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02/02/2023 | FRANCE | N°22VE00869

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 02 février 2023, 22VE00869


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles :

1°) d'annuler la décision du 6 juillet 2020 par laquelle le directeur de la plateforme industrielle courrier (PIC) de la Poste de Paris-Sud-Wissous lui a indiqué qu'il allait opérer des retenues sur ses traitements pour absence de service fait à la suite de l'exercice de son droit de retrait du 18 mars au 10 avril 2020, et la décision de rejet de son recours gracieux introduit contre cette décision le 4 septembre 2020, intervenue le 21

septembre 2020 ;

2°) d'enjoindre en conséquence à la société La Poste de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles :

1°) d'annuler la décision du 6 juillet 2020 par laquelle le directeur de la plateforme industrielle courrier (PIC) de la Poste de Paris-Sud-Wissous lui a indiqué qu'il allait opérer des retenues sur ses traitements pour absence de service fait à la suite de l'exercice de son droit de retrait du 18 mars au 10 avril 2020, et la décision de rejet de son recours gracieux introduit contre cette décision le 4 septembre 2020, intervenue le 21 septembre 2020 ;

2°) d'enjoindre en conséquence à la société La Poste de lui rembourser la somme retenue à ce titre sur ses payes de juillet, août et septembre 2020, soit 514,06 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2007637 du 17 février 2022, le tribunal administratif de Versailles a annulé ces deux décisions, a enjoint à la société La Poste de rembourser à Mme B... les sommes illégalement retenues et a mis à la charge de cette société une somme de 100 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement le 14 avril et le

18 novembre 2022, la société anonyme (SA) La Poste, représentée par Me Pouillaude, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter les demandes de Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont commis des erreurs de droit tenant à la méconnaissance de l'office du juge de l'excès de pouvoir, et des erreurs tenant à la qualification juridique des faits;

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de soulever le moyen d'ordre public tenant à l'interdiction de condamner une personne publique à verser une somme qu'elle ne doit pas ;

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen opposé en défense en première instance selon lequel l'action éventuelle du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) afin de faire reconnaître une cause de danger grave et imminent est indépendante de l'exercice par l'agent de son droit de retrait ;

- les premiers juges ont méconnu leur office de juge de l'excès de pouvoir ;

- les mesures prises par La Poste à la date de l'exercice du droit de retrait, non pas au regard des connaissances de l'époque sur la pandémie, mais avec le biais nécessairement induit par le recul qui existe aujourd'hui sur la situation telle qu'elle était à cette date ;

- la requérante a fait usage de son droit de retrait le 27 mars 2020. Elle ne peut donc pas invoquer des éléments postérieurs à cette date pour valablement en justifier la légitimité ;

- le jugement est insuffisamment motivé et les premiers juges n'ont pas procédé à un examen individuel de la requête ;

- les moyens de la demande de première instance dirigés contre les décisions attaquées sont infondés ;

- les mesures prises par la Poste étaient adaptées et suffisantes ;

- les arguments de la requérante portant sur l'impossibilité de respecter les distanciations sociales comme justifiant son sentiment de mise en danger de sa sécurité personnelle manquent en fait. ;

- les dispositifs mis en œuvre pour la désinfection des mains de ses agents et les mesures de prévention du risque de contamination par le contact avec les surfaces inertes étaient suffisants ;

- les conditions requises à l'exercice du droit de retrait n'étaient pas réunies.

Par trois mémoires en défense enregistrés le 22 septembre, le 15 novembre et le 21 novembre 2022, Mme B..., représentée par Me Pelletier, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société La Poste une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, n'est pas irrégulier ;

- le simple constat de l'insuffisance des mesures de prévention mises en œuvre sur la PIC de Wissous aux dates auxquelles les droits de retrait ont été exercés suffit à caractériser la légitimité de l'exercice du droit de retrait des agents, sans qu'il soit nécessaire d'analyser individuellement leurs conditions de santé ;

- le risque de contracter la maladie pouvait être raisonnablement perçu par un agent comme constitutif d'un danger grave et imminent pour sa santé, quelque soit sa situation de santé personnelle ;

- durant la période de retrait les distanciations sociales n'étaient pas respectées ;

- il n'existait pas de masque, ni de mesure contraignante concernant le port du masque ;

- il n'existait pas de gel hydroalcoolique, ni d'essuie-mains jetables ;

- il n'existait pas de prévention suffisante du risque de contamination par le contact avec des surfaces inertes ;

- la mise en place du pass COVID a été effectuée bien après l'exercice du droit de retrait ;

- une procédure d'alerte pour " danger grave et imminent " a été initiée par le CHSCT le 17 mars 2020, qui n'a été levée que le 10 avril 2020.

Par une ordonnance du président de la chambre du 24 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 16 décembre 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2010-123 du 9 février 2010 ;

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;

- le décret n° 2011-619 du 31 mai 2011 ;

- le décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 ;

- le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 ;

- le décret n° 2020-344 du 27 mars 2020 ;

- l'arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- les observations de Me Roux pour La Poste et celles de Me Pelletier pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Toute journée au cours de laquelle un agent public s'est abstenu, du fait notamment de son absence injustifiée, d'accomplir ses obligations de service, doit donner lieu à une retenue sur son traitement pour absence de service fait. Toutefois, aux termes de l'article 6 du décret n° 2011-619 du 31 mai 2011 relatif à la santé et à la sécurité au travail et à La Poste :

" I. ' Aucune sanction ne peut être prise ni aucune retenue de salaire faite à l'encontre d'un agent ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d'eux. (...) ".

2. Mme C... B..., fonctionnaire de la société La Poste, exerçant ses missions au sein de la plateforme industrielle courrier (PIC) de Paris-Sud-Wissous, a exercé son droit de retrait de sa situation de travail du 18 mars au 10 avril 2020 en raison de l'épidémie de covid-19. Par une lettre du 6 juillet 2020, le directeur de cette plateforme lui a indiqué que des retenues pour absence de service fait seraient effectuées sur ses traitements en raison de l'exercice injustifié de ce droit de retrait. L'intéressée a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision révélée par cette lettre, ainsi que le rejet de son recours gracieux introduit contre cette décision, et d'enjoindre à la Poste de lui rembourser les sommes prélevées. Le tribunal administratif a fait droit à ses demandes par un jugement du 17 février 2022. La société La Poste fait appel de ce jugement.

Sur la nature du recours, l'office du juge et la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 113-1 du code de justice administrative : " Avant de statuer sur une requête soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges (...) la cour administrative d'appel peut, par une décision qui n'est susceptible d'aucun recours, transmettre le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat, qui examine dans un délai de trois mois la question soulevée. Il est sursis à toute décision au fond jusqu'à un avis du Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration de ce délai. "

4. Il résulte des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Versailles, en statuant sur les vices propres des deux décisions attaquées, puis en annulant la lettre en la regardant comme une décision portant retenues sur traitement, pour erreur d'appréciation, et enfin en faisant droit aux conclusions à fin d'injonction, a estimé que les demandes formées par

Mme B... devant lui relevaient en totalité du contentieux de l'excès de pouvoir.

5. Toutefois, le Conseil d'Etat a jugé par ses décisions n° 74319 et 70113 des 27 avril et 23 décembre 1988 qu'un état exécutoire ne peut pas faire l'objet d'une contestation par la voie du recours pour excès de pouvoir. Un recours dirigé contre un tel état exécutoire, ou contre un ordre de reversement, ou contre une retenue sur traitement relève, par nature, du plein contentieux. Il a étendu cette solution, en jugeant par sa décision n° 419227 du 25 juin 2018, notamment réitérée par sa décision n° 425728 et 429165 du 29 décembre 2020, qu'il " en va de même pour la requête dirigée contre la lettre par laquelle l'administration informe un fonctionnaire qu'il doit rembourser une somme indument payée et qu'en l'absence de paiement spontané de sa part, cette somme fera l'objet d'une retenue sur son traitement ", dès lors que ce courrier vaut titre exécutoire procédant à la retenue sur traitement.

6. Cependant, la décision par laquelle l'administration procède à une retenue sur salaire pour exercice injustifié du droit de retrait d'une situation de travail, révèle que l'administration estime que ce droit de retrait a été mis en œuvre par l'agent public de manière injustifiée. Le Conseil d'Etat a, par sa décision Lafage n° 42612 du 8 mars 1912, qui n'a pas été remise en cause, ouvert une option aux agents publics en leur permettant de former un recours pour excès de pouvoir à l'encontre d'une décision à objet pécuniaire. Il a par ailleurs jugé, par sa décision n° 337255 du 9 décembre 2011, que " lorsque sont présentées dans la même instance des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision et des conclusions relevant du plein contentieux tendant au versement d'une indemnité pour réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive que le requérant estime constituée par cette même décision, cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux ". En outre, le Conseil d'Etat a jugé, par sa décision n° 369531 du

18 juin 2014, que " Les décisions par lesquelles l'autorité administrative prend une sanction ou une retenue sur salaire à l'encontre d'un agent ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils estimaient, à tort, qu'elle présentait un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé, sont au nombre des décisions qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit et doivent être motivées en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979. En revanche, sauf dans le cas où elle révèlerait par elle-même un refus opposé à une demande tendant à la reconnaissance d'un droit à rémunération malgré l'absence de service fait, la décision par laquelle l'autorité administrative, lorsqu'elle liquide le traitement d'un agent, procède à une retenue pour absence de service fait constitue une mesure purement comptable, qui n'a pas le caractère d'une décision refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit, n'a donc pas à être motivée ".

7. Ainsi, la demande de première instance de Mme B..., puis l'appel formé par la société La Poste, posent la question de savoir si un recours en annulation introduit contre une lettre par laquelle l'administration informe un agent public que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur ses traitements, en raison de l'exercice injustifié de son droit de retrait d'une situation de travail pour un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que contre le rejet de son recours gracieux introduit contre cette lettre, et tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme prélevée, relève par nature, en totalité, du plein contentieux ou constitue, en totalité, un recours pour excès de pouvoir ou relève à la fois du contentieux de l'excès de pouvoir et du plein contentieux.

8. Ce litige pose en outre la question de savoir si, dans l'hypothèse où le tribunal administratif a méconnu tout ou partie de son office quant à la nature du recours porté devant lui, ce moyen doit être soulevé d'office par la cour administrative d'appel au titre de la régularité de la décision juridictionnelle contestée et communiqué aux parties en application de l'article

R 611-7 du code de justice administrative.

9. Ces questions constituent des questions de droit nouvelles présentant une difficulté sérieuse susceptibles de se poser dans de nombreux litiges. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de la société La Poste et de transmettre pour avis sur ces questions le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : Le dossier de la requête de la société La Poste est transmis au Conseil d'Etat pour examen des questions de droit suivantes :

1°) Un recours en annulation introduit contre une lettre par laquelle l'administration informe un agent public que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur ses traitements, en raison de l'exercice injustifié de son droit de retrait d'une situation de travail pour un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que contre le rejet de son recours gracieux introduit contre cette lettre, et tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme prélevée, relève par nature, en totalité, du plein contentieux ou constitue, en totalité, un recours pour excès de pouvoir ou relève à la fois du contentieux de l'excès de pouvoir et du plein contentieux '

2°) Dans l'hypothèse où le tribunal administratif a méconnu tout ou partie de son office quant à la nature du recours porté devant lui, cette question doit-elle être soulevée d'office par la cour administrative d'appel au titre de la régularité de la décision juridictionnelle contestée et communiquée aux parties en application de l'article R 611-7 du code de justice administrative.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de la société La Poste jusqu'à l'avis du Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration du délai de trois mois à compter de la transmission du dossier de cette affaire.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, à la société anonyme La Poste et à Mme C... B....

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Olson, président de la Cour,

M. Even, président de chambre,

Mme Houllier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 février 2023.

Le président-rapporteur,

B. A...

Le président de la Cour,

T. OLSON

La greffière,

S. DESNOS

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et au ministre de la transformation et de la fonction publiques en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE00869


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE00869
Date de la décision : 02/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMPTABILITÉ PUBLIQUE ET BUDGET - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES À LA COMPTABILITÉ PUBLIQUE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - NATURE DU CONTENTIEUX - RECOURS EN ANNULATION INTRODUIT CONTRE UNE LETTRE PAR LAQUELLE L'ADMINISTRATION INFORME UN AGENT PUBLIC QUE DES RETENUES POUR ABSENCE DE SERVICE FAIT VONT ÊTRE EFFECTUÉES SUR SES TRAITEMENTS - EN RAISON DE L'EXERCICE INJUSTIFIÉ DE SON DROIT DE RETRAIT D'UNE SITUATION DE TRAVAIL POUR UN MOTIF RAISONNABLE DE PENSER QU'ELLE PRÉSENTAIT UN DANGER GRAVE ET IMMINENT POUR SA VIE OU SA SANTÉ - REJET DE SON RECOURS GRACIEUX INTRODUIT CONTRE CETTE LETTRE ET TENDANT À CE QU'IL SOIT ENJOINT À L'ADMINISTRATION DE LUI REMBOURSER LA SOMME PRÉLEVÉE - NATURE DE CES RECOURS.

18-07-02-04 Le Conseil d'Etat a jugé par ses décisions n° 74319 et 70113 des 27 avril et 23 décembre 1988 qu'un état exécutoire ne peut pas faire l'objet d'une contestation par la voie du recours pour excès de pouvoir. Un recours dirigé contre un tel état exécutoire, ou contre un ordre de reversement, ou contre une retenue sur traitement relève, par nature, du plein contentieux. Il a étendu cette solution, en jugeant par sa décision n° 419227 du 25 juin 2018, notamment réitérée par sa décision n° 425728 et 429165 du 29 décembre 2020, qu'il « en va de même pour la requête dirigée contre la lettre par laquelle l'administration informe un fonctionnaire qu'il doit rembourser une somme indument payée et qu'en l'absence de paiement spontané de sa part, cette somme fera l'objet d'une retenue sur son traitement », dès lors que ce courrier vaut titre exécutoire procédant à la retenue sur traitement.......La décision par laquelle l'administration procède à une retenue sur salaire pour exercice injustifié du droit de retrait d'une situation de travail, révèle que l'administration estime que ce droit de retrait a été mis en œuvre par l'agent public de manière injustifiée. Le Conseil d'Etat a, par sa décision Lafage n° 42612 du 8 mars 1912, qui n'a pas été remise en cause, ouvert une option aux agents publics en leur permettant de former un recours pour excès de pouvoir à l'encontre d'une décision à objet pécuniaire. Il a par ailleurs jugé, par sa décision n° 337255 du 9 décembre 2011, que « lorsque sont présentées dans la même instance des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision et des conclusions relevant du plein contentieux tendant au versement d'une indemnité pour réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive que le requérant estime constituée par cette même décision, cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux ». En outre, le Conseil d'Etat a jugé, par sa décision n° 369531 du 18 juin 2014, que « Les décisions par lesquelles l'autorité administrative prend une sanction ou une retenue sur salaire à l'encontre d'un agent ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils estimaient, à tort, qu'elle présentait un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé, sont au nombre des décisions qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit et doivent être motivées en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979. En revanche, sauf dans le cas où elle révèlerait par elle-même un refus opposé à une demande tendant à la reconnaissance d'un droit à rémunération malgré l'absence de service fait, la décision par laquelle l'autorité administrative, lorsqu'elle liquide le traitement d'un agent, procède à une retenue pour absence de service fait constitue une mesure purement comptable, qui n'a pas le caractère d'une décision refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit, n'a donc pas à être motivée ».......La demande de première instance puis l'appel posent la question de savoir si un recours en annulation introduit contre une lettre par laquelle l'administration informe un agent public que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur ses traitements, en raison de l'exercice injustifié de son droit de retrait d'une situation de travail pour un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que contre le rejet de son recours gracieux introduit contre cette lettre, et tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme prélevée, relève par nature, en totalité, du plein contentieux ou constitue, en totalité, un recours pour excès de pouvoir ou relève à la fois du contentieux de l'excès de pouvoir et du plein contentieux.

PROCÉDURE - DIVERSES SORTES DE RECOURS - RECOURS DE PLEIN CONTENTIEUX - RECOURS AYANT CE CARACTÈRE - RECOURS EN ANNULATION INTRODUIT CONTRE UNE LETTRE PAR LAQUELLE L'ADMINISTRATION INFORME UN AGENT PUBLIC QUE DES RETENUES POUR ABSENCE DE SERVICE FAIT VONT ÊTRE EFFECTUÉES SUR SES TRAITEMENTS - EN RAISON DE L'EXERCICE INJUSTIFIÉ DE SON DROIT DE RETRAIT D'UNE SITUATION DE TRAVAIL POUR UN MOTIF RAISONNABLE DE PENSER QU'ELLE PRÉSENTAIT UN DANGER GRAVE ET IMMINENT POUR SA VIE OU SA SANTÉ - REJET DE SON RECOURS GRACIEUX INTRODUIT CONTRE CETTE LETTRE ET TENDANT À CE QU'IL SOIT ENJOINT À L'ADMINISTRATION DE LUI REMBOURSER LA SOMME PRÉLEVÉE - NATURE DE CES RECOURS.

54-02-02-01 Le Conseil d'Etat a jugé par ses décisions n° 74319 et 70113 des 27 avril et 23 décembre 1988 qu'un état exécutoire ne peut pas faire l'objet d'une contestation par la voie du recours pour excès de pouvoir. Un recours dirigé contre un tel état exécutoire, ou contre un ordre de reversement, ou contre une retenue sur traitement relève, par nature, du plein contentieux. Il a étendu cette solution, en jugeant par sa décision n° 419227 du 25 juin 2018, notamment réitérée par sa décision n° 425728 et 429165 du 29 décembre 2020, qu'il « en va de même pour la requête dirigée contre la lettre par laquelle l'administration informe un fonctionnaire qu'il doit rembourser une somme indument payée et qu'en l'absence de paiement spontané de sa part, cette somme fera l'objet d'une retenue sur son traitement », dès lors que ce courrier vaut titre exécutoire procédant à la retenue sur traitement.......La décision par laquelle l'administration procède à une retenue sur salaire pour exercice injustifié du droit de retrait d'une situation de travail, révèle que l'administration estime que ce droit de retrait a été mis en œuvre par l'agent public de manière injustifiée. Le Conseil d'Etat a, par sa décision Lafage n° 42612 du 8 mars 1912, qui n'a pas été remise en cause, ouvert une option aux agents publics en leur permettant de former un recours pour excès de pouvoir à l'encontre d'une décision à objet pécuniaire. Il a par ailleurs jugé, par sa décision n° 337255 du 9 décembre 2011, que « lorsque sont présentées dans la même instance des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision et des conclusions relevant du plein contentieux tendant au versement d'une indemnité pour réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive que le requérant estime constituée par cette même décision, cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux ». En outre, le Conseil d'Etat a jugé, par sa décision n° 369531 du 18 juin 2014, que « Les décisions par lesquelles l'autorité administrative prend une sanction ou une retenue sur salaire à l'encontre d'un agent ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils estimaient, à tort, qu'elle présentait un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé, sont au nombre des décisions qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit et doivent être motivées en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979. En revanche, sauf dans le cas où elle révèlerait par elle-même un refus opposé à une demande tendant à la reconnaissance d'un droit à rémunération malgré l'absence de service fait, la décision par laquelle l'autorité administrative, lorsqu'elle liquide le traitement d'un agent, procède à une retenue pour absence de service fait constitue une mesure purement comptable, qui n'a pas le caractère d'une décision refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit, n'a donc pas à être motivée ».......La demande de première instance puis l'appel posent la question de savoir si un recours en annulation introduit contre une lettre par laquelle l'administration informe un agent public que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur ses traitements, en raison de l'exercice injustifié de son droit de retrait d'une situation de travail pour un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que contre le rejet de son recours gracieux introduit contre cette lettre, et tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme prélevée, relève par nature, en totalité, du plein contentieux ou constitue, en totalité, un recours pour excès de pouvoir ou relève à la fois du contentieux de l'excès de pouvoir et du plein contentieux.

PROCÉDURE - INSTRUCTION - CARACTÈRE CONTRADICTOIRE DE LA PROCÉDURE - COMMUNICATION DES MOYENS D'ORDRE PUBLIC - COMMUNICATION D'UN MOYEN RELEVÉ D'OFFICE (ART - R - 611-7 DU CJA) - MÉCONNAISSANCE PAR LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE SON OFFICE QUANT À NATURE DU RECOURS PORTÉ DEVANT LUI.

54-04-03-02 Dans l'hypothèse où le tribunal administratif a méconnu tout ou partie de son office quant à la nature du recours porté devant lui, ce moyen doit être soulevé d'office par la cour administrative d'appel au titre de la régularité de la décision juridictionnelle contestée et communiqué aux parties en application de l'article R 611-7 du code de justice administrative ?.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - RENVOI AU CONSEIL D'ETAT D'UNE QUESTION DE DROIT NOUVELLE - RECOURS EN ANNULATION INTRODUIT CONTRE UNE LETTRE PAR LAQUELLE L'ADMINISTRATION INFORME UN AGENT PUBLIC QUE DES RETENUES POUR ABSENCE DE SERVICE FAIT VONT ÊTRE EFFECTUÉES SUR SES TRAITEMENTS - EN RAISON DE L'EXERCICE INJUSTIFIÉ DE SON DROIT DE RETRAIT D'UNE SITUATION DE TRAVAIL POUR UN MOTIF RAISONNABLE DE PENSER QU'ELLE PRÉSENTAIT UN DANGER GRAVE ET IMMINENT POUR SA VIE OU SA SANTÉ - REJET DE SON RECOURS GRACIEUX INTRODUIT CONTRE CETTE LETTRE ET TENDANT À CE QU'IL SOIT ENJOINT À L'ADMINISTRATION DE LUI REMBOURSER LA SOMME PRÉLEVÉE - NATURE DE CES RECOURS.

54-07-01-085 Le Conseil d'Etat a jugé par ses décisions n° 74319 et 70113 des 27 avril et 23 décembre 1988 qu'un état exécutoire ne peut pas faire l'objet d'une contestation par la voie du recours pour excès de pouvoir. Un recours dirigé contre un tel état exécutoire, ou contre un ordre de reversement, ou contre une retenue sur traitement relève, par nature, du plein contentieux. Il a étendu cette solution, en jugeant par sa décision n° 419227 du 25 juin 2018, notamment réitérée par sa décision n° 425728 et 429165 du 29 décembre 2020, qu'il « en va de même pour la requête dirigée contre la lettre par laquelle l'administration informe un fonctionnaire qu'il doit rembourser une somme indument payée et qu'en l'absence de paiement spontané de sa part, cette somme fera l'objet d'une retenue sur son traitement », dès lors que ce courrier vaut titre exécutoire procédant à la retenue sur traitement.......La décision par laquelle l'administration procède à une retenue sur salaire pour exercice injustifié du droit de retrait d'une situation de travail, révèle que l'administration estime que ce droit de retrait a été mis en œuvre par l'agent public de manière injustifiée. Le Conseil d'Etat a, par sa décision Lafage n° 42612 du 8 mars 1912, qui n'a pas été remise en cause, ouvert une option aux agents publics en leur permettant de former un recours pour excès de pouvoir à l'encontre d'une décision à objet pécuniaire. Il a par ailleurs jugé, par sa décision n° 337255 du 9 décembre 2011, que « lorsque sont présentées dans la même instance des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision et des conclusions relevant du plein contentieux tendant au versement d'une indemnité pour réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive que le requérant estime constituée par cette même décision, cette circonstance n'a pas pour effet de donner à l'ensemble des conclusions le caractère d'une demande de plein contentieux ». En outre, le Conseil d'Etat a jugé, par sa décision n° 369531 du 18 juin 2014, que « Les décisions par lesquelles l'autorité administrative prend une sanction ou une retenue sur salaire à l'encontre d'un agent ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils estimaient, à tort, qu'elle présentait un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé, sont au nombre des décisions qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit et doivent être motivées en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979. En revanche, sauf dans le cas où elle révèlerait par elle-même un refus opposé à une demande tendant à la reconnaissance d'un droit à rémunération malgré l'absence de service fait, la décision par laquelle l'autorité administrative, lorsqu'elle liquide le traitement d'un agent, procède à une retenue pour absence de service fait constitue une mesure purement comptable, qui n'a pas le caractère d'une décision refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit, n'a donc pas à être motivée ».......La demande de première instance puis l'appel posent la question de savoir si un recours en annulation introduit contre une lettre par laquelle l'administration informe un agent public que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur ses traitements, en raison de l'exercice injustifié de son droit de retrait d'une situation de travail pour un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que contre le rejet de son recours gracieux introduit contre cette lettre, et tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui rembourser la somme prélevée, relève par nature, en totalité, du plein contentieux ou constitue, en totalité, un recours pour excès de pouvoir ou relève à la fois du contentieux de l'excès de pouvoir et du plein contentieux.

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - EFFET DÉVOLUTIF ET ÉVOCATION - MÉCONNAISSANCE PAR LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE SON OFFICE QUANT À LA NATURE DU RECOURS PORTÉ DEVANT LUI - MOYEN DE RÉGULARITÉ ?.

54-08-01-04 Dans l'hypothèse où le tribunal administratif a méconnu tout ou partie de son office quant à la nature du recours porté devant lui, ce moyen doit être soulevé d'office par la cour administrative d'appel au titre de la régularité de la décision juridictionnelle contestée ?.


Composition du Tribunal
Président : M. OLSON
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : SELARL DELLIEN ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-02-02;22ve00869 ?
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