Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 20 mai 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Jean-de-Sixt a accordé un permis de construire à la société Cofa Promotion pour la construction d'un bâtiment d'habitation collective de huit logements, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.
Par une ordonnance n° 2106615 du 14 mars 2022, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 10 mai 2022, M. A... B..., représenté par la Selarl CDMF-Avocats, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler l'ordonnance du 14 mars 2022 de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble et de renvoyer l'affaire au tribunal ;
2°) subsidiairement, si la cour devait évoquer, d'annuler l'arrêté du 20 mai 2021 par lequel le maire de la commune Saint-Jean-de-Sixt a accordé un permis de construire à la société Cofa Promotion, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Saint-Jean-de-Sixt et de la société Cofa Promotion une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de première instance était recevable dès lors qu'il a notifié son recours gracieux au bénéficiaire du permis, à l'adresse indiquée sur le panneau d'affichage, et que ce dernier a, par suite, prolongé le délai de recours contentieux ; qu'il n'a pu avoir connaissance d'une autre adresse, à défaut d'avoir pu obtenir une copie du dossier de permis de construire, qui n'a pu être que consulté en mairie ; qu'il ne saurait être reproché à l'intéressé de ne pas en avoir alors demandé une copie, les services l'ayant informé que seule la consultation était possible sur place ; que l'adresse indiquée est celle du maître d'œuvre mandaté par le maître d'ouvrage et qu'il a été accusé réception du courrier adressé ;
- il a intérêt à agir contre le permis de construire en litige, en sa qualité de voisin immédiat et en raison des troubles apportés à ses conditions d'occupation et de jouissance, le projet portant sur la réalisation d'un bâtiment d'habitation collective en limite de propriété, induisant des excavations de près de dix mètres de hauteur, et des pertes de vue et d'intimité et un trafic supplémentaire sur la voie de desserte ; que la circonstance qu'il aurait vendu à proximité, à l'arrière de sa maison, une parcelle susceptible de supporter un projet de plus grande ampleur, ne lui fait pas perdre cet intérêt à agir ;
- le dossier de permis de construire est insuffisant ; la notice ne répond pas aux prescriptions des dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ; le plan de masse méconnaît l'article R. 431-9 du même code, le tènement étant constitué de parcelles séparées par une parcelle tierce, sans accord de son propriétaire ;
- le permis de construire méconnaît l'article AU 2 du règlement du PLU, qui prescrit de ne pas porter atteinte au caractère de la zone et d'être compatible avec les orientations du PADD tenant à respecter les coupures d'urbanisation, à favoriser la mise en place d'une mixité sociale et à préserver le cadre environnant ;
- le permis de construire méconnaît l'article AU 7 du règlement du PLU, en ce que le projet ne pouvait s'implanter que sur une seule limite latérale séparative, le débord de toiture devant être regardé comme inclus dans le calcul du prospect ;
- le permis de construire méconnaît l'article AU 10 du règlement du PLU, la hauteur maximale de 13,20 mètres étant dépassée en prenant en compte la hauteur figurant dans l'étude géotechnique de conception mentionnant une cote de 902 et non de 920,60 ;
- le permis de construire méconnaît l'article AU 11 du règlement du PLU imposant de respecter l'environnement, eu égard à son volume, à son implantation sur les deux limites latérales, à l'absence de précision sur la couverture des toitures et à leur orientation, et, enfin, à l'importance des excavations prévues par ce projet, sans justification par des raisons techniques, et à l'impact en résultant pour les constructions avoisinantes ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2022, la société Cofa Promotion, représentée par Me Passet, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la cour fasse usage des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et, enfin, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- à titre principal, la requête d'appel est irrecevable pour tardiveté, à défaut d'établir avoir procédé aux formalités de notification de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme pour le recours gracieux ; que ce dernier a été notifié à une adresse différente de celle du bénéficiaire, qui était pourtant indiquée dans le formulaire Cerfa et sur l'arrêté de permis de construire, ainsi que de celle de l'architecte ; l'affichage réalisé sur le terrain est régulier et dépourvu d'ambiguïté ;
- à titre subsidiaire, les moyens invoqués par M. B... à l'encontre du permis de construire en litige ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 13 janvier 2023, la commune de Saint-Jean-de-Sixt, représentée par Me Pons, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B....
Elle soutient que :
- le tribunal a retenu à bon droit la tardiveté de la demande de première instance, le recours gracieux ayant été adressé à une adresse inexacte correspondant à une société distincte qui est uniquement maître d'œuvre et ne figurait pas dans le dossier de permis, et n'ayant, par suite, pas prorogé le délai de recours contentieux ; que l'intéressé est venu consulter le dossier peu après la délivrance de l'arrêté en litige, accompagné du promoteur du permis de construire accordé sur la parcelle voisine, que son recours gracieux fait d'ailleurs état d'éléments de ce dossier, qu'il a pris des photographies sans demander la communication au format numérique ou papier ;
- l'affichage du permis de construire sur le terrain est régulier et a, par suite, fait courir le délai de recours contentieux ;
- le requérant n'a pas intérêt à agir, en l'absence d'atteinte directe aux conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien ;
- les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mehl-Schouder, présidente-rapporteure,
- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,
- et les observations de Me Fiat, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 20 mai 2021, le maire de la commune de Saint-Jean-de-Sixt a délivré à la société Cofa Promotion un permis de construire portant sur la réalisation d'un bâtiment d'habitation collective de huit logements. M. B... relève appel de l'ordonnance du 14 mars 2022 de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté sa demande d'annulation de ce permis de construire, ensemble le rejet de son recours gracieux, au motif qu'elle était tardive.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. D'une part, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ".
3. Il ressort des constats d'huissier produits, établis le 1er juin, le 1er juillet et le 2 août 2021, que la société Cofa Promotion a fait procéder à l'affichage de l'arrêté attaqué sur le terrain d'assiette du projet au plus tard à compter du 1er juin 2021 et que cet affichage était visible depuis la voie publique et comportait notamment les mentions relatives aux voies et délais de recours et aux formalités de notification à mettre en œuvre. Le requérant ne soutient pas, ni même n'allègue, qu'il n'aurait pas été continu, une telle discontinuité ne ressortant pas davantage des pièces du dossier. Cet affichage comprend les mentions requises par les dispositions des articles R. 424-15, A 424-16 et A 424-17 du code de l'urbanisme, et indique notamment que le bénéficiaire du permis est la société Cofa Promotion, l'indication du nom et de l'adresse de la société maître d'œuvre du projet n'ayant pas été de nature à induire les tiers en erreur sur l'identité du bénéficiaire du permis.
4. D'autre part, aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code (...). / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt (...) du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. ". A l'égard du titulaire de l'autorisation, la formalité doit être regardée comme régulièrement accomplie lorsque la notification est faite au titulaire de l'autorisation tel que désigné par l'acte attaqué, à l'adresse qui y est mentionnée.
5. Il ressort des mentions portées sur le permis de construire litigieux qu'il a été accordé à la société Cofa Promotion, dont le siège est ..., et ces indications sont au demeurant corroborées par le formulaire Cerfa. Il est constant que le recours gracieux formé le 13 juillet 2021 par M. B... a été notifié à la société Cofa Promotion, mais à une autre adresse, ..., inscrite en haut du panneau d'affichage du permis de construire et correspondant à celle de la société Blanc concept, qui assure la maîtrise d'œuvre du projet et qui est sans lien organique avec la société bénéficiaire du permis. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette société, alors même qu'il a été accusé réception du pli, aurait transmis ce dernier au titulaire du permis de construire, et aucune disposition législative ou règlementaire ne lui impose au demeurant une telle transmission. La mention de l'adresse du titulaire du permis de construire ne fait au demeurant pas partie des mentions obligatoires du panneau d'affichage décrites à l'article A. 424-16 du code de l'urbanisme. En tout état de cause, à supposer même que la mention de l'adresse de la société Blanc concept sur le panneau d'affichage ait été susceptible d'induire en erreur M. B... sur la mise en œuvre des formalités de notification de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, l'adresse exacte avait bien été indiquée dans les visas de l'acte attaqué et dans le formulaire de demande de permis de construire. A cet égard, il ressort des termes mêmes du recours gracieux ainsi que du courriel adressé par les services de la mairie au conseil du requérant, et il n'est pas sérieusement contesté, que M. B... a pu consulter le dossier du permis de construire litigieux, accompagné d'un promoteur, que des photographies ont été prises, et il n'a sollicité une copie complète du dossier que par un courrier du 2 septembre 2021. Dans ces conditions, et alors qu'il ne pouvait ignorer, ayant consulté le dossier, l'adresse exacte de la société Cofa Promotion, titulaire du permis de construire attaqué, et que la circonstance qu'il ait introduit son recours gracieux sans son conseil est sans incidence sur l'appréciation à porter en l'espèce, la notification de son recours gracieux à une adresse erronée, en méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, n'a pu proroger le délai de recours contentieux. Il suit de là que le délai de recours contentieux de deux mois, qui n'a pas été prorogé, a couru à compter du 1er juin 2021, date d'affichage du permis de construire sur le terrain d'assiette du projet. Par suite, la demande de M. B..., enregistrée le 5 octobre 2021 devant le tribunal administratif, était tardive.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais de l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions de toutes les parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Jean-de-Sixt et par la société Cofa Promotion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Saint-Jean-de-Sixt et à la société Cofa Promotion.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente,
Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 août 2023.
La présidente- rapporteure,
M. Mehl-SchouderLa présidente-assesseur,
C. Vinet
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière
N° 22LY01405 2