitue une exception de procédure qui relève de la seule compétence du juge de la mise en état ; qu'il importe peu en l'espèce, que la demande d'annulation ait été initialement formée avant l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles dès lors que la clôture de l'instruction est intervenue le 31 mars 2006 soit postérieurement au 1er mars 2006, date de leur entrée en vigueur » (arrêt attaqué, p. 6, al. 4 à 7) ;
Alors que les exceptions de nullité pour irrégularité de fond qui, comme les fins de non-recevoir, peuvent être soulevées en tout état de cause, sont exclues du champ de la compétence exclusive du juge de la mise en état ; qu'en retenant que l'exception de nullité de l'assignation pour défaut de constitution d'avocat, qui constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, s'analysait en une exception de procédure relevant de la seule compétence du juge de la mise en état, la cour d'appel a violé les articles 117, 118 et 771 du Code de procédure civile ;
Alors, en toute hypothèse, que si les lois de procédure sont applicables immédiatement aux instances en cours, elles ne régissent que les actes postérieurs à leur entrée en vigueur, les actes antérieurs régulièrement faits selon la loi ancienne restant valables ; qu'en retenant qu'il importait peu que la demande d'annulation de l'assignation ait été formée avant l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles de l'article 771 du Code de procédure civile prévoyant l'irrecevabilité des exceptions de procédure soulevées par les parties après le dessaisissement du juge de la mise en état, la cour d'appel a violé les articles 1 et 2 du Code civil et 771 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que M. X... était l'inventeur de la demande de brevet français déposée le 6 février 2003 sous le numéro 2851048, que son employeur n'avait pas exercé son droit d'attribution et qu'en déposant cette demande de brevet et en mentionnant comme inventeur MM. Y... et Z..., la société INVICOM avait soustrait l'invention à M. X... et porté atteinte au droit au nom de ce dernier ;
Aux motifs qu' « il convient d'examiner en premier lieu si l'invention telle que revendiquée est la même que celle décrite dans le document déposé sous enveloppe Soleau, en second lieu, si elle est une invention de mission ou une invention hors mission attribuable et, dans ce dernier cas, si la société L2G dont Monsieur X... était alors l'associé a entendu exercer son droit d'attribution, avant d'apprécier les fautes qu'ont pu commettre les parties et les réparations qu'elles appellent ; que l'enveloppe Soleau contient un cahier des charges d'un système "module candélabre" consistant à inclure un dispositif électronique dans chaque candélabre et dans les postes d'énergie de l'éclairage public et décrivant les fonctions et l'intérêt du système, la technologie, la fonction de gestion de puissance, la localisation des lampes défectueuses, la commande de l'amorceur, le paramétrage, les questions techniques et les objectifs ainsi que deux figures annexes ; que la demande de brevet concerne une installation perfectionnée de contrôle du fonctionnement d'appareils montés en série sur une ligne d'alimentation ; qu'il n'est soutenu par aucune des parties que l'invention objet de la demande de brevet n'est pas la même que celle décrite dans le document déposé dans l'enveloppe Soleau ; qu'Invicom prétend d'ailleurs qu'elle faisait partie des éléments incorporels de la société L2G qu'elle a été autorisée à acquérir, qu'il sera observé à ce stade qu'elle ne justifie aucunement de la contribution technique complémentaire qu'ont pu apporter les personnes qu'elle a désignées comme inventeurs lors du dépôt de la demande ; qu'il échet donc de retenir que l'invention revendiquée couvre la même invention que celle décrite dans l'enveloppe Soleau ; qu'Invicom affirme qu'il s'agirait d'une invention de mission appartenant ab initio à l'employeur par application de l'article L 611-7 du CPI, car au sein de la société L2G, Maurice X... aurait eu une mission inventive comme en témoigneraient le montant de son salaire et le fait que sa qualité d'inventeur avait été déjà mentionnée sur trois brevets précédents ; mais que ni le montant du salaire (au demeurant inférieur à 20 000 F) ni le fait que le nom de Maurice X... figure sur trois brevets ne peuvent suffire à établir que ce dernier se serait vu confier une mission inventive, alors surtout qu'il a été recruté en qualité de technicien, et que monsieur A..., ancien gérant de la société L2G indique dans une attestation du 7 avril 2005, que ses fonctions ne comportaient pas de mission inventive mais qu'il lui avait commandé de travailler sur la mise au point d'invention destinées à faire l'objet de demandes de brevets ; que, par ailleurs, selon le même article L 611-7, les inventions autres que celles faites par le salarié dans le cadre d'une mission inventive, lui appartiennent, "toutefois lorsqu'une invention est faite par un salarié soit dans le cours de l'exécution de ses fonctions, soit dans le domaine des activités de l'entreprise, soit par la connaissance ou l'utilisation des techniques ou de moyens spécifiques à l'entreprise ..., l'employeur a le droit .... de se faire attribuer la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au brevet ..." ; que le régime légal instauré par les dispositions précitées, postule ainsi que la propriété des inventions hors mission revient au salarié, mais que pour celles qui ont été réalisées, comme en l'espèce, dans le domaine des activités de l'entreprise et avec les moyens techniques de celle-ci, l'employeur dispose d'un droit d'attribution qui porte non sur la propriété de l'invention elle même, mais sur "la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au brevet protégeant l'invention de son salarié" ; qu'ainsi, la portée du droit conféré à l'employeur couvre non seulement et nécessairement les brevets délivrés et les demandes de brevets déposées mais également, si l'invention n'a pas fait l'objet d'une demande de brevet, la possibilité d'en faire la demande ; qu'il appartient à l'employeur de faire connaître à son salarié, dans les conditions précisées à l'article R 611-7 du CPI, s'il entend exercer son droit d'attribution ; que la société L2G alors employeur de Maurice X... a été pleinement informée de l'invention réalisée par ce dernier puisque aux termes d'une correspondance datée du 22 février 2000, elle a confié au cabinet Netter, sous la plume de Monsieur X..., le soin de "rédiger et d'envoyer l'enveloppe Soleau pour le projet L2G4 pour un montant de 1000 F ht" ; que la cabinet Netter a émis une note de débit réglée par la société ; qu'il est constant que la référence à L2G4 renvoie à l'invention revendiquée ; que la société Invicom, Michel Y... et la société X-Matique avancent en substance que la décision de L2G d'exercer son droit d'attribution, résulte à l'envi du dépôt de l'enveloppe Soleau sous le nom de L2G laquelle a payé les frais de dépôt, de la proposition commerciale que L2G a faite de l'invention à la société Honeywell et de sa cession à Invicom ; que ce faisant, L2G se serait attribuée la propriété de l'invention et l'aurait fait figurer dans ses comptes ; mais que, pour les motifs sus. exposés, L2G ne pouvait s'attribuer la propriété de l'invention ; qu'elle pouvait en revanche s'attribuer celle des droits attachés au brevet la protégeant et, à défaut de brevet, faire connaître à son salarié qu'elle s'attribuait le droit de le déposer; que force est de relever qu'elle n'a jamais pris cette option puisque aucune demande de brevet n'a été déposée par elle même pour protéger l'invention, avant que la société Invicom n'y procède le 6 février 2003 dans les conditions examinées ci-après ; que cette demande a été déposée en mentionnant comme inventeur Michel Y... et Monsieur Z... ; que ce dernier, programmeur pour le compte de L2G puis salarié d'Invicom, a reconnu notamment dans un courrier adressé à l'INPI le 20 septembre 2004 ne pas avoir la qualité de co-inventeur et avoir signé la demande de brevet en tant qu'inventeur à la demande de Michel Y... et dans la précipitation, alors que le véritable inventeur est Maurice X... ; que Michel Y... qui se borne à faire état de ses connaissances techniques et de son activité de formateur ne justifie ni même ne décrit la part qui pourrait être la sienne dans la réalisation de l'invention déposée ; que pas davantage ne justifie-t-il de la part qu'aurait pu prendre, malgré ses dénégations, Monsieur Z... ; que la demande de brevet revendiquée a donc été faite en violation du droit au nom de Maurice X... et en violation de son droit de propriété sur l'invention ; qu'il convient dès lors d'accueillir l'action en revendication de la demande de brevet litigieuse et de toutes les extensions à laquelle elle a pu donner lieu, et d'ordonner à la société Invicom la communication du dossier de la demande de brevet international qui a pu être déposée ; que la société Invicom qui s'est prétendue à tort cessionnaire de l'invention, ne pouvait ignorer la qualité d'inventeur de Maurice X... qui travaillait dans ses locaux ; que son gérant s'est d'ailleurs vu remettre les pièces originales du projet L2G4 ; qu'en déposant la demande de brevet sans mentionner le nom de X... et en attribuant abusivement la qualité d'inventeur à messieurs Y... et Z..., elle a engagé sa responsabilité ; qu'il en est de même pour Miche Y... qui s'est fait porter comme inventeur alors qu'il n'en avait pas la qualité et qu'il ne pouvait ignorer la part que Maurice X..., salarié affecté dans sa société, avait prise dans la réalisation de l'invention»
(arrêt attaqué, p. 7, al. 6 à p. 10, al. 2) ;
Alors que les inventions faites par le salarié dans l'exécution soit d'un contrat de travail comportant une mission inventive soit d'études et de recherches qui lui sont explicitement confiées, constituent des inventions de mission qui appartiennent à l'employeur ; qu'en se bornant à retenir, pour exclure la qualification d'invention de mission, que les fonctions de M. X... ne comportaient pas de mission inventive, sans rechercher si l'invention revendiquée par ce dernier ne résultait pas de l'exécution d'études et de recherches qui lui avaient été explicitement confiées par son employeur qui, selon les propres énonciations de l'arrêt attaqué, lui avait « commandé de travailler sur la mise au point d'inventions destinées à faire l'objet de demandes de brevets », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;
Alors, en tout état de cause, que l'employeur peut exercer son droit d'attribution sur une invention hors mission attribuable en se faisant attribuer, avant toute demande de dépôt de brevet, le droit de déposer la demande de brevet ; qu'en se bornant à retenir, pour dire que la société L2G n'avait jamais exercé son droit d'attribution, que cette dernière n'avait déposé aucune demande de brevet pour protéger l'invention litigieuse, sans rechercher si l'exercice de ce droit d'attribution par la société L2G ne résultait pas du dépôt, à son nom, d'une enveloppe Soleau destinée, notamment, à l'identifier comme auteur de l'invention et à lui permettre de se voir reconnaître le droit de déposer une demande de brevet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;
Alors, au surplus, que le droit de déposer une demande de brevet sur une invention peut faire l'objet d'une transmission ; qu'en se fondant sur l'absence de dépôt d'une demande de brevet par la société L2G pour dire que cette société n'avait pas exercé son droit d'attribution, sans rechercher si l'exercice de ce droit ne s'était pas réalisé au profit de la société INVICOM, qui avait acquis de la société L2G le droit de déposer une demande de brevet et dont elle constatait qu'elle avait effectivement déposé une demande de brevet en février 2003, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L.611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;
Alors, enfin, que toute contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant que la société INVICOM n'était pas cessionnaire de l'invention litigieuse désignée sous l'appellation L2G4 et qu'elle l'avait soustraite à M. X... tout en constatant que le gérant de cette société s'était « vu remettre les pièces originales du projet L2G4 », la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du Code de procédure civile