La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/02/2021 | FRANCE | N°20NT01393

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 11 février 2021, 20NT01393


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré.

Par un jugement n° 1911432 du 25 mars 2020, le magistrat désigné par le président tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :>
Par une requête, enregistrée le 27 avril 2020, M. C..., représenté par Me D..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré.

Par un jugement n° 1911432 du 25 mars 2020, le magistrat désigné par le président tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 avril 2020, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 25 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas régulier dès lors que la minute n'est pas signée par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif et le greffier, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, et qu'il a méconnu les dispositions de l'article R. 213-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article R. 213-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où le rejet de sa demande d'asile par la Cour nationale du droit d'asile ne lui a pas été notifié en langue arménienne, méconnaît le droit d'être entendu, a été pris au terme d'une procédure irrégulière car non contradictoire, et méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il bénéfice d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2020, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite du rejet de la demande d'asile de M. C..., ressortissant arménien, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 19 juin 2017 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 13 octobre 2017, et de sa demande de réexamen de cette demande par l'Office, le préfet de la Loire-Atlantique, par un arrêté du 8 octobre 2019, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 25 mars 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient M. C..., la minute du jugement attaqué est signée par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif et le greffier, conformément aux exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative.

3. Le moyen invoqué par M. C... et tiré de ce que le magistrat désigné a méconnu les dispositions de l'article R. 213-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le rejet de sa demande d'asile ne lui a pas été notifié en langue arménienne, relève non de la régularité du jugement attaqué mais de son bien-fondé.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

4. Si M. C... soutient que le rejet de sa demande d'asile par la Cour nationale du droit d'asile ne lui a pas été notifié en langue arménienne, il a nécessairement compris le sens de ce rejet dès lors qu'il a déposé une demande de réexamen de sa demande. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 213-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. Lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation pour l'administration d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de demander un entretien pour faire valoir ses observations orales. Lorsqu'il demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, y compris au titre de l'asile, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui vise à ce qu'il soit autorisé à se maintenir en France et ne puisse donc pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement forcé, ne saurait ignorer qu'en cas de refus il sera en revanche susceptible de faire l'objet d'une telle décision. En principe, il se trouve ainsi en mesure de présenter à l'administration, à tout moment de la procédure, des observations et éléments de nature à faire obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement. Enfin, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir.

6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... aurait demandé un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il aurait été empêché de s'exprimer avant que ne soit prise la décision l'obligeant à quitter le territoire français. L'intéressé n'allègue pas qu'il aurait tenté en vain de porter à la connaissance de l'administration des éléments pertinents relatifs à sa situation, antérieurement à cette mesure d'éloignement. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que M. C... a été privé du droit d'être entendu, résultant du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.

7. M. C..., soutient que l'arrêté contesté a été pris au terme d'une procédure irrégulière car non contradictoire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, le législateur a déterminé, à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ne sauraient donc être utilement invoquées à l'encontre de décisions portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de cet article L. 121-1 doit être écarté comme inopérant.

8. M. C... fait valoir qu'il vit en France depuis 2016 avec son épouse et leurs deux enfants, qui sont scolarisés et qui, devenus majeurs, ont déposé des demandes de délivrance de titre de séjour et qu'il démontre son intégration dans la société française en produisant une promesse d'embauche par une société de construction et de rénovation. Toutefois, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la cellule familiale peut se reconstituer dans son pays d'origine, son épouse faisant également le 8 avril 2019 l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par un arrêt n° 20NT01864 de la cour de ce jour. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de ces stipulations et dispositions doivent être écartés.

9. Compte tenu de ce qui a été dit au point 8, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il bénéfice d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faisant obstacle à une mesure d'éloignement.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. B..., président assesseur,

- M. Brasnu, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.

Le rapporteur,

J.E. B...Le président,

F. Bataille

La greffière,

A. Rivoal

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT01393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01393
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : PHILIPPON

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-02-11;20nt01393 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award