Sur le moyen unique :
Vu les articles 6 et 1128 du Code civil, ensemble les articles 353 et 361 du même Code ;
Attendu que la convention par laquelle une femme s'engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l'abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d'ordre public de l'indisponibilité du corps humain qu'à celui de l'indisponibilité de l'état des personnes ;
Attendu que Mme Y..., alors épouse de M. X..., étant atteinte de stérilité, son mari a donné son sperme à Mme Z... qui, inséminée artificiellement, a porté et mis au monde l'enfant ainsi conçu ; qu'à sa naissance, le 17 novembre 1985, cette enfant, prénommée Solène, a été déclarée comme étant née de Mme Z... ; qu'elle a été ensuite successivement reconnue par celle-ci, puis par M. X... ; que Mme Z..., qui avait aussitôt remis l'enfant aux époux X..., a, le 16 juin 1986, donné son consentement à l'adoption plénière de la jeune Solène par ceux-ci ; que, toutefois, M. X... ne s'est pas associé à cette procédure et Mme Y... ayant quitté le domicile conjugal en emmenant l'enfant, a formé une action en divorce ; qu'après avoir déposé une requête en adoption plénière, Mme Y... a assigné son mari devant le tribunal de grande instance, qui a accueilli sa demande ; que la cour d'appel, statuant après le divorce des époux X..., a infirmé partiellement cette décision et prononcé l'adoption simple de l'enfant par Mme Y... ;
Attendu que pour se prononcer ainsi, l'arrêt attaqué retient qu'il est du devoir de la société de protéger l'enfant contre les erreurs des adultes et que l'adoption est conforme à l'intérêt de la jeune Solène, qui vit depuis sa naissance auprès de Mme Y... ; qu'il ajoute que la solution contraire priverait injustement cette dernière de tout droit sur l'enfant alors que M. X... pourrait exercer ses droits de père naturel ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que cette adoption n'était que l'ultime phase d'un processus d'ensemble destiné à permettre à un couple l'accueil à son foyer d'un enfant, conçu en exécution d'un contrat tendant à l'abandon à sa naissance par sa mère, et que, portant atteinte aux principes de l'indisponibilité du corps humain et de l'état des personnes, ce processus constituait un détournement de l'institution de l'adoption, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'il y a lieu, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 janvier 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
REJETTE la demande de Mme Y... tendant à l'adoption de l'enfant Solène Z...