Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... C... veuve A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel cette mesure d'éloignement serait le cas échéant mise à exécution.
Par un jugement n° 1909897 du 4 juin 2020, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 juillet 2020, Mme C... veuve A..., représentée par Me B..., avocat, demande à la cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à titre principal, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et, à titre subsidiaire, sur celui du 11° du même article ou alors de l'article L. 313-14 du même code ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme C... veuve A... soutient que :
- l'arrêté est entaché d'incompétence ;
- il est insuffisamment motivé ;
- il n'a pas donné lieu à un examen circonstancié de sa situation ;
- il est entaché d'erreur de fait ;
- il méconnaît l'article L. 313-11 (7° et 11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- et les observations de Me B... pour Mme C... veuve A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... veuve A..., ressortissante camerounaise née le 16 janvier 1941, est entrée en France le 6 janvier 2017. Elle a présenté, le 12 juin 2019, une demande de carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 novembre 2019, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel cette mesure d'éloignement pouvait être exécutée d'office. L'intéressée relève appel du jugement n° 1909897 du 4 juin 2020, notifié le 10 juin 2020, par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. Mme C... veuve A..., née le 16 janvier 1941, se prévaut de ce qu'elle est régulièrement entrée en France le 6 janvier 2017 sous couvert d'un visa de court séjour, qu'elle vit depuis lors au foyer de son fils français né en 1973, que sa fille née en 1963 est régulièrement installée en France ainsi que des membres de sa fratrie, qu'elle s'occupe de ses quatre petits-enfants qui sont français et scolarisés, qu'elle est veuve depuis 1994, qu'elle a tissé de nouvelles relations sociales en France, qu'elle parle correctement le français et qu'elle connaît les valeurs de la République et n'a jamais troublé l'ordre public. Ainsi, Mme C... veuve A..., âgée de plus de 78 ans à la date de l'arrêté litigieux et présentant un état de santé fragile, doit être regardée comme justifiant que le coeur de sa vie privée et familiale se situe en France auprès de ses enfants et de ses petits-enfants. Dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté préfectoral en litige porte au droit de Mme C... veuve A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au sens des stipulations, mentionnées au point 2, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, l'arrêté du 27 novembre 2019 du préfet de l'Essonne doit être annulé.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme C... veuve A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".
6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que l'autorité préfectorale accorde à Mme C... veuve A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Essonne, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de délivrer à Mme C... veuve A... une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme C... veuve A... de la somme demandée de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1909897 du 4 juin 2020 du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 27 novembre 2019 du préfet de l'Essonne sont annulés.
Article 2 : Le préfet de l'Essonne délivrera à Mme C... veuve A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Il est mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Mme C... veuve A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 20VE01679