Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, Mmes J..., G... et D..., et MM. B... et D... ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite de rejet par laquelle le Conseil de Paris a refusé de mettre fin à l'exécution de la convention n° 75D211112S4477 conclue le 30 décembre 2011 entre le Conseil de Paris, agissant au nom de l'Etat, et la Régie Immobilière de la Ville de Paris et de procéder au retrait de la décision d'attribution de subvention d'un prêt locatif à usage social (PLUS) adoptée en exécution de cette convention, de prononcer la résiliation de la convention, d'enjoindre au Conseil de Paris de procéder au retrait de la décision d'attribution de financement PLUS et de mettre à la charge de la Régie Immobilière de la Ville de Paris une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1913299-1918372/6-1 du 26 mars 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces enregistrées le 25 mai 2021, le 21 mars et le 2 avril 2022, l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, Mmes J..., G... et D..., et MM. B... et D..., représentés par Me Nunes, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1913299-1918372/6-1 du 26 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet du Conseil de Paris de mettre fin à l'exécution de la convention n° 75D211112S4477 conclue le 30 décembre 2011 entre le Conseil de Paris, agissant au nom de l'Etat, et la Régie Immobilière de la Ville de Paris ;
3°) de mettre fin à l'exécution de la convention n° 75D211112S4477 conclue le 30 décembre 2011 entre le Conseil de Paris, agissant au nom de l'Etat, et la Régie Immobilière de la Ville de Paris ;
4°) de mettre à la charge de la Régie Immobilière de la Ville de Paris la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que de nombreux travaux ne concernaient pas la propriété objet du conventionnement et de ce que les travaux effectués par la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP) ne pouvaient en tout état de cause être qualifiés de travaux d'amélioration mais seulement de travaux d'entretien ;
- ils ont intérêt à agir dès lors que la conclusion de la convention affecte de manière directe et certaine leurs intérêts patrimoniaux en les contraignant à verser un supplément de loyer de solidarité à compter du 1er janvier 2019 ;
- la convention méconnaît les dispositions de l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation dès lors que la RIVP n'est pas un organisme HLM ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 353-2 du code de la construction et de l'habitation et est entachée d'un vice de forme dès lors qu'elle ne mentionne pas les travaux d'amélioration qui incombent au bailleur ni les caractéristiques techniques des logements après construction ou amélioration ;
- la convention est irrégulière dès lors qu'aucun prêt n'a été préalablement accordé par le préfet pour réaliser l'opération, conformément aux dispositions des articles D. 331-3 et D. 331-6 du code de la construction et de l'habitation ;
- les locataires n'avaient aucune obligation de conclure un nouveau bail, la convention étant irrégulière faute de réalisation du bilan d'occupation sociale tel que prescrit par le II de l'article R. 353-61 du code de la construction et de l'habitation et en tout état de cause, la convention est entachée d'un défaut d'examen de la situation personnelle des locataires ainsi que le révèlent les montants disproportionnés des suppléments de loyers de solidarité qui leur sont réclamés ;
- la convention méconnaît les dispositions des articles L. 353-2 et D. 353-61-II du code de la construction et de l'habitation dès lors qu'aucune opération d'acquisition des trente-sept logements au moyen d'un prêt PLUS n'est intervenue dans les immeubles sis 84 à 100 rue Mouffetard, la conclusion d'un nouveau bail emphytéotique entre la RIVP et la Ville de Paris pour une durée de trente-cinq années n'ayant en tout état de cause pas pour effet de conférer à la RIVP la propriété des immeubles faisant l'objet du conventionnement ;
- la poursuite de l'exécution de la convention est manifestement contraire à l'intérêt général dès lors que la RIVP, en méconnaissance de ses obligations contractuelles, n'a pas procédé aux acquisitions prévues et n'a pas effectué de travaux d'amélioration dans les immeubles concernés par le conventionnement, les travaux dont elle se prévaut constituant soit de simples interventions relevant de l'entretien courant ou d'un rattrapage d'un défaut d'entretien qui ne peuvent être considérées comme des travaux d'amélioration soit des travaux effectués sur un autre bâtiment que celui concerné par le conventionnement ;
- la poursuite de l'exécution de la convention est manifestement contraire à l'intérêt général dès lors que, d'une part, cette convention n'a pour effet que d'atteindre fictivement le taux de 25% de logements sociaux imposé par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 puisqu'elle ne permet pas la mise à disposition immédiate de logements sociaux aux personnes pouvant y prétendre, les logements conventionnés étant déjà occupés et que, d'autre part, cette convention n'aboutit qu'à l'acquittement par des locataires ne bénéficiant pas des aides sociales d'un supplément de loyer solidarité indu dès lors qu'il ne peut être réclamé qu'à l'achèvement des opérations en application des dispositions de l'article L. 353-8 du code de la construction et l'habitation ;
- la convention est entachée d'un détournement de procédure dès lors qu'elle n'a été conclue que dans le but, d'une part, d'augmenter artificiellement le nombre de logements sociaux dans la Ville de Paris et de permettre à la Ville de se soustraire aux pénalités financières prévues lorsque le taux de 25% de logements sociaux n'est pas atteint et, d'autre part de dissimuler l'endettement de la commune, par l'exigence d'un loyer capitalisé excessif, obligeant par ailleurs les bailleurs sociaux à s'endetter pour s'en acquitter.
Par un mémoire en défense et des pièces complémentaires enregistrés les 6 septembre et
9 décembre 2021, la Régie Immobilière de la Ville de Paris, représentée par Mes Guerrier de de Langle, conclut au rejet de la requête et à ce que soit solidairement mis à la charge de l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, de Mmes J..., G... et D... et de MM. B... et D... la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête, en tant qu'elle émane de Mmes J..., G... et D... ainsi que de MM. B... et D..., est irrecevable dès lors qu'ils n'ont pas adressé de demande de résiliation de la convention en leur nom propre ;
- la requête est irrecevable dès lors que les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir contre la convention en litige ;
- les moyens soulevés par l'association, Mmes J..., G... et D... et MM. B... et D... ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 9 novembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'association et Mmes J..., G... et D... et MM. B... et D... ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 10 novembre 2021, la Ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger conclut au rejet de la requête et à ce que soit solidairement mis à la charge de l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, de Mmes J..., G... et D... et de MM. B... et D... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir contre la convention en litige ;
- les moyens soulevés par l'association, Mmes J..., G... et D... et MM. B... et D... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 10 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au
10 décembre 2021 à 12h.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... A...,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- et les observations de Me Nunes, avocat de l'amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, de
Me Froger, avocat de la ville de Paris et de Me Bouvier D'Yvoire, avocat de la régie immobilière de la ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. Le 30 décembre 2011, l'Etat, représenté par le Conseil de Paris, et la Régie Immobilière de la Ville de Paris (RIVP), ont conclu une convention n° 75D211112S4477 pour une opération d'acquisition et d'amélioration de trente-sept logements PLUS situés 84 à 100 rue Mouffetard à Paris. Cette convention a pour effet de soumettre les locataires dont les ressources dépassent de plus de 20% les plafonds de ressources fixés pour l'attribution d'un logement social, au versement d'un supplément de loyer de solidarité prévu par les dispositions des articles L. 441-3 et suivants du code de la construction et de l'habitation et dont la RIVP réclame le paiement aux locataires concernés depuis le 1er janvier 2019. L'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, Mmes J..., G... et D... et MM. B... et D... relèvent appel du jugement du 26 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à ce qu'il soit mis fin l'exécution de la convention n° 75D211112S4477 du 30 décembre 2011 et a mis à leur charge solidairement une somme de 1 000 euros à verser à la Ville de Paris et une somme de 1 000 euros à verser à la RIVP.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Les requérants soutiennent que les premiers juges n'auraient pas répondu au moyen tiré de ce que de nombreux travaux ne concernaient pas l'immeuble objet du conventionnement et de ce que, en tout état de cause, les travaux effectués par la RIVP ne pouvaient être qualifiés de travaux d'amélioration mais seulement de travaux d'entretien. Il ressort toutefois des termes du jugement attaqué , notamment, de son point 10, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par les requérants, ont suffisamment répondu aux moyens soulevés devant eux et ont relevé en particulier que la RIVP justifiait avoir réalisé des travaux sur les ensembles immobiliers situés 84/100 et 2/2bis rue Jean Calvin, notamment l'amélioration du système de chauffage, la rénovation d'installations électriques et de chaufferie et la modernisation de cabines d'ascenseur. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce le jugement serait entaché d'une omission à statuer ou d'une insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Un tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par une décision refusant de faire droit à sa demande de mettre fin à l'exécution du contrat est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction tendant à ce qu'il soit mis fin à l'exécution du contrat.
5. Les tiers ne peuvent utilement soulever, à l'appui de leurs conclusions tendant à ce qu'il soit mis fin à l'exécution du contrat, que des moyens tirés de ce que la personne publique contractante était tenue de mettre fin à son exécution du fait de dispositions législatives applicables aux contrats en cours, de ce que le contrat est entaché d'irrégularités qui sont de nature à faire obstacle à la poursuite de son exécution et que le juge devrait relever d'office ou encore de ce que la poursuite de l'exécution du contrat est manifestement contraire à l'intérêt général. A cet égard, les requérants peuvent se prévaloir d'inexécutions d'obligations contractuelles qui, par leur gravité, compromettent manifestement l'intérêt général. En revanche, ils ne peuvent se prévaloir d'aucune autre irrégularité, notamment pas celles tenant aux conditions et formes dans lesquelles la décision de refus a été prise. En outre, les moyens soulevés doivent, sauf lorsqu'ils le sont par le représentant de l'Etat dans le département ou par les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales compte-tenu des intérêts dont ils ont la charge, être en rapport direct avec l'intérêt lésé dont le tiers requérant se prévaut.
6. Saisi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions tendant à ce qu'il soit mis fin à l'exécution d'un contrat administratif, il appartient au juge du contrat d'apprécier si les moyens soulevés sont de nature à justifier qu'il y fasse droit et d'ordonner après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, qu'il soit mis fin à l'exécution du contrat, le cas échéant, avec un effet différé.
7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 5 du présent arrêt que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de ce que la convention en litige ne mentionnerait pas, conformément aux dispositions de l'article L. 353-2 du code de la construction et de l'habitation, les travaux d'amélioration qui incomberaient au bailleur et les caractéristiques techniques des logements après construction ou amélioration, ni que cette même convention serait irrégulière en l'absence de prêts préalablement accordés par le préfet, en raison de l'absence de réalisation d'un bilan d'occupation sociale ou en l'absence d'examen réel et complet de leur situation. Par suite, le premier moyen doit être écarté.
8. En deuxième lieu, les requérants se bornent à reproduire en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, le moyen développé en première instance tiré de ce que la convention serait irrégulière dès lors que la RIVP n'était par un organisme d'HLM au sens des dispositions de l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges au point 9 du jugement attaqué, d'écarter ce moyen.
9. En troisième lieu, aux termes du II de l'article R. 353-61 du code de la construction et de l'habitation applicables au litige et désormais codifiées à l'article D. 353-61 même code : " Dans le cas d'une acquisition ou d'une convention sans travaux faisant suite à une nouvelle acquisition, lorsque les loyers ne sont pas établis sur la base de la surface corrigée, résultant de l'application du décret n° 48-1766 du 22 novembre 1948 et de l'article 4 du décret n° 60-1063 du 1er octobre 1960, il est procédé à un bilan de l'occupation sociale des logements sur la base des éléments recueillis lors de l'enquête prévue à l'article L. 441-9 ou à l'article L. 442-5 et dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé du logement ". De même, aux termes de l'article L. 351-2 du même code, dans sa version applicable au litige : " L'aide personnalisée au logement est accordée au titre de la résidence principale, quel que soit le lieu de son implantation sur le territoire national. Son domaine d'application comprend : (...) / 2° Les logements à usage locatif appartenant à des organismes d'habitations à loyer modéré ou gérés par eux ou appartenant aux bailleurs du secteur locatif définis au quatrième alinéa de l'article 41 ter de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété des logements sociaux et le développement de l'offre foncière, ou appartenant à d'autres bailleurs, à condition que les bailleurs s'engagent à respecter certaines obligations définies par décrets et précisées par des conventions régies par le chapitre III du présent titre ou par la section 3 du chapitre Ier du titre II du présent livre ; celles-ci doivent être conformes à des conventions types annexées aux décrets ; (...) ".
10. Les requérants soutiennent que la convention en litige, qui impose, conformément aux dispositions du II de l'article D. 353-61 du code de la construction et de l'habitation, une opération d'acquisition, est entachée d'une illégalité faisant obstacle à la poursuite de son exécution, dès lors qu'aucune acquisition n'a été effectuée et qu'en tout état de cause, les acquisitions ne pourront être réalisées, les logements sis 84 à 100 rue Mouffetard, qui appartiennent à la Ville de Paris, faisant l'objet d'un bail emphytéotique avec la RIVP.
11. D'une part, il résulte des dispositions de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation dans lesquelles s'inscrit la convention en litige que la conclusion d'une telle convention n'implique pas nécessairement une opération d'acquisition dès lors que, en application du 2° des dispositions précitées, peuvent faire l'objet d'un conventionnement les logements à usage locatif gérés par les organismes d'habitations à loyer modéré. En tout état de cause, le II de l'article R. 353-61 n'a pas pour objet de conditionner le conventionnement à une opération d'acquisition. Par suite, le troisième moyen doit être écarté dans sa première branche.
12. D'autre part, il résulte de l'instruction que les baux emphytéotiques des 13 et
14 décembre 1978 conclus entre la Ville de Paris et la RIVP ont été résiliés de manière anticipée le 27 novembre 2012 et que cette résiliation a entrainé le transfert en pleine propriété à la Ville de Paris des immeubles sis 84 à 100 rue Mouffetard de manière rétroactive à compter du
1er janvier 2012. En outre, la circonstance que, dans le cadre de la mise en place de la convention en litige, un nouveau bail emphytéotique ait été conclu le 27 novembre 2012 entre la Ville de Paris et la RIVP sur les mêmes immeubles, n'a pas pour effet de conférer à la RIVP la propriété des bâtiments faisant l'objet de la convention en litige. Toutefois, et dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, le conventionnement n'implique pas nécessairement une opération d'acquisition, la non-réalisation des acquisitions prévues à la convention en litige n'est pas de nature à caractériser un manquement par la RIVP à ses obligations contractuelles qui, par sa gravité, compromettrait manifestement l'intérêt général et justifierait qu'il soit mis fin à l'exécution du contrat. Par suite, le moyen doit être écarté dans sa deuxième branche et dans son intégralité.
13. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 353-8 du code de la construction et de l'habitation dans sa version applicable au litige : " Par dérogation aux dispositions de l'article L. 353-7 et sous réserve du respect des dispositions de l'article 2 modifié de la loi n. 67-561 du 12 juillet 1967 sur l'amélioration de l'habitat ou de l'article 14 modifié de la loi n. 48-1360 du 1er septembre 1948 précitée, les dispositions de la convention s'appliquent de plein droit, à compter de la date d'achèvement des travaux, à tous les locataires et occupants d'un immeuble financé dans les conditions prévues au présent livre et au livre IV du présent code si les travaux d'amélioration incombant au bailleur, conformément aux dispositions de l'article L. 353-2, sont justifiés par des considérations de salubrité, de sécurité ou de mise aux normes minimales d'habitabilité ".
14. Les requérants font valoir que la RIVP, en méconnaissance de ses obligations contractuelles, n'a pas effectué de travaux d'amélioration dans les bâtiments concernés par le conventionnement, les travaux dont elle se prévaut constituant soit des interventions relevant de l'entretien courant ou d'un rattrapage d'un défaut d'entretien qui ne peuvent être considérées comme des travaux d'amélioration, soit des travaux réalisés sur un bâtiment autre que celui concerné par la convention. Ils soutiennent également que la méconnaissance par la RIVP de ses obligations contractuelles est manifestement contraire à l'intérêt général puisque, d'une part, ces conventions, qui n'ont pour effet que d'atteindre fictivement le taux de 25 % de logements sociaux imposé par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, ne permettent pas la mise à disposition immédiate de logements sociaux aux personnes pouvant y prétendre, les logements conventionnés étant déjà occupés et, d'autre part, la convention n'aboutit qu'à l'acquittement par des locataires ne bénéficiant pas des aides sociales d'un supplément de loyer de solidarité indu dès lors qu'il ne peut être réclamé qu'à l'achèvement des travaux en application de l'article L. 353-8 du code de la construction et de l'habitation.
15. Il résulte de l'instruction, en particulier des factures produites par la RIVP, que des travaux de modernisation des cabines d'ascenseur et de remplacement des portes palières qui, eu égard à leur montant, ne peuvent être assimilés à de simples travaux d'entretien, ont été réalisés de juillet à novembre 2018 sur les immeubles faisant l'objet du conventionnement. En outre, et même à supposer que les travaux de rénovation des chaufferies, les travaux de plomberie et de rénovation électrique effectués en 2014 et 2016 ne constitueraient pas des travaux d'amélioration mais un rattrapage de travaux d'entretien, cette seule circonstance n'est pas suffisante pour caractériser une atteinte manifeste à l'intérêt général qui justifierait que soit mis fin à l'exécution de la convention en litige. En outre, les requérants ne sauraient se prévaloir des dispositions de l'article L. 353-8 du code de la construction et de l'habitation dès lors qu'il n'est pas établi que les immeubles objet du conventionnement nécessitaient des travaux justifiés par des considérations de salubrité, de sécurité ou de mise aux normes minimales d'habitabilité. Dans ces conditions, et alors qu'il est constant que la RIVP n'a exigé le paiement du supplément de loyer de solidarité qu'à compter du
1er janvier 2019, soit postérieurement à la réalisation des travaux d'amélioration, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la poursuite de la convention en litige porterait une atteinte manifeste à l'intérêt général. En outre, la circonstance, par ailleurs, que des locataires dont les ressources sont supérieures aux plafonds fixés pour l'octroi d'un logement social seraient maintenus dans les logements objet du conventionnement n'est pas davantage de nature à révéler une telle atteinte dès lors que le conventionnement, qui n'implique pas nécessairement la réalisation de nouveaux logements vacants, permet également aux locataires dont les ressources le justifient, d'accéder à l'aide personnalisée au logement. Par suite, le quatrième moyen ne peut qu'être écarté.
16. En cinquième lieu, les requérants soutiennent que la convention serait entachée d'un détournement de procédure dès lors qu'elle n'aurait été conclue que dans le but, d'une part, d'augmenter artificiellement le nombre de logements sociaux au sein de la Ville de Paris et de permettre à celle-ci de se soustraire aux pénalités financières prévues lorsque le taux de 25 % de logements sociaux imposé par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 n'est pas atteint et, d'autre part, de dissimuler l'endettement de la commune par l'exigence dans le cadre des baux emphytéotiques d'un loyer capitalisé excessif, obligeant par ailleurs les bailleurs sociaux à s'endetter pour s'en acquitter. Toutefois, la seule production d'articles de presse ne permet pas d'établir le détournement de procédure dont les requérants se prévalent. Par suite, le cinquième moyen doit être écarté.
17. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la RIVP et la Ville de Paris, que l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, Mmes J..., G... et D... et MM. B... et D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à ce qu'il soit mis fin à l'exécution de la convention n° 75D211112S4477 du
30 décembre 2011. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'annulation de ce jugement ainsi que celles aux fins d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge solidaire de l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, de Mmes J..., G... et D... et de MM. B... et D..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser pour moitié à la Ville de Paris et pour l'autre moitié à la Régie Immobilière de la Ville de Paris.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, de Mmes J..., G... et D... et de MM. B... et D... est rejetée.
Article 2 : Il est mis à la charge solidaire de l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, de Mmes J..., G... et D... et de MM. B... et D..., une somme totale de 2 000 euros à partager pour moitié entre la Ville de Paris et la Régie immobilière de la Ville de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à l'Amicale Mouffetard-Calvin-Mirbel, à Mme F... J..., Mme E... G..., Mme K... D...,
M. I... B... et M. H... D..., à la Régie immobilière de la Ville de Paris, à la Ville de Paris et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2022.
Le rapporteur,
F. HO SI A... Le président,
R. LE GOFF
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA02826