REJET du pourvoi formé par :
- l'agent judiciaire du Trésor, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, chambre correctionnelle, en date du 14 décembre 1988, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Marc X... du chef de blessures involontaires, s'est prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des lois du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, ensemble de la loi du 31 décembre 1957 :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté l'exception d'irrecevabilité opposée par l'agent judiciaire à la demande en réparation formée par Mme Y..., fonctionnaire titulaire de l'Etat, contre l'Etat ;
" aux motifs que la compétence attribuée aux tribunaux de l'ordre judiciaire pour statuer sur les actions en responsabilité dirigées contre les personnes morales de droit public en vue de la réparation des dommages causés par des véhicules, présente un caractère général et ne comporte pas d'exception dans le cas où la victime de l'accident causé par le véhicule est un agent de droit public de la personne morale responsable ; que, ne s'agissant pas d'un accident de travail, il appartient à la juridiction correctionnelle, statuant au vu des dispositions de l'article 470-1 du Code de procédure pénale, de reconnaître et fixer le préjudice subi par la victime afin de le réparer intégralement ;
" alors que les seuls droits qu'un fonctionnaire peut faire valoir contre l'Etat en réparation de son préjudice corporel résultant d'un accident de service sont ceux qui dérivent de son statut et de la législation sur les pensions ; qu'il en est ainsi même lorsque, par application de la loi du 31 décembre 1957, la responsabilité de l'Etat se substitue à celle de l'agent, auteur de l'accident ; que la Cour qui constatait que Mme Y..., fonctionnaire de l'Etat, avait été victime d'un accident de service imputable à un véhicule appartenant à l'Etat, ne pouvait dès lors décider qu'elle avait le droit d'obtenir de l'Etat, dont la responsabilité était substituée à celle de son agent, la réparation de l'intégralité de son préjudice, en écartant la règle du forfait de pension " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'une collision s'est produite entre l'automobile d'Anne-Marie Y..., fonctionnaire de l'Education nationale qui se rendait à son travail, et un véhicule de l'Administration conduit par le gardien de la paix Jean-Marc X... qui était dans l'exercice de ses fonctions ; qu'Anne-Marie Y... a été blessée ; que, sur les poursuites exercées contre Jean-Marc X... du chef de blessures involontaires, la victime s'est constituée partie civile et a demandé, conformément aux règles du droit civil, la réparation intégrale de ses dommages à l'Etat, la responsabilité de ce dernier étant substituée à celle du prévenu par application de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 ;
Attendu que, l'agent judiciaire du Trésor ayant conclu à l'irrecevabilité de cette prétention en soutenant que, fonctionnaire victime d'un accident de service et bénéficiaire comme telle de l'indemnisation forfaitaire prévue par son statut et par la législation sur les pensions, Anne-Marie Y... ne pouvait réclamer à l'Etat la réparation complémentaire de son préjudice évalué selon les règles du droit commun, les juges ont écarté cette exception d'irrecevabilité ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'en effet, la compétence attribuée par la loi du 31 décembre 1957 aux juridictions de l'ordre judiciaire pour connaître des conséquences des accidents causés par les véhicules administratifs ne comporte aucune exception pour le cas où la victime est un agent de l'Etat, bénéficiaire du statut de la fonction publique ; qu'il appartient en pareille hypothèse à la juridiction saisie d'apprécier la responsabilité de l'auteur de l'accident et de fixer le montant des dommages-intérêts dus de ce chef, le tout conformément aux principes du droit civil, la substitution de la responsabilité de l'Etat à celle de son agent n'étant pas de nature à modifier les règles juridiques sur lesquelles doit être fondée la décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.