Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2106696, du 14 avril 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 juin 2022, M. D..., représenté par Me Serhan, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 14 avril 2022 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Le requérant soutient que :
- l'arrêté et le jugement attaqués méconnaissent l'autorité de la chose jugée, telle que résultant de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n° 20BX01245 du 27 avril 2021, dès lors que les actes dont la validité est contestée par la préfète de la Gironde ont été validés par la cour ;
- la fraude documentaire alléguée n'est pas établie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2022, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 9 juin 2022 du bureau de l'aide juridictionnelle.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... C...,
- et les observations de Me Serhan, représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant ivoirien, né selon ses déclarations le 10 janvier 2000 à Abidjan-Adjame, déclare être entré en France en septembre 2016 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 15 février 2018, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 19 avril 2019, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son égard une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Par un arrêt n° 20BX01245 du 27 avril 2021, la Cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé cet arrêté. Après une nouvelle instruction de la demande de M. D..., la préfète de la Gironde a, par arrêté du 7 septembre 2021, de nouveau refusé de délivrer à l'intéressé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2021. M. D... relève appel du jugement n° 2106696 du 14 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Il ressort des pièces du dossier que pour annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 novembre 2019, la cour administrative d'appel, dans son arrêt n° 20BX01245 du 27 avril 2021, a estimé que la préfète de la Gironde avait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que, compte tenu de la production de nouveaux actes d'état civil, dont la préfète de la Gironde n'avait pas contesté l'authenticité, il devait être tenu pour établi que M. D... avait 17 ans à la date à laquelle il a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance, le 27 mars 2017.
3. L'autorité absolue de la chose jugée qui s'attache à cet arrêt et aux motifs qui en constituent le soutien, fait obstacle à ce que la préfète de la Gironde, réexaminant la situation de M. D..., comme il lui était enjoint de le faire par ce même arrêt, remette en cause l'authenticité des actes d'état civil produits par M. D... lors de l'instance ayant donné lieu à l'arrêt d'annulation du 6 novembre 2019 et, dès lors qu'il n'est pas établi que les circonstances de fait propres à la situation de l'intéressé aient été modifiées, prenne un nouvel arrêté portant refus de séjour en se fondant sur le caractère frauduleux desdits documents d'état civil. Dans ces conditions, en se fondant sur l'avis défavorable émis par la cellule fraude documentaire de la direction zonale de la police aux frontières de Bordeaux le 17 juin 2021 dans le cadre de l'analyse de l'authenticité des nouveaux documents produits par M. D... pour refuser à ce dernier la délivrance d'un titre de séjour, la préfète de la Gironde a méconnu l'autorité absolue de la chose jugée s'attachant à l'arrêté n° 20BX01245 du 27 avril 2021. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 7 septembre 2021. Dès lors, ce jugement doit être annulé ainsi que la décision portant refus de titre de séjour du 7 septembre 2021 en litige, ainsi, que, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et la décision fixant le pays de renvoi.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
4. Eu égard au motif d'annulation retenu, en l'absence de changement dans les circonstances de droit ou de fait intervenu depuis l'édiction de l'arrêté contesté, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. D... d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet de la Gironde, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer un tel titre dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. D... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106696 du 14 avril 2022 est annulé.
Article 2 : L'arrêté de la préfète de la Gironde du 7 septembre 2021 est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de délivrer à M. D... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 21 février 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente de chambre,
Mme Bénédicte Martin, présidente assesseure,
Mme Pauline Reynaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mars 2023.
La rapporteure,
Pauline C... La présidente,
Evelyne Balzamo
Le greffier,
Christophe Pelletier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22BX01702